Un single : Mo anvi kone. Trois voix mauriciennes, celles de Dean Rungen, travailleur social engagé, et de deux Franco-mauriciens qui étudient professionnellement les arts en France, Rovy Armoogum et Virish Khaytoo.
Un cri du cœur, « pour traduire nos souffrances communes, avec le Covid-19, la guerre entre la Russie et l’Ukraine, et tous ces problèmes qui rongent nos vies, où que l’on soit ces temps-ci dans le monde ». Un « hymne pour fédérer autour d’émotions vécues et de sentiments partagés, pour y puiser réconfort, courage, persévérance et détermination, et s’en sortir tous ensemble ». Présentation.
Mo anvi kone se décline totalement en kreol morisyen, sur des notes tantôt calmes, tantôt synchrones, avec l’intensité des maux mis en paroles, teintées d’une pluralité d’influences, allant de la musique douce, distillées via un piano oscillant entre blues et groove, conjuguées aux timbres de trois voix locales. Le morceau se conclut avec un slam porté par Dean Rungen : « Nou lemone malad/Viris, lager, plizier fleo/A pe dominn nou/Dan 4 kwin later… »
Entre le jeune travailleur social et ses deux complices franco-mauriciens, Rovy Armoogum et Virish Khaytoo, étudiants en arts en France, « le courant est comme qui dirait passé automatiquement dès que j’ai partagé avec eux les mots que j’avais écrits, et qui sont devenus “Mo anvi kone” », confie Dean Rungen, pour qui la musique n’est pas qu’une « immense passion, mon dada de toujours, mais sérieusement une voie, une thérapie pour l’engagement social ». On se souvient qu’en 2017, ce militant actif sur le terrain à Maurice avait publié un CD avec des enfants en situation de rue.
La toile de fond de Mo anvi kone est toute simple : « J’ai été fortement marqué par les décès d’un oncle et d’une tante, tous deux atteints du Covid-19, l’an dernier, kan vag Delta ti pe tap for lor nou ti lil Moris, novam ek desam, explique Dean Rungen. Quand j’ai vu les larmes de mon cousin qui perdait sa maman, la douleur de mes parents à la perte de leurs proches, spontanément, ma plume s’est mise à traduire le flot de mots qui montaient en moi. » Résultat : « Leker brize larm koule/Kan perdi nou fami/Leker brile larm koule/Kan perdi nou zami/Se kinn pass ladan/Ki konn so douler/A nou prie ansam ansam/Pou konbat sa lanfer-la/Anou gard sa laflam/Dan nou leker fer li fleri/Enn larmoni propaz li/Seki monn anvi trouve… »
Dean Rungen partage alors ses écrits avec deux amis franco-mauriciens, en l’occurence Rovy Armoogum et Virish Khaytoo, qui font des études très pointues en France. « D’emblée, Rovy a été très touché, et il m’a confié qu’il était très ému par mes mots. » Les trois jeunes Mauriciens se rendent alors compte qu’ils ont tous en commun ces mêmes souffrances. « On vivait les mêmes bouleversements, et on ressentait quelque part ces mêmes sentiments. On souhaitait donc, par le biais de ce morceau, fédérer autant les Mauriciens, qu’ils se trouvent à Maurice ou à l’étranger, ainsi que tous les habitants de la planète autour du sujet. Pour nous, il était devenu clair qu’il fallait un message d’espoir dans cet océan d’épreuves et de tristesses. »
Décalage horaire et travail de pro
« Le Covid-19, qui a ébranlé la planète entière, a eu son lot de bouleversements », explique encore Dean Rungen. « Ce n’est que quand mes parents eux-mêmes ont contracté le virus qu’on a été tous touchés personnellement, que je me suis rendu compte à quel point nous étions tous vulnérables et fragiles face à cette maladie, qui fait toujours beaucoup de morts. » Couplé à cela, « le conflit entre la Russie et l’Ukraine est venu ajouter son grain de sel ».
La distance, « et surtout le décalage horaire, nous ont donné quelque peu du fil à retordre », confirme-t-il. Mais c’est mal connaître la détermination et la passion de ces jeunes ! « On a commencé à plancher sur l’enregistrement du morceau en janvier 2022, explique le jeune travailleur social. Dès 23h, ici, ce qui correspondait à 20h en France, nous étions tous les trois connectés pour répéter, composer, voir et revoir les arrangements musicaux. » Les sessions de travail duraient « très longtemps dans la nuit », ajoute le principal concerné. « Plusieurs fois je suis allé me coucher vers 4h du mat pour me réveiller dès 6h et courir aller travailler ! »
L’expérience aura cependant été « extrêmement enrichissante », dit-il. « Moi, j’ai toujours pris la chanson en amateur. Mais Rovy et Virish ont à tout prix voulu un travail de niveau pro et bien fait. On veut absolument que “Mo anvi kone” devienne un hymne qui traverse les barrières géographiques et les clivages habituels. Cette chanson, c’est un cri du cœur pour tout le monde, où que l’on soit, et qui témoigne d’une envie commune, massive, d’œuvrer pour une vie meilleure. »
En marge de la sortie officielle, via toutes les plateformes de téléchargement en ligne, le 15 avril, Dean Rungen, Rovy Armoogum et Virish Khaytoo étaient en direct du Canada, via Facebook, le 14 dans l’émission Nou Baz Art. « Dès le lendemain, toutes les radios locales ont commencé à diffuser le morceau », conclut Dean Rungen. Le trio souhaite que « tous les Mauriciens, où qu’ils se trouvent, et même des étrangers », trouvent leur point d’ancrage et s’approprient Mo anvi kone. « Que l’on comprenne la langue ou qu’on se laisse entraîner uniquement par la mélodie, ou les deux, ce morceau est un cri du cœur pour dire nos maux à tous, et évoquer nos espoirs. »
Et l’aventure ne s’arrête pas là ! « À partir de cette entrée en matière, dit Dean Rungen, et avec le support financier que nous aurons, nous espérons, avec les téléchargements, mettre d’autres projets du même acabit en chantier. » Rendez-vous sur les pages Facebook des trois jeunes !