La fin de l’année est toujours synonyme de stress pour les étudiants, à tous les niveaux. C’est l’heure de vérité. À quelques exceptions près, ce fait s’applique à l’ensemble de la population estudiantine, en particulier aux élèves en classes terminales.
Parmi eux, certains, grâce à leurs efforts, leurs aptitudes ou les moyens à leur disposition, aspirent à décrocher des bourses d’études allouées par l’État, tandis que d’autres cherchent à obtenir les qualifications académiques nécessaires pour entreprendre des études supérieures de leur choix.
Il s’agit d’une reconnaissance légitime, accompagnée de la fierté des parents qui ont accompagné chaque pas de l’enfant, de l’entrée en maternelle jusqu’à la fin du cycle secondaire. Même si le certificat académique peut ne pas être une finalité en soi, il reste un passeport nécessaire pour franchir des étapes déterminantes. D’où l’investissement désintéressé, sous toutes ses formes, des aînés dans l’éducation des plus jeunes.
À Maurice, la campagne électorale rappellera, si besoin est, que l’éducation est gratuite de la pré-primaire au tertiaire, avec neuf années d’éducation obligatoire. Les candidats du parti Travailliste rafraîchiront la mémoire des plus jeunes sur le fait que l’introduction de la gratuité au secondaire remonte à bientôt un demi-siècle, à l’approche des élections générales du 21 décembre 1976.
Les membres de la majorité gouvernementale évoqueront le leadership du Premier ministre, Pravind Jugnauth, dans l’extension de cet accès gratuit à l’éducation. Outre les dotations budgétaires consacrées à la Sécurité sociale, l’Éducation peut s’enorgueillir d’être l’un des rares ministères à dépasser la barre des Rs 20 milliards, soit 3% du Produit intérieur brut (PIB), un indicateur si cher au ministre des Finances, Renganaden Padayachy.
D’autres chiffres encore plus impressionnants : 23 279 enfants en bas âge répartis dans les 787 écoles pré-primaires, 83 140 dans les 334 écoles primaires, 96 885 adolescents fréquentant les 175 collèges, et aussi 50 566 jeunes inscrits dans les 46 institutions enregistrées auprès de la Higher Education Commission.
L’éducation touche en première ligne 285 000 jeunes sur une population d’un peu plus de 1,2 million d’âmes, soit presque un Mauricien sur quatre. Si l’on ajoute les parents, ce ratio passe à 7 sur 10, soit un potentiel de quelque 600 000 inscrits dans les nouveaux registres de la Commission électorale.
Cependant, la juxtaposition de ces chiffres flatteurs ne doit nullement occulter le drame que vivent ces quatre étudiants, nés à Agalega, et inscrits aux examens de School Certificate à la fin de cette année académique. Le calvaire subi par ces quatre jeunes de la république ne devrait laisser indifférent aucun Mauricien doté d’un minimum de bon sens.
Ces quatre étudiants n’ont pas pu s’embarquer à bord du MV Trochetia, appareillant pour Port-Louis, mercredi. Alors que leurs parents étaient informés de l’heure de départ du bateau d’Agalega, les enfants étaient encore au collège, essayant de rattraper le retard accumulé dans le syllabus, faute de personnel enseignant et de manuels scolaires depuis le début de l’année scolaire.
Ce qui frappe davantage, au-delà du désir ardent de réussir de ces élèves et de leurs parents, c’est la froideur administrative de la missive du 21 août stipulant que les enfants « devront impérativement voyager par le MV Trochetia », quittant l’île à 18 heures ce même jour. Aucun des responsables, que ce soit au MES, à l’Éducation nationale, ou même à l’administration de Medco Agalega, ne peut plaider l’ignorance dans cette sinistre affaire. Au pire, certains ont préféré jouer aux abonnés absents, se disant peut-être que cela ne concerne que quatre étudiants sur un caillou perdu au beau milieu de l’océan Indien.
Les développements infrastructurels et technologiques font que rien ne devrait être perdu à ce stade, mais il faut de la bonne volonté. Même si demain, dans un ultime sursaut, les responsables de l’Éducation, de concert avec les autorités compétentes, décident de rectifier le Blot d’Agalega en mettant en place les conditions permettant à ces quatre étudiants d’Agalega de participer aux examens de School Certificate, se rendront-ils dans la salle d’examen avec les mêmes chances que leurs autres camarades de la république pour décrocher ces cinq crédits, ce sésame qui ouvre la porte à tout étudiant du secondaire ?
Déjà, ils sont partis avec un lourd handicap : le manque d’enseignants et de manuels. À cela s’ajoute maintenant le poids psychologique d’être perdus au milieu de l’océan. Certes, les plus cyniques diront que ce ne sont que quatre. Mais ne dit-on pas toujours que « One is too many » ? L’Éducation à Agalega ne mérite-t-elle pas d’être considérée au même titre que celle de Maurice et de Rodrigues au sein de la république, qui ambitionne de réussir le Resettlement de l’archipel des Chagos pour compléter le processus de décolonisation ?