Il y a ces dérives liées à la politique qui suscitent interrogations et réactions vives. Ces dernières années, une culture d’opacité, de silences complices et délibérés ponctue nombre de scandales mis au jour par des lanceurs d’alerte. Qui, par peur de représailles, dans un État où l’on n’hésite pas à arrêter, ensuite enquêter, préfèrent évidemment rester dans l’ombre. Ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas de courage, de jugeote ou d’audace, mais parce qu’ils préfèrent que leur entourage direct et eux-mêmes ne finissent pas par faire la Une des médias… pour les mauvaises raisons.
Les exemples se multiplient : la fameuse “stag-party” à laquelle aurait assisté un ministre et où étaient présents des individus mieux connus pour leurs activités louches. La subite révocation du ministre Vikram Hurdoyal, sertie d’un “gentleman arrangement”, selon les mots de Pravind Jugnauth, où, donc, ni le ministre voté par le public et payé par ces mêmes citoyens, ni son supérieur hiérarchique, également un serviteur de l’État, n’ont de comptes à rendre à ceux qui font leurs salaires ! À ceux-là viennent s’ajouter les récents cas d’utilisation de véhicules de l’État par des nominés politiques, et non des moindres, car il s’agit ni plus ni moins que de l’actuel commissaire de police, ainsi que du DG de la station de radiotélévision nationale. L’un et l’autre de ces proches du pouvoir n’ont cessé de défrayer la chronique, depuis leur accession à leurs postes respectifs. Et, encore une fois, pas pour les meilleures raisons du monde !
Et pendant ce temps-là, Pravind Jugnauth se mure encore et toujours dans son silence têtu. En optant d’être loquace, voire un tantinet “palabreur”, quand il s’agit, par exemple, de son adversaire honni, l’ancien PM, Navin Ramgoolam, le chef du gouvernement ne se rend-il donc pas compte qu’il se décrédibilise littéralement dans les yeux d’un électorat éclairé et mature ? Dans une année cruciale avec cette échéance électorale, le moment est venu de prendre le taureau par les cornes. Et non de jouer à cache-cache !
Le “joke”, qui n’est évidemment pas du tout comique, c’est quand ces autorités, qui devraient faire le travail pour lequel elles sont, elles aussi, payées des deniers publics, ajustent leur tir sur l’ambulance plutôt que de rechercher les vrais coupables !
Évoquons une autre dérive. Le monde a observé, le mercredi 26, une nouvelle Journée internationale contre le trafic et l’abus de substances illicites. Une commémoration marquée, chez nous, cette année, par une sortie en règle de parents de toxicomanes qui en ont assez. Assez d’être pris en otage par les épisodes de “fat yen” de leur enfant. Assez d’être la tête de Turc des proches qui leur reprochent d’avoir « mal élevé » leur enfant. Et parfois, ce sont les pères qui taxent leurs épouses, comme s’ils étaient moins responsables de leur progéniture. Assez du chantage émotionnel permanent de (sur)vivre dans ces conditions !
Être mère, père, frère ou soeur d’un toxicomane est un réel calvaire. Et jusqu’à présent, la plupart des Mauriciens ignorent hélas ! cela. Ces parents ne sont pas des victimes collatérales mais bien directes du trafic et de la consommation des produits nocifs que sont le Brown Sugar (dérivé d’héroïne) et de toute la panoplie de drogues de synthèse aux noms les plus évocateurs (on se souvient des Ben Laden, Black Mamba, Bat dan latet, Bang Bang, AK47…). Sans compter les LSD, MDMA (ecstasy), métamphétamine, cocaïne et tout le rayon de drogues que l’on trouvait difficilement dans le pays, il y a une dizaine d’années, et qui ont fait leur entrée sur le territoire. Certains centres engagés dans les aides et soutiens aux toxicomanes essaient, avec leurs moyens du bord, d’accompagner tant bien que mal ces parents.
L’on reconnaît, certes, les efforts consentis par les régimes Jugnauth, père et fils, à combattre le trafic. L’un a institué deux commissions d’enquête tandis que l’autre se fait un devoir de rappeler son engagement sur toutes les plateformes possibles. Pourtant, malgré tout, les drogues continuent à dévaster nos jeunes, pourrir leurs vies et celles de leurs parents, faisant régner un climat d’insécurité partout.
Et comment ne pas évoquer la dérive s’agissant de la situation toujours aussi cruelle et inhumaine par l’occupation de l’armée sioniste d’Israël des territoires appartenant aux Palestiniens ?
Husna Ramjanally