IBA (Amendment) Bill au parlement : ténors de la majorité en mode silence radio!

  • Les Obeegadoo, Ganoo ou encore Collendavelloo brillent par leur absence des débats avec Arvin Boolell subtilement écarté

Les débats parlementaires sur l’Independent Broadcasting Authority (Amendment) Bill devraient être bouclés par le Premier ministre, Pravind Jugnauth, demain à l’Assemblée nationale. Deux derniers orateurs de la majorité en lice, notamment le député Kavi Doolub et le ministre Bobby Hurreeram avant le Summing-Up. L’on aura noté dans le cadre de ces débats 14 députés de l’opposition prenant part aux débats contre 9 de la majorité.
Fait notable par contre, le silence radio des plus éloquents des ténors du gouvernement dont le DPM Steven Obeegadoo, le ministre Alan Ganoo ou encore Ivan Collendavelloo, qui n’ont visiblement pas voulu ajouter leurs points de vue sur ces amendements décriés par de nombreux acteurs de la classe politique et aussi de la société civile.

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Par ailleurs, le chef de file du PTr au Parlement, Arvin Boolell, a subtilement été écarté de la liste des orateurs. Inscrit sur la liste avant le député Doolub, ce dernier a ajourné les débats dans la nuit de vendredi à samedi, rendant caduque la participation d’Arvin Boolell. Ce dernier est rentré au pays en fin de semaine et croyait pouvoir participer à la conclusion de ces débats demain.


Arianne Navarre-Marie : « Le GM aurait-il
peur d’entendre la vérité ? »

Arianne Navarre-Marie du MMM dénonce que l’arsenal légal de l’IBA est renforcé par le gouvernement pour sanctionner les radios privées. « Ce projet de loi démontre une fois de plus la dérive totalitaire de ce gouvernement », déclare-t-elle.
Ces amendements à l’IBA Act visent à contrôler l’information, a-t-elle avancé, avant d’affirmer que la nomination du Board de cette instance est déjà un scandale en soi. Elle explique que c’est à travers les radios privées que la population apprend les tribulations du citoyen lambda, de la discrimination dont il fait l’objet face aux services publics et aux autorités.
« Si le citoyen a recours aux radios privées pour s’exprimer, cela prouve le dysfonctionnement de nos institutions. Le gouvernement aurait-il peur d’entendre les vérités ? Aurait-il peur des enquêtes en direct à la radio ? Si les gouvernants trouvent que Tempo La So, pourquoi ne pas effectuer un audit du dysfonctionnement des institutions et y remédier ? Ce sont les auditeurs qui donnent vie à une radio. En muselant les médias, ce sont les voix des auditeurs, de la population que le gouvernement étouffe », dit-elle en rajoutant que ce projet de loi n’a pas sa raison d’être et doit tout simplement être retiré.« L’histoire retiendra que le gouvernement MSM et ses alliés-complices ont été les fossoyeurs de la liberté d’expression et des radios privées à Maurice », a-t-elle conclu.


Vikash Nuckcheddy : « Qui ne se souvient pas
de l’enquête sur les moto-écoles »

Vikash Nuckcheddy du MSM s’est demandé : « Qui ne se souvient pas de l’enquête sur les moto-écoles diffusées par Top FM ? ». Il a déploré que les opposants politiques du gouvernement soient en train d’argumenter que ces amendements à l’IBA Act viseraient uniquement Top FM alors que toutes les radios sont logées à la même enseigne.
« They have been trying to show the people that these amendments are being brought only and only to stop Top FM. This is not the case Mr. Speaker Sir, we do reckon the good works that are being done by our private radios », fait-il comprendre.
Il est d’avis qu’une démocratie exige aussi que les réformes soient portées aux législations existantes dans des domaines particuliers pour les mettre en conformité avec les besoins en constante évolution du pays. Il croit que l’IBA n’est pas aussi strict que l’Office of Communication du Royaume-Uni qui a récemment, soit le 6 octobre 2021, imposé une pénalité de £ 25 000 à une chaîne satellitaire.


Kushal Lobine : « Doit-on évoluer pour
devenir plus rétrograde ? »

Kushal Lobine du PMSD se demande : « Est-ce qu’on doit évoluer pour devenir plus rétrograde ? ». Il trouve que ces amendements à l’IBA Act frisent l’absurdité et sont dépourvus de sens car aucun autre pays n’a revu le mandat d’une licence à la baisse. Il est d’avis que le meilleur système de réglementation est celui qui est manifestement indépendant de la politique gouvernementale ou partisane.
« I have therefore proposed a Media Ombudsperson, established by statute but independent of Government, appointed by the Judicial and Legal Service Commission, sitting with two assessors. These three individuals will form the Media Commission which will adjudicate complaints and issue decisions. The Ombudsperson will also be available to mediate cases that would otherwise end in court », propose-t-il. Il a exhorté le Premier ministre à ne pas procéder avec ces amendements formulés.
« Laissons la Law Reform Commission travailler là-dessus, ayons une large consultation avec les radios privées et avec la société civile, constituons un comité restreint pour examiner tous les amendements. Do not go down in history for the wrong reasons », a-t-il conclu.


Stéphanie Anquetil : « Les régimes dictatoriaux
adoptent des lois iniques »

Stéphanie Anquetil du PTr a laissé entendre que ces amendements ne seraient en réalité qu’un moyen, à peine déguisé, « de bâillonner la presse et les médias indépendants qui dérangent et d’empêcher les citoyennes et les citoyens de s’exprimer sur les ondes contre les puissants du jour, qui blessés dans leur amour-propre, dépassés par des événements, n’hésiteront pas à faire appel à un arsenal d’intimidations, d’interpellations, de procès, d’amendes entre autres ».
Elle note que cette nouvelle loi répressive  arrive à moment où les Mauriciens ne peuvent ni manifester, ni protester dans la rue. Au sujet du renouvellement annuel de la licence de station radio et les pénalités administratives excessives, elle fait ressortir que « la plupart des régimes dictatoriaux ont adopté des lois iniques pour pouvoir justement museler la presse indépendante entraînant sur son passage leur disparition ».
Ainsi, le gouvernement profiterait de cette situation pour passer un message clair : « Ferm labous. Res trankil. Pa exprim zot kont gouvernman ! ».


Teenah Jutton : « Aucune liberté
ne peut être absolue »

La Parliamentary Private Secretary Teenah Jutton a pour sa part affirmé qu’ « aucune liberté ne peut être absolue dans la mesure où elle est pratiquée strictement par rapport au respect des autres ». Elle ajoute que la liberté de la presse ne peut qu’être pratiquée que dans la limite permise par la loi.
Elle a affirmé que certaines informations diffusées par négligence ou de manière illégale peuvent nuire au tissu social et avec de graves répercussions sur la santé publique et sécurité.
« La désinformation peut être le virus le plus dangereux qui se propage en quelques secondes et ajoutée à une masse psychose », a-t-elle déclaré soulignant que ces amendements à l’IBA Act contribueraient non seulement à établir dans quelle mesure ce qui est diffusé est authentique en identifiant sa source mais rappelleraient également aux diffuseurs qu’ils ne peuvent oublier leur responsabilité sociale au détriment des citoyens.


Deven Nagalingum : « Contourner la critique n’est
qu’une perversion de la démocratie »

Deven Nagalingum du MMM est d’avis que le gouvernement est en train de provoquer le mécontentement et la frustration alors que l’heure est à la solidarité.
« Aucun gouvernement ne peut gouverner sans critique, et trouver des moyens de contourner la critique n’est qu’une perversion de la démocratie », a-t-il avancé. Il a déclaré que c’est un projet de loi qui vise à empêcher, à restreindre, à limiter et à interdire. Selon lui, l’IBA en tant que régulateur puissant dispose déjà de moyens suffisants pour réglementer le secteur de la radiodiffusion.
« Elle a dans le passé pris des sanctions. Elle a par le passé entendu des parties et lancé des avertissements. Les opérateurs se sont conformés aux directives de l’IBA. Donc où était le problème qui a alerté le gouvernement et l’a exhorté à venir avec un tel projet de loi aussi drastique ? », dit-il.
Le député du MMM rappelle que le gouvernement a le devoir d’écouter le peuple. « Les radios privées ne sont que des opérateurs à l’écoute des gens et qui accordent un espace pour s’exprimer », affirme-t-il. Deven Nagalingum a réclamé le retrait de ce projet de loi et des consultations avec les opérateurs.


Eshan Juman : « Museler le peuple qui se
fait de plus en plus vociférant »

Selon le député travailliste Eshan Juman, ces amendements visent à museler « le peuple qui se fait de plus en plus vociférant » contre le gouvernement, surtout en cette période de crise sanitaire, et que les revendications sont davantage relayées sur les radios libres et indépendantes.
« Il y a, au sein de la majorité, au moins trois ou quatre membres, si je ne me trompe pas, qui étaient employés dans des radios privées avant leur élection. J’ai hâte d’entendre ce qu’ils ont à dire sur ce projet de loi en espérant, bien sûr, ki zot pou koz seki bizin koze», a-t-il avancé.
Selon lui, c’est un coup de massue pour les radios privées qui pourront, du jour au lendemain, se retrouver, dans une situation financière précaire.
« Leur survie économique sera donc constamment menacée. L’avenir et la carrière de leurs employés seront incertains »,déclare Eshan Juman. Il dit croire que l’on se dirige vers une mort lente des radios libres et indépendantes.
« On verra à la place des radios dociles, à la solde du pouvoir, comme celles de la MBC ou encore l’autre, plus récente, proche du pouvoir et financée à travers des placements publicités d’une compagnie paraétatique ».


RAJESH BHAGWAN : « You are barking at the wrong tree »

« Today is a very sad Friday. We are being asked to vote a tailormade law to get rid of one radio », a déclaré Rajesh Bhagwan du MMM intervenant à l’Assemblée. Il dénonce  cette loi comme la création d’un nouveau monstre par le truchement de l’ Independent Broadcasting Authority
« C’est un projet de loi inique, toxique et cynique. Alors que la situation sanitaire dans le pays est critique, il y a des milliers de morts. Nous devions être en train de discuter de la pandémie, du Covid Relief Fund, du Pensions Fund . Cela montre l’état d’esprit du gouvernement », soutient Rajesh Bhagwan.
Le de l’opposition est d’avis que l’IBA Bill viendra à la rescousse du gouvernement car l’alerte incendie a déjà été déclenchée. Il estime que la stratégie du gouvernement pour s’attaquer à une radio en particulier est évidente. Le GM, dit-il, se voit contraint de s’acharner contre les radios privées car celles-ci sont les miroirs de la société.
« Cela fait mal d’entendre les auditeurs chaque matin mettre en avant les défaillances des institutions du gouvernement. Ce dernier veut éteindre ces voix car c’est inacceptable pour celui-ci d’entendre qu’il y a des failles dans leur système. Si le gouvernement veut s’attaquer à la liberté de la presse, you are barking at the wrong tree »,dit-il.
Rajesh Bhagwan rappelle que le droit à l’information est universel et que tout individu a droit à la liberté d’expression.


KALPANA KOONJOO-SHAH : « Un meilleur
encadrement légal »

La ministre de l’Égalité des Genres, Kalpana Koonjoo-Shah, déclare qu’il ne faut pas percevoir l’IBA Act en devenir comme une loi qui sévit uniquement. Pour elle, il est question d’un meilleur encadrement pour protéger les droits de tout un chacun.
« Why should we not amend a law if it is for the betterment of the society ? We need to improve regulations and punish trespassers », dit-elle, « The new law will create a better legal framework. This is a rationale that has escaped the members of the opposition. Radio plays a crucial role in informing people and helping in cases of emergencies. Some are of absolute pleasure to listen to », dit-elle.
Qui plus est, la ministre s’oppose à l’idée que cette loi violera les droits fondamentaux énoncés dans la Constitution, trouvant au contraire qu’elle sauvegardera mieux chaque segment de la population. « Chaque personne est libre d’avoir des opinions mais il ne faut pas que cela soit aux dépens des droits des autres personnes », laisse-t-elle entendre.
Kalpana Koonjoo-Shah s’interroge par ailleurs : « combien de politiciens ont été victimes de diffamation ou de diffusion de fausses nouvelles ? Cela a causé beaucoup de tort à certains. Are we not duty-bound to protect everybody’s reputation ? »


PATRICK ASSIRVADEN : « Quelle crédibilité de
l’Independent Broadcasting Review Panel »

Patrick Assirvaden du parti Travailliste s’attaque à la crédibilité même de l’Independent Broadcasting Review Panel. L’amendement de la section 38 vise à asphyxier financièrement les radios privées et la radio Top FM, estime-t-il. « Pourquoi le gouvernement ne joue-t-il pas la carte de la transparence ? L’exécutif veut aussi contrôler les radios privées », relève-t-il.
Quant à la protection des sources des journalistes, le président du parti Travailliste a déclaré que c’est une règle de droit. « C’est une action criminelle du gouvernement.  Les nominés politiques pourront grâce à cette loi fermer les radios privées si celles-ci sont trop critiques envers le gouvernement. Si les radios privées ont deux pénalités en un an c’est un million de roupies qu’elles devront payer », déclare-t-il.
Il fait comprendre que les pénalités administratives prévues dans le projet de loi pourraient être une menace à l’existence même des radios privées.


STEPHAN TOUSSAINT : « Protéger les
consommateurs contre les abus »

Stephan Toussaint souligne que depuis l’avènement des radios privées à Maurice beaucoup de choses ont changé et que le contexte actuel requiert aussi un changement au niveau des législations afin de mieux répondre aux besoins de la société d’aujourd’hui. Il a déploré le fait que les membres de l’opposition veulent faire accroire que l’IBA Act est une loi qui va engendrer des choses horribles. Pour le ministre de la Jeunesse et des Sports, cette loi va poser un cadre légal afin de protéger les consommateurs des radios privées de toute sorte d’abus. « Que se passe-t-il si une radio diffuse une publicité mensongère ? Cette loi vise non seulement à sanctionner les radios qui ne font pas bien leur travail mais aussi à offrir une protection aux auditeurs », dit-il. Si les radios privées accomplissent leur travail comme il le faut, estime le ministre, il n’y aura aucun problème. Stephan Toussaint a par ailleurs fait ressortir que la démarche du gouvernement est non de priver le peuple de leurs droits fondamentaux de liberté mais surtout de les protéger. Il estime que c’est « un gouvernement visionnaire qui marche avec le temps ».


SHAKEEL MOHAMED : « Une violation de notre Constitution »

Le député rouge est d’avis que l’IBA Act est une violation flagrante de la section 12 de la Constitution qui relève de la liberté d’expression. « There are technical issues in this law. It is not necessarily about policies but about fundamental rights. Il n’a pas manqué de critiquer le ministre Toussaint pour son appréciation de cette loi. « I cannot blame him for being economical in his understanding of the intricacies of the law ». Shakeel Mohamed souligne qu’une presse indépendante et critique est le cœur de la démocratie. La Cour européenne des droits humains, dit-il, a rendu de nombreux jugements dans ce sens. Pour lui, cette loi est clairement une violation des droits fondamentaux qui fera l’objet d’un procès à l’avenir. Il dit ne pas comprendre pourquoi le gouvernement refuse de voir l’essence même des principes fondamentaux de la Constitution. « Le Premier ministre croit qu’il faut moderniser avec le développement de la presse. S’il avait cru en l’importance d’une consultation, il aurait privilégié des consultations avant de faire passer cette loi au petit bonheur. Le Premier ministre nous a montré quelles sont ses priorités », dit-il. Le député rouge estime que le problème avec notre démocratie est le type de gouvernement que nous avons avec tout le pouvoir axé sur une seule personne. « Le jour que la Cour suprême va déclarer que cette loi est anticonstitutionnelle, ce sera trop tard. Mettez en place un comité qui va se pencher sur les points importants et va s’assurer que les droits fondamentaux soient respectés », affirme Shakeel Mohamed.

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