« Crisis and deadlocks when they occur, have at least this advantage, that they force us to think. » (Jawaharlal Nehru)
VEENA MATABUDUL-PULTON
Crise existentielle, tourmente, effervescence, ou encore chamboulement…nous avions certainement vécu cela à une étape cruciale de notre vie. Mais l’avions-nous géré à bon escient?
À une plus grande échelle, comment un état ou une nation, confronté à l’effondrement d’un socle de développement, parvient-il à reprendre les rênes ? Si des conférences comme le sommet de la COP26 à Glasgow en Écosse, (re)conscientisent les États signataires sur l’urgence de protéger notre planète bleue, comment les pays touchés par les effets extrêmes du changement climatique s’y prennent-ils pour sortir du dilemme?
Quant à nous, sommes-nous prêts à nous plier à certains préceptes pour combattre et surmonter une crise, qui est indubitablement un testing time?
Accepter la réalité, savoir lâcher prise et aller au gré du vent. Puiser son inspiration chez des modèles puisque le véritable artiste crée même en copiant. Accept yourself as you are dans la mesure où l’acceptation…(nous) garde en contact avec la réalité. Prôner autant que faire se peut le freedom of constraints, en sachant pertinemment que même si on désire férocement la liberté, c’est toujours pour aller vers d’autres contraintes.
Mais quoi qu’il en soit, fort de nos expériences, bonnes ou mauvaises, ne sommes-nous pas toujours enclins à nous projeter vers un lendemain meilleur? Dans cette même veine, une nation ayant vécu un passé chaotique ou tumultueux, n’est-elle pas apte à bâtir un avenir prometteur et à anticiper une florissante postérité?
C’est dans cette atmosphère de crise ou de cataclysme que je vous invite à (re)lire « Upheaval – How nations cope with crisis and change, » de Jared Diamond, où l’auteur esquisse un tableau et établit un palmarès pour démontrer comment crisis and change, peuvent effectivement former un duo.
Traversons les océans et immergeons-nous dans ces pays lointains dont Jared Diamond s’en est inspiré pour étayer sa thèse.
Pays du Soleil Levant, archipel de l’Asie orientale…le Japon est composé de plus de 6 000 îles et avoisine les 126 millions d’habitants. Tout comme des guerres et des luttes intestines ont forgé l’histoire nipponne, la politique japonaise n’est-elle pas façonnée par le règne des Seigneurs de guerre durant l’ère Sengoku et des Seigneurs militaires que sont les Shoguns à l’époque de la dynastie Tokugawa ou Edo?
L’histoire et la culture du Japon…où le palanquin et le kimono y sont ancrés, ne sont-elles pas inextricablement liées à ces puissants gouverneurs, les Daimyos et au monde fascinant et tranchant de ces guerriers légendaires, les Samouraïs, qui fascinent encore de nos jours les mordus des films d’animation renversants et des jeux vidéo affriolants? Seuls à porter le sabre, dont le fameux katana, les Samouraïs se démarquant par leur rigueur et leur code d’honneur, le bushido, n’étaient-ils pas également de fins esthètes, à la recherche d’un art de vivre?
On dit que les années se suivent mais ne ressemblent pas, n’est-ce pas ? 1945…sera en effet une énième année qui restera gravée dans les mémoires nipponnes. Vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, un tiers de Tokyo, métropole la plus peuplée du globe, est rasé par une pluie de bombes américaines alors que Hiroshima, ville d’eau ainsi que la ville portuaire de Nagasaki, subissent le terrible sort d’être dans la ligne de mire des bombes atomiques. Tragédie, terreur…le Japon pleure ses victimes. L’Empereur Hirohito annonce à son peuple d’accepter l’inacceptable. Le Japon serait-il désormais…le Pays du Soleil couchant?
Et non!…Renaissant de leurs cendres, les villes martyres Hiroshima et Nagasaki sont entièrement reconstruites. Tokyo, jadis ville des ténèbres, est à présent une ville lumière. Ayant surmonté des crises successives, le Japon aujourd’hui remodelé, est une puissance démocratique ultramoderne, pétri de traditions, où the emperor remained the emperor. Le 1er mai 2019, Son Excellence Naruhito, le 126ème souverain du Japon, accède au trône du Chrysanthème au Palais impérial de…Tokyo!
Toutefois, le Japon contemporain n’échappe pas aux controverses. La culture du karoshi, qui prône le dépassement de soi au travail, suscite des débats au point où certains se demandent si la pratique de l’éthique du Samouraï n’est pas anachronique.
Pays des Kangourous, jeune nation sur des terres très anciennes…l’Australie n’est-elle pas aussi le Pays des Aborigènes? Autochtones ou indigènes depuis des dizaines de milliers d’années, les Aborigènes, l’un des premiers peuples de l’île Continent, se distinguant par leur peinture et leur emblème, le didjeridoo ou l’instrument à vent, entretiennent un lien spirituel très profond avec la terre et la nature. Restant en marge de la société des colons, les Aborigènes vivaient en autarcie. Mais la politique de l’Australie blanche longtemps en vigueur est abolie. Ce pays de l’hémisphère sud, ayant construit son identité nationale et s’étant reconstruit sur le thème peupler ou périr, donne naissance à une mosaïque de cultures et d’ethnies.
La voie est-elle maintenant ouverte à l’émancipation de tous les Australiens, quelle que soit leur origine? La preuve…Patty Mills, basketteur professionnel de la NBA (National Basketball Association) aux États-Unis, est le premier athlète d’origine aborigène à être le porte-drapeau pour l’Australie à la cérémonie d’ouverture aux Jeux Olympiques de Tokyo 2021. Madeleine Madden, également d’origine aborigène, est l’actrice qui joue un personnage clé dans l’adaptation télévisée de la saga culte The Wheel of Time de l’écrivain américain Robert Jordan, vendue à plusieurs millions d’exemplaires à travers le monde.
Never let a good crisis go to waste. Si les dires de Sir Winston Churchill sont justifiés, une crise ou un upheaval, serait-il un catalyseur de changement et de modernisation?
En nous inspirant du livre de Jared Diamond, pourrions-nous formuler le même sujet de réflexion qui est, vous en convenez, de brûlante actualité, car il nous concerne, nous, humbles citoyens mauriciens…How Mauritius, our small Paradise Island, is coping with crisis and change?