- L’ICAC fouille du côté du réseau mauricien du General Manager de la Beaufort Management Services Ltd avec la poursuite de l’interrogatoire “Under Warning” ce matin
- Négociations envisagées sous PoCA pour une immunité contre une collaboration dans cette affaire ayant déjà fait l’objet d’une enquête de la FSC
L’Independent Commission Against Corruption (ICAC) a pris le relais de l’enquête de l’opération Picasso, ayant déjà fait l’objet d’une de la part de la Financial Services Commission (FSC). Ainsi, Arvinsingh Canaye, plus connu comme Vinesh, le General Manager de la Beaufort Management Services Ltd, qui a été déporté des Etats-Unis à Maurice vendredi dernier après avoir purgé 13 mois de prison à New-York, subit actuellement une série d’interrogatoires Under Warning sur les dessous de ce réseau de blanchiment de fonds avec des chefs-d’oeuvre de Pablo Picasso comme paravents.
Les limiers de l’ICAC l’ont entendu hier pendant tout l’après-midi en présence de son homme de loi, Me Yash Bhadain, en vue de l’inculper provisoirement sous une charge de “conspiracy to commit money laundering”. Il devait retourner au Réduit Triangle, ce matin, pour la suite de l’exercice. Selon des recoupements d’informations, le principal concerné a été relâché sur parole en fin de journée d’hier.
Pour l’heure, des sources avisées et concordantes indiquent que l’ICAC tente de fouiller du côté du réseau mauricien de Vinesh Canaye et de comprendre le Modus Operandi de la Beaufort Management Services Ltd. Dans cette perspective, celui qui agissait comme courtier de cette société, opérant dans le Global Business Sector avec licence de la Financial Services Commission, négocierait une immunité sous les dispositions du Prevention of Corruption Act (PoCA) contre sa collaboration dans cette enquête, qui pourra bénéficier d’un complément d’informations du Federal Bureau of Investigation (FBI).
De nouvelles explications de Vinesh Canaye sont attendues ce matin à l’ICAC au sujet des transactions de la Beaufort Management Services Ltd, notamment en ce qui concerne les soupçons de “fraudulent schemes” par cette compagnie, qui détient une “Management Company’s Licence” depuis le 7 décembre 2010, octroyée par la Financial Services Commission (FSC). En effet, le Mauricien avait été arrêté aux Etats-Unis fin février 2018 lors d’une “Under Cover Operation” du Federal Bureau of Investigation (FBI), dont une équipe se trouve d’ailleurs actuellement à Maurice.
Cet habitant de Curepipe s’est retrouvé en position de courtier dans les négociations d’achat d’une œuvre mythique de Picasso pour un montant de Rs 300 millions (6,7 millions de livres), deal soupçonné de servir comme paravent pour une opération de “money laundering”. Selon les informations “On Records”, la proposition d’acquisition d’œuvres d’art avait été approfondie avec la participation d’un marchand de tableaux à Londres et il avait été décidé que l’agent “Under Cover” du FBI allait faire l’acquisition d’un tableau de Pablo Picasso pour blanchir les fonds.
À peine arrivé aux Etats-Unis, en février 2018, le Mauricien a donc été arrêté. De retour à Maurice, l’ICAC épluche désormais le Modus Operandi de la Beaufort Management Services Ltd car Vinesh Canaye ne semblerait pas avoir agi seul lors de l’Opération Picasso. C’est ainsi que l’ICAC oriente leur enquête sous une charge de “conspiracy to commit money laundering”. Selon les informations officielles, un juge fédéral de New York avait, le 2 avril dernier, décidé de ne pas prolonger l’incarcération de Vinesh Canaye à Brooklyn, estimant que la période de près de 14 mois qu’il a déjà purgée dans son dossier de blanchiment d’argent était suffisante. Ce Mauricien de 31 ans avait plaidé coupable pour un seul chef de complot pour blanchiment d’argent et était resté en détention depuis son arrestation, l’année dernière. Alors qu’il opérait pour le compte de la Beaufort Management Services Ltd, Vinesh Canaye a créé des sociétés écran pour le compte d’un agent fédéral infiltré, qui se faisait passer pour un fraudeur américain impliqué dans de multiples stratagèmes de manipulation des stocks à la recherche de Corporate Bank Accounts qu’il pouvait contrôler sans pouvoir le retracer.
Cette affaire découle de fraudes boursières impliquant plusieurs courtiers basés à Belize et la Loyal Bank Ltd, société de gestion offshore. Cependant, la juge Kiyo Matsumoto a cité un certain nombre de points ayant fait pencher la balance en faveur de la défense du Mauricien. L’un d’eux était la disparité entre Vinesh Canaye et son coaccusé, Adrian Baron, le CEO de Loyal Bank, qui avait avoué avoir demandé à d’autres personnes de créer des comptes bancaires pour l’agent infiltré se faisant passer pour un fraudeur, et avait été condamné en janvier à purger sa peine. L’avocat de Vinesh Canaye, Me James Darrow, du Federal Defenders of New York, a souligné devant la justice américaine que son client n’avait pas commis d’acte répréhensible et avait qualifié sa participation comme étant un “opportunistic crime”.
Par ailleurs, la juge Matsumoto a également noté que, comme beaucoup d’autres, Vinesh Canaye avait été incarcéré au Metropolitan Detention Center de Brooklyn « dans des conditions inhumaines et pénibles ». Les prisonniers étaient en effet enfermés dans des cellules sans plomberie ni eau courante, et leur accès à la nourriture était limité, ce que le juge a estimé « incompréhensible » pour un établissement situé aux États-Unis.
Le Mauricien devait également payer une somme de USD 105 000, mais la juge n’a infligé aucune amende et n’a ordonné aucun dédommagement car Vinesh Canaye devait être déporté. Maintenant, l’ICAC tente de coincer le Web du “jet-setter” Canaye. On laisse entendre depuis hier qu’il négocierait l’immunité auprès des hommes de Navin Beekarry pour collaborer, ayant en effet déjà purgé presque 14 mois de prison à Brooklyn. Dans les milieux avisés, on n’écarte pas la possibilité que cette enquête connaisse des rebondissements de taille dans les jours à venir.
A ce stade, la Financial Services Commission, qui avait initié dès mars de l’année dernière une enquête sous le Financial Services Act, avait enclenché des procédures, comme l’audition de la partenaire mauricienne de Beaufort Services Ltd à Maurice avec également le gel de la licence. Il avait été même question de procéder à la nomination d’un administrateur judiciaire dans cette affaire. Mais très peu de détails ont transpiré publiquement à ce sujet jusqu’ici. Sauf qu’avec l’interrogatoire du New York Boy mauricien par l’ICAC d’autres détails pourraient surgir.