À 38 ans, le Rodriguais Fabio Ramsamy détient le record national du javelot avec une performance de 69,70m réalisée en 2005. Depuis, aucun athlète n’a pu se rapprocher de cette marque, ce qui démontre que cette épreuve n’a pas beaucoup évolué à Maurice. Par contre, Fabio Ramsamy n’a pas eu une carrière comme celle d’Eric Milazar ou Stéphan Buckland, car il estime avoir été mis de côté lorsqu’il était au sommet de sa forme. Détenteur d’une licence en Art & Science and Technology, il enseigne désormais au Rodrigues College et supervise également une dizaine de lanceurs à Rodrigues, notamment la championne de Maurice du marteau, Juliane Clair.
Au début de sa carrière en 1996, ce sont les courses de sprint qui attiraient Fabio Ramsamy, mais ce dernier n’a jamais pu percer sur ces épreuves. Touchant à tout, il réalise que ses meilleures performances sont réalisées au lancer du javelot. « À la suite d’une blessure aux ischio-jambiers, j’ai pris conscience que le sprint n’était pas fait pour moi. Mais c’est durant mon année en minimes que j’ai décidé de me consacrer au javelot », fait-il ressortir. Durant les années 1997-98, c’est un certain Stéphanio Perrine qui dominait cette épreuve, et Fabio Ramsamy avait bouclé l’année avec un jet de 42 mètres contre 53 mètres pour Perrine. « Je n’avais pas une bonne technique, mais je dois dire que c’est grâce aux jeux de l’époque que mon talent s’est développé. On lançait des cailloux pour faire partir les cabris et les bœufs dans la bonne direction et on grimpait aux cocotiers. Cela peut être banal pour certains, mais c’est là qu’est née cette force pour le javelot », souligne le recordman.
Si au début de sa carrière il était dans l’ombre de Stéphanio Perrine, il avait la conviction qu’il allait devenir un grand lanceur. « À l’époque, je voyais un groupe d’athlètes faire leurs passeports, car ils devaient représenter Maurice à une compétition à l’étranger. Je voulais y être aussi. Mais avec une performance de 42 mètres, Daniel André, m’avais un peu découragé, car ce n’était pas une performance qui retient l’attention. Mais comme je suis un fonceur, je n’ai pas baissé les bras », nous dit-il. En 2000, il se rapproche de Stéphanio Perrine d’un mètre, soit 52,50m contre 53,50m. « C’est à partir de là, que tout a commencé, car j’attirais certains regards », explique-t-il. En 2001, les premières médailles continentales commencent à tomber. Avec 52m, il se classe deuxième derrière un Zimbabwéen qui avait réalisé 57m lors des championnats d’Afrique australe pour la catégorie cadets. « J’ai pris conscience du niveau des Africains, et que je devais encore progresser. » Durant la même année, il se classe une nouvelle fois deuxième lors des Jeux des Villes de l’océan Indien dans la catégorie seniors et remporte ensuite cette compétition dans la catégorie cadets avec une performance de 55m.
Une montée en puissance qui se confirme avec un record national de la catégorie juniors avec une performance de 61,84m en 2002, mais cette marque n’a pas tenu longtemps. « C’était avant tout une fierté, car j’avais débuté au plus bas de l’échelle, mais je n’ai jamais baissé les bras », fait-il ressortir. À noter qu’il est le premier Rodriguais à passer la barre des 60m dans la catégorie juniors. En 2003, il remporte le titre du meilleur athlète lors des championnats nationaux avec une performance de 62,36m, mais n’est pas sélectionné pour les Jeux des îles des l’océan Indien. « Cela a été une grosse déception car on ne m’a pas donné les raisons de ma non-sélection. Mais une nouvelle fois, je me suis remis au travail pour prouver à certaines personnes ce que je valais », souligne-t-il. En ce temps-là, le record national seniors était détenu par David Lam Vo Hee (63,84m).
Pluie de records
En 2004, l’habitant de Corail Petite Butte à Rodrigues vient prendre sa revanche avec un objectif clair : donner tort à tous ceux qui n’ont pas cru dans son talent. Il fera encore mieux en inscrivant une nouvelle marque nationale au stade Maryse-Justin à Réduit. Durant cette compétition, dès son premier essai, Fabio Ramsamy, alors âgé de 20 ans, efface la performance nationale de David Lam Vo Hee avec un jet de 66,62m, et enchaîne avec des lancers de 67,76m, 68,72m et finalement 69,11m, ce qui constitue alors le record national, lors du Skyline International Meet. « Malgré le fait d’avoir réalisé lors de mon premier essai le record national, je suis resté concentré et la suite a été payante », déclare Fabio Ramsamy. Alors que d’autres athlètes bénéficiaient de stages à l’étranger, pour le recordman du javelot, la fédération l’avait oublié. « Je pensais mériter une bourse afin de m’entraîner en Afrique du Sud, mais on ne m’a pas donné cette chance. Si j’avais eu cette facilité à l’époque, la marque nationale aurait sûrement été bien au-dessus des 75m », estime-t-il. Durant cette même année, il décroche le titre du Sportsman of the Year à Rodrigues. Il se classera par la suite sixième lors des Championnats d’Afrique à Brazzaville au Congo.
En 2005, s’il commence ses études en Art & Science and Technology, il n’est pas régulier à l’entraînement, faisant de ses études sa priorité. Mais il n’empêche qu’il décroche la deuxième place lors des championnats d’Afrique australe et marquera le coup avec un nouveau record national. « Après 2004, j’avais été assez découragé, mais au fil du temps, j’ai repris confiance, même si je n’étais pas régulier aux entraînements », souligne l’enseignant. En effet, lors du Meeting International, il établit une nouvelle marque nationale, soit de 69,70m. L’année suivante, sous la supervision de l’Ukrainien Oleksandr Nevskyy, il réalise un jet de plus de 70m, mais non-comptabilisé, car il avait mordu la ligne. « Je pense que cela a été le plus gros regret de ma carrière », déclare Fabio Ramsamy.
De 2007 à 2009, il se fait assez discret, prenant même ses distances avec l’athlétisme. En 2010, il revient petit à petit à la compétition, et cette fois il est sélectionné pour les JIOI 2011, où il termine cinquième du concours avec une performance de 65,11m. « C’était les JIOI les plus relevés au javelot. Celui qui avait pris la première place avait terminé au-delà des 70m », fait-il ressortir. Par la suite, « j’avais perdu cet amour pour l’athlétisme », réagit Fabio Ramsamy. Lors des JIOI 2015, certains dirigeants lui ont demandé de s’aligner à cette compétition, car il n’y avait aucun lanceur qui pouvait prétendre lancer au-delà des 60m. S’il prend la quatrième place lors de cette compétition, cela « n’a pas été une déception, car j’avais gagné énormément en expérience », souligne le Rodriguais.
En 2016, il prend sa retraite en tant qu’athlète et se concentre sur le coaching. « Je ne pouvais pas faire les deux en même temps, j’ai donc décidé de tourner la page », fait-il ressortir. Désormais entraîneur, il supervise les talents de demain, à l’exemple de la championne de Maurice de marteau Juliane Claire, qui a réalisé les minima des prochains championnats d’Afrique et qui tout récemment a battu son record personnel. Il coache également le jeune Michael Juliane au javelot. Cet athlète de 17 ans, champion national de la catégorie cadets, est considéré par Fabio Ramsamy comme la relève au javelot. « Il a réalisé 55,33m avec un javelot junior, ce qui démontre son talent. Malheureusement, il vient d’un milieu difficile et ce n’est pas souvent qu’on le voit à l’entraînement, ce qui est compréhensible. J’aurais aimé que les autorités puissent trouver une solution afin d’aider ces jeunes talents. Pour Juliane, cela fait un an depuis qu’elle est sous ma supervision et elle a toujours lancé au-delà des 50m ce qui est encourageant. » S’agissant de la lanceuse de javelot Vanessa Colin, qui a repris pour sa part les entraînements après une grosse blessure, son entraîneur nous affirme qu’en 2022, « il faudra compter sur Vanessa, car elle est beaucoup plus forte que les années précédentes. »