Débats hors hémicycle : Contre-propositions du parti En Avant Moris sur l’Immigration Bill

Patrick Belcourt: «Nous sommes opposés à tout ce qui donne un pouvoir à un ministre sans que celui-ci ne soit soumis au contrôle de l’Assemblée »

« Il faut définitivement une loi pour gérer toute la question de l’immigration », déclare Patrick Belcourt, leader de En Avant Moris (EAM) en marge des débats sur l’Immigration Bill à l’Assemblée nationale. Mais il préconise « une loi juste et qui ne fait pas basculer le pays en dictature. »

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Il invite à « regarder les enjeux du monde contemporain : l’Australie, le Canada, l’Allemagne font aussi face au vieillissement de leur population et quand ils assouplissent les conditions à l’immigration, c’est pour avoir plus de contributions au système de production et au système fiscal. »

S’appuyant sur le principe de la séparation des pouvoirs sous la constitution, il avance que «par conséquent, nous sommes opposés à tout ce qui donne un pouvoir à un ministre sans que celui-ci ne soit soumis au contrôle de l’Assemblée et sans que les personnes lésées ne puissent avoir recours à la justice. », Dans cette perspective, l’EAM formule des propositions pour une révision en profondeur du texte de loi, notamment
la mise en place d’une commission juridique pour l’examen des dossiers de régularisation des titres de séjour et de naturalisation ainsi que l’institution d’un tribunal dédié aux affaires relevant de la citoyenneté;
l’abolition des pouvoirs discrétionnaires aux ministres ;
toutes les décisions de nature politique doivent faire l’objet d’une application devant le tribunal et
les droits des enfants doivent être garantis par l’octroi de la nationalité de facto au parent étranger d’un couple bi-national.

De son, côté, Aruna Pulton, vice-présidente du parti, commentant la composition de cette instance précise qu’une commission composée de juristes indépendants permettrait à l’administration de prendre des décisions plus conformes au droit. « L’interdiction du séjour, de l’accès au territoire, et plus encore, tout ce qui relève de l’expulsion et de la déchéance de la nationalité relève des droits fondamentaux des individus », dit-elle.
EAM préconise l’institution d’un Tribunal au niveau de la Cour intermédiaire pour déterminer rapidement tous les cas relevant de la Citoyenneté en général et de l’Immigration en particulier.

Par ailleurs, Patrick Belcourt a fait un relevé des incohérences et des dérives découlant des dispositions du projet. « Ces éléments d’exclusion sociale sont fondés dans la Section 5 du projet de loi. Le tout premier élément nous indique que Maurice va continuer à être un pays qui exclut les personnes séropositives. Pourtant on sait aujourd’hui que les personnes séropositives vivent assez normalement et sont en mesure d’avoir des activités professionnelles en ayant recours à un soutien médical et pharmaceutique. Les citoyens mauriciens séropositifs ne sont, eux, pas privés de leurs droits de voyager. Comment expliquer au monde cette discrimination à l’encontre des personnes séropositives ? » poursuit-il.

EAO s’élève contre la sous-section (c), notamment « a person who is reasonably suspected as coming to Mauritius for any immoral purpose. » « Comment peut-on avoir des suspicions raisonnables’au sujet des mœurs d’une femme qui arrive au comptoir de l’immigration ? On aurait compris s’il s’agissait d’une personne qui aurait été condamnée pour commerce sexuel. Mais là, ça dépasse tout entendement ! Le gouvernement est en train de passer une loi qui fait fi du principe de la présomption d’innocence ! Je ne sais pas si les Mauriciens se rendent compte de cette énormité, mais cette loi est en train d’instituer les préjugés comme critère de refus d’accès au territoire ! », s’insurge-t-il.

« Activités subversives » ?

Patrick Belcourt attire l’attention sur les sous-sections (h) à (n) qui mettent en avant les considérations relevant du renseignement. « Ce sont là des clauses qui accordent les pouvoirs discrétionnaires au ministre qui dit qu’il pourrait agir sur la base de conseils et de renseignements. Mais, il n’y a aucune clause qui rend le ministre comptable de ses décisions, aucune clause qui stipule le recours juridique », fait-il ressortir.
« Quelles sont ces activités subversives » ? s’interroge-t-il. « Si demain nous invitons des universitaires pour parler de géopolitique ou de politique économique dans un de nos colloques et que l’un des conseillers du Premier ministre considère que cette personne ne partage pas les vues du gouvernement d’un pays ami, cela veut dire qu’on le refoule du territoire ? Nous avons le devoir de penser à nos concurrents politiques», s’interroge Patrick Belcourt.
Au-delà du délit d’opinion que le ministre peut sanctionner ainsi, le leader d’EAM a fait part de sa méfiance des formes de catégorisation qui ne sont pas clairement décrites et qui font craindre le pire. « Ce projet de loi va donner ces pouvoirs discrétionnaires au ministre responsable du dossier de l’Immigration. Et les Mauriciens vont faire comme si nous ne savons pas ce que ces pouvoirs ont produit comme horreur dans l’histoire de l’humanité ? Ce n’est tout juste pas possible », conclut Patrick Belcourt.

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