Il a pris tout son temps pour s’éloigner de nous. Batsirai a adoré faire du surplace, tandis que la Météo plongeait l’île en alerte 4. Puisque malgré son petit diamètre, la catastrophe naturelle représentait, avec ses rafales de plus de 150 km/h, de graves dangers pour tout le pays, comme tout le monde en est d’ailleurs un peu témoin. Et Batsirai a continué à nous narguer sérieusement après que ces mêmes autorités aient levé l’alerte. Ce qui n’a pas manqué d’occasionner une foule de confusions et son lot de problèmes. La polémique, du coup, enfle, et elle est justifiée : n’est-il pas grand temps de revoir nos protocoles de sortie d’alertes cycloniques ?
À ce titre, Batsirai est un cas d’école parfait. Tandis que la Météo prévoyait sa trajectoire, à partir de sa vitesse moyenne de déplacement, le cyclone a décidé d’en faire des siennes. Il a ralenti considérablement et a fini par… “bouz fix” ! Contraignant les prévisionnistes de la station vacoassienne à revoir leurs copies.
Dans cet ordre d’idées, les autorités nationales, le bureau du Premier ministre et le comité de crise, entre autres, œuvrant, on le présume, en collaboration avec la Météo nationale, ne se rendaient-ils pas compte qu’en levant l’alerte 4 à 4h du matin, le 3 février, les conditions cycloniques avaient toujours de fortes chances de perdurer pendant plusieurs heures ? Nul besoin d’être sorcier ou devin, ni d’avoir une boule de cristal pour cela ! Les effets post-Batsirai, suivant les spécificités de ce cyclone, n’allaient ni s’évaporer ni se volatiliser comme ça par magie…
Et c’est ce constat fait à la va-vite, sans une réflexion à tête reposée, qui a donné lieu au capharnaüm de jeudi. Avec, hélas, le décès de Ramjeet Gosto, chauffeur d’autobus, qui a trouvé la mort en allant travailler. Quel gâchis.
Cela faisait un bon bout de temps depuis que l’île avait été aussi copieusement arrosée et malmenée par Dame Nature. Tous les Mauriciens vont se souvenir encore longtemps du passage du premier cyclone de 2022, et surtout pour des raisons loin d’être réjouissantes. Parce que Batsirai nous a fait trembler pendant de très longues heures pendant qu’il faisait du surplace, tandis que ses rafales brutales n’en finissaient pas de déraciner nos arbres et faire voltiger les fils électriques, entre autres « hasards ».
Et on n’est pas sorti de l’auberge. Des spécialistes du climat et de l’environnement expliquent en partie l’intensité et la brutalité de Batsirai par de nombreux facteurs liés au dérèglement climatique et au réchauffement planétaire. Et la, “pa dir pann dir” ! Cela fait des années que tant des observateurs, des professionnels du domaine ainsi que des militants et activistes n’en finissent pas de tirer la sonnette d’alarme : changeons de comportement, modifions nos habitudes, adoptons-en de meilleures, qui soient en phase avec l’évolution de la planète et de son écosystème. Et soyons davantage attentifs, vigilants, à ce qui se passe autour de nous et à l’impact de nos actions quotidiennes.
Certains, mais hélas très (trop) peu, s’y attellent. On le sait, d’ailleurs, que pour une véritable prise de conscience, il faut clairement un leadership national fort. Or, si Pravind Jugnauth s’est rendu à Glasgow en novembre dernier pour la COP 26, et qu’il y a pris la parole, force est de constater qu’en termes d’actions concrètes, peu (ou presque rien) n’est mis en œuvre. Le bétonnage du pays se poursuit à grand renfort de constructions d’autoponts, le métro voit son trajet allongé, des bâtiments sortent de terre, tels des herbes sauvages après une grosse pluie.
Oui, certes, le pays doit se développer. Mais doit-il le faire à n’importe quel prix ? Et pendant ce temps-là, le Covid-19 gagne du terrain. Les cas locaux augmentent régulièrement. Rodrigues, de son côté, vit un cauchemar éveillé. Résultat d’une politique où l’anticipation et la préparation ont été sacrifiées sur l’autel de la productivité, la reprise économique. Mais comme le répète souvent le Dr Vasantrao Gujadhur : « Kass pou kapav reganye, mais la vie non. »
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