ABDEL KURREEMBUKUS
Syndicaliste engagé
Pendant la pandémie de COVID-19, le monde a connu des bouleversements sans précédent, affectant tous les secteurs, y compris l’économie. Maurice n’a pas échappé à cette réalité. La population mauricienne, face à une crise sanitaire et économique, a dû s’adapter rapidement. Malgré la peur et l’incertitude, les citoyens et les travailleurs ont fait preuve d’un courage remarquable. Beaucoup ont travaillé depuis chez eux, tandis que d’autres se sont exposés à des risques pour maintenir à flot des entreprises, assurer des services essentiels et, par extension, permettre à l’économie nationale de survivre.
Pourtant, après l’annonce des dernières règlementations du gouvernement pour le réalignement salarial, il est déplorable de constater que certaines grandes entreprises, représentées notamment par Business Mauritius, font preuve d’une ingratitude marquée. Au lieu de reconnaître les sacrifices des employés et de la population, elles semblent privilégier leurs propres intérêts, au détriment du bien commun.
Des efforts oubliés
Durant la pandémie, les travailleurs mauriciens n’ont pas hésité à répondre à l’appel, malgré les dangers. Ceux qui ne pouvaient pas travailler à distance ont bravé la peur et les risques sanitaires pour assurer la continuité des services. Certains ont maintenu les chaînes de production actives, tandis que d’autres se sont assurés que les besoins essentiels des citoyens soient satisfaits. Ces actions ont permis à de nombreuses entreprises de survivre et, pour certains, de continuer à générer des profits conséquents.
On ne peut non plus ignorer les mesures extraordinaires prises par le gouvernement pour soutenir les entreprises pendant cette crise. Des milliards de roupies ont quitté les caisses publiques pour venir en aide aux entreprises en difficulté, sous forme de subventions et de prêts. Cet argent provenait des contribuables mauriciens, les mêmes personnes qui ont été en première ligne de la crise. Toutefois, aujourd’hui, une question persiste : ces dettes envers la population ont-elles été remboursées ?
Une ingratitude palpable
Aujourd’hui, alors que les temps sont meilleurs et que de nombreux secteurs ont redémarré, il est navrant de constater que certaines entreprises, plutôt que de rendre la pareille, semblent refuser de contribuer au bien-être collectif. L’attitude de Business Mauritius, représentant plusieurs grandes entreprises du pays, en est un exemple frappant. Plutôt que de suivre les directives du gouvernement et des autorités compétentes, ces entreprises semblent vouloir contourner les règles, mettre en défi les ministères, et adopter des pratiques qui servent uniquement leurs intérêts.
Cela soulève une question éthique fondamentale : où est la reconnaissance envers ceux qui ont permis à ces entreprises de survivre, voire de prospérer pendant la période de pandémie que nous avons connue ? Il est regrettable de voir que certains patrons, au lieu de soutenir leurs employés et de contribuer au redressement national, préfèrent maintenir une attitude de repli, se concentrant uniquement sur l’augmentation de leurs profits, sans aucun égard pour les sacrifices passés.
La privatisation des profits, la nationalisation des pertes – La preuve ?
Ce concept se vérifie aujourd’hui dans le contexte mauricien. Lorsque les entreprises étaient en difficulté, elles ont reçu le soutien des contribuables. Cependant, maintenant que les affaires reprennent et que les profits augmentent, on ne voit aucun retour d’ascenseur. Cette attitude est non seulement injuste, mais elle reflète également une profonde inégalité dans la façon dont les ressources sont gérées.
Les travailleurs, qui ont contribué à la survie de ces entreprises, devraient voir leurs efforts reconnus. Au lieu de cela, ils se retrouvent souvent à devoir lutter pour de meilleures conditions de travail et une juste rémunération. Cette situation est d’autant plus frustrante quand on sait que les profits de certaines grandes entreprises atteignent à nouveau des sommets. Alors, pourquoi un tel manque de reconnaissance et de solidarité envers ceux qui ont contribué à ces gains ?
Le patronat, sous la bannière de Business Mauritius, pense-t-il pouvoir imposer ses propres règles sans tenir compte des lois et des droits des employés ?
Face à cette situation, les syndicats mauriciens commencent à s’organiser pour protéger les droits des travailleurs. Ils se demandent de plus en plus si le patronat, sous la bannière de Business Mauritius, pense pouvoir imposer ses propres règles sans tenir compte des lois et des droits des employés. La résurgence des revendications syndicales est une réaction naturelle face à cette ingratitude manifeste.
Les fédérations syndicales à travers le pays doivent se concerter pour une action commune. Sans une mobilisation collective, les travailleurs risquent de subir les conséquences de cette politique de profits avant tout. Le moment est venu de rappeler aux employeurs que le bien-être des travailleurs est intrinsèquement lié à la réussite de leurs entreprises. Sans eux, les profits dont ils jouissent aujourd’hui n’auraient pas été possibles.
Are We All In This Together…?
Il est important de souligner que les entreprises ont une responsabilité sociale. Elles ne peuvent pas simplement accepter l’aide de l’État et des citoyens en temps de crise, pour ensuite refuser de partager les fruits de leur réussite une fois la tempête passée.
Il est temps que les grandes entreprises reconnaissent leur dette envers la société et agissent en conséquence. Quant aux syndicats et aux travailleurs, ils doivent rester vigilants et se préparer à défendre leurs droits face à cette résistance d’un autre temps.
La pandémie a révélé de nombreux aspects de la société mauricienne, notamment le dévouement et le sacrifice des travailleurs MAIS la situation actuelle met en lumière les inégalités flagrantes entre les grandes entreprises et la population. L’ingratitude de certaines entreprises, sous l’égide de Business Mauritius, est un affront à tous ceux qui ont donné de leur temps et de leur énergie pour maintenir l’économie à flot pendant cette période de crise qu’on a connue.
Rappelons-nous qu’au cours de la crise, certains patrons répétaient fréquemment le slogan « We Are All In This Together » à leurs employés pour les inciter à donner le meilleur d’eux-mêmes et à continuer à créer de la valeur pour leurs entreprises.
Il est temps aujourd’hui que les travailleurs leur demandent : sommes-nous encore vraiment tous ensemble ?