Cour de Souillac – Meurtre de Pravin Kanakiah — Dr Boolell : « Un coup de karaté aurait pu causer la mort »

Des coups de théâtre en Cour de Souillac, hier. L’implication de Me Deepak Rutnah auprès de la famille Kanakiah est revenue sur le tapis. Le Dr Satish Boolell a fait état, pour sa part, que n’ayant jamais été mandaté légalement pour effectuer de contre-autopsie dans cette affaire, il ne l’a pas pratiqué. Néanmoins, se basant sur les blessures qu’il avait constatées de visu, il est d’avis qu’un coup de karaté au cou pouvait expliquer la cause de décès établi par le Dr Sudesh Kumar Gungadin, Chief Police Medical Officer, lors de l’autopsie.

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Lors de la séance d’hier, Me Damodar Bissessur, le représentant du Directeur des Poursuites Publiques (DPP), a procédé à l’interrogatoire du beau-frère de Pravin Kanakiah, Uttam Appaddo. Ce dernier a indiqué que Pravin Kanakiah, âgé de 38 ans, était manquant le 10 décembre 2020 et qu’on avait récupéré son corps dans les parages de Gris-Gris.

Le 11 décembre, lui et sa sœur Reshmee (la femme de Pravin Kanakiah) avaient identifié le cadavre à la morgue de l’hôpital de Souillac. Le même jour, l’autopsie avait été menée par le Dr Gungadin à la morgue de l’hôpital Victoria à Candos. Le lendemain, soit le 12 décembre, avaient eu lieu les obsèques de Pravin Kanakiah.

Uttam Appaddo a aussi indiqué que le 14 décembre, soit à peine deux jours après les obsèques, lui-même et sa sœur Reshmee sont allés à une succursale de la State Bank of Mauritius (SBM) pour réclamer l’assurance qui garantissait un Home Loan qu’avaient contracté Pravin et Reshmee Kanakiah. Ils avaient ensuite effectué plusieurs autres démarches, notamment à l’État civil.

Me Bissessur a alors fait la remarque au témoin que la façon dont il a répondu laisse planer l’impression que juste après les obsèques, il y avait un empressement de faire un constat des finances de Pravin Kanakiah. Uttam Appaddo a expliqué que sa sœur remboursait sur une base mensuelle un emprunt. De ce fait, il fallait établir l’état des finances de la victime, pour pouvoir effectuer le transfert ce montant sur le compte de celle-ci.
Le témoin a ensuite ajouté que son défunt beau-frère était quelqu’un de très « positif », qu’il n’avait jamais donné des signes de dépression, qu’il était très enthousiaste à construire sa maison et qu’il ne peut croire qu’il ait mis fin à ses jours.

Il a aussi expliqué que le jour de la découverte du corps de Pravin Kanakiah, la police n’était pas trop Keen pour une autopsie. Il est aussi revenu sur un incident qu’il a qualifié de « bizarre », où un policier dénommé Pyndiah avait emmené sa sœur « faire un tour » en fourgonnette le jour de la découverte du corps. Il les avait pour sa part suivis dans sa voiture mais le policier et sa sœur sont ensuite rentrés au poste de police.

Il a aussi relaté un incident où Me Deepak Rutnah (ndlR : le frère de Ravi Rutnah), dont les services avaient initialement été retenus par la famille Kanakiah, lui aurait expliqué qu’il s’agissait d’un meurtre et non d’un suicide. Ce serait cet homme de loi qui lui aurait demandé d’aller faire une demande à la police pour une contre-autopsie. L’avocat lui avait montré des photos du cadavre sur la plage. Les vêtements de ce dernier étaient déchirés et il avait subi des blessures. Uttam Appaddo n’avait pas demandé à l’homme de loi où il avait obtenu ces photos.

Aucune contre-autopsie
Le Dr Satish Boolell a ensuite été appelé à la barre des témoins. Il s’est présenté comme un Freelance Consultant in Forensic Medicine. Il a provoqué un coup de théâtre en Cour quand il a expliqué qu’il n’avait en fait pas effectué de contre-autopsie. Il ajoute que c’est Rama Valayden, qui représente actuellement la famille Kanakiah dans cette affaire, aurait pris contact avec lui tôt le matin du 12 décembre 2020 et lui avait demandé d’être présent à l’autopsie. Toutefois, cela avait déjà été effectué la veille, soit le 11 décembre.
Le 12 décembre 2020, le Dr Boolell s’est rendu à l’hôpital Victoria. Là-bas, Mme Reshmee Kanakiah semblait incertaine si elle voulait de contre-autopsie et voulait consulter son frère Uttam. Il a ensuite appelé Me Valayden pour lui décrire la tournure des événements mais ne savait pas si les services de ce dernier avaient effectivement été retenus par famille Kanakiah.

Le médecin a ainsi fait état en Cour qu’à ce moment précis, il n’avait pas d’autorité légale pour effectuer une contre-autopsie, sans accord en écrit avec Mme Kanakiah ou avec son représentant légal, ou sans directive émanant de la police ou du Parquet ou d’un tribunal. Il n’est pas absolument pas d’accord avec ce qu’avaient affirmé Reshmee Kanakiah et Deepak Rutnah, qui ont déjà déposé en Cour dans le cadre de cette enquête judiciaire, à l’effet que ses services avaient été retenus pour une contre-autopsie.

Le Dr Gungadin avait toutefois accepté d’accompagner le Dr Boolell, où il avait pu constater le corps et ses blessures, mais sans effectuer de contre-autopsie. Le Dr Gungadin lui a aussi montré ses conclusions. Ce dernier a expliqué à son confrère la cause de décès et comment il est arrivé à cette conclusion.

Le Dr Gungadin avait fait état de ses conclusions dans un rapport en date du 15 janvier 2021. Il avait attribué la cause du décès à une Traumatic Subarachnoid Haemorrhage, c’est-à-dire une hémorragie et un œdème du cerveau, dû à un mouvement violent de cet organe dans la cavité crâniale.

Il indique qu’il y a deux possibilités : premièrement, la tête de défunt a pu heurter une surface dure, par exemple lors d’une chute ; et deuxièmement, un impact contondant (Blunt Force) a pu être exercé sur sa tête, à divers endroits. Dans les deux cas, cela a provoqué cette hémorragie et causé sa mort. Selon lui, la thèse de Foul Play ne peut être écartée dans cette affaire.

Le Dr Boolell s’est dit d’accord avec Dr Gungadin au sujet de ses conclusions et la cause du décès mais il est allé plus loin. Il a émis la possibilité qu’un coup de karaté aurait pu être administré à Pravin Kanakiah et provoqué le traumatic subarachnoid hemorrhage.
Me Bissessur a insisté qu’il n’y a pas eu de fracture du crâne ou d’hématome au cou. Le Dr

Boolell a maintenu que l’absence d’hématome au cou n’exclut pas un coup de karaté en cet endroit. Il a rejoint son collègue et a affirmé que la thèse de foul play ne peut être exclue de cette affaire. Il a aussi expliqué qu’il ne pense pas qu’il serait parvenu à une conclusion différente s’il avait effectué une contre-autopsie.
La magistrate Ameerah Dhunnoo a alors mis fin à la séance. La prochaine audience a été fixée au 2 avril.

 

 

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