Depuis l’aube de l’humanité, l’homme aura été confronté à une multitude de crises et de conflits, quelquefois d’une extrême violence. Mais à chaque fois pourtant, il aura réussi à se relever, plus fort, plus vaillant. Prêt à affronter les prochaines périodes de troubles. Au final, il en sera sorti toujours victorieux, quand bien même nombre de vies auront été emportées. Une histoire dont cependant curieusement l’homme moderne semble aujourd’hui vouloir se soustraire, s’arracher. Il faut dire qu’il en aura accompli du chemin depuis. À croire que la traversée de l’ère préindustrielle lui aura fait oublier son riche passé, mais surtout, aura eu raison de sa volonté de se sortir seul de l’impasse.
Là est d’ailleurs tout le paradoxe de la situation. Si l’on prend toutes les crises d’origine anthropique auxquelles l’humanité aura été confrontée ces dernières décennies, combien d’entre elles auront suscité une réaction mondiale ? L’on pourrait bien sûr évoquer le cas des deux Guerres mondiales, mais le principe même d’une guerre est de voir s’affronter au moins deux camps, brisant de facto le principe d’unanimité. Au final, il n’y aura donc eu que le Covid pour mettre tout le monde d’accord. Non pas parce que l’ennemi était plus facile à abattre (ce serait même le contraire), mais parce que le virus n’aura épargné personne, et que dès lors, la menace s’était internationalisée.
A contrario, le danger de la crise climatique, lui, n’aura jamais généré pareil engouement. Et ce, probablement du fait que, bien qu’aussi invisible que le virus du Covid, ses conséquences n’auront pas été aussi immédiates, voire toujours attribuables aux activités humaines. Sans compter, bien entendu, les climatosceptiques, encore trop nombreux, mais surtout les enjeux économiques, bien plus importants dans ce cas précis que dans celui de la pandémie. Pourtant, les solutions, là aussi, ne manquent pas, dont la plus évidente serait d’arrêter d’émettre une seule particule de gaz à effet de serre dès aujourd’hui. Ce qui, l’on s’en doute, relèverait de la pure utopie.
Mais alors, quid des autres solutions ? La première, et la plus évidente, est celle de la concertation mondiale, avec des objectifs fixés. C’est d’ailleurs ce que l’on fait déjà à travers les COP. Mais là aussi, on connaît le résultat. À ce titre, rappelons que, depuis 2015, 195 pays signataires de l’accord de Paris sur le climat se sont engagés à réduire leur empreinte carbone, avec pour finalité de limiter le réchauffement planétaire à +1,5 °C d’ici 2100. Sauf que, dans les faits, les actions auront été jusqu’ici d’une extraordinaire timidité.
Concernant ces politiques climatiques, il faut savoir que celles-ci sont nombreuses, chaque pays y allant de son florilège d’intentions et de mesures, dépendant de ses moyens et, surtout, de ses ambitions. Au total, ces politiques du climat se chiffrent à 1 500, tous pays confondus, relève une récente étude. Avant d’ajouter que de ce nombre, à peine 4% auront permis de diminuer significativement les émissions de gaz à effet de serre. Oui, mais pourquoi ? Eh bien simplement parce qu’aucune mesure, pour peu qu’elle soit forte, ne peut être assortie d’un résultat tangible si elle n’est pas suivie par la majorité et, surtout, si elle est dissociée d’autres actions. En outre, en ce qui concerne les autres mesures envisagées, et dont la réponse climatique est plus modérée, les politiques mises en place ne sont pas toujours appropriées, certains pays étant plutôt enclins à faire du copier/coller. Sans tenir compte donc des réalités physiques et géologiques de leur région. Ce qui tient du non-sens.
Autant de facteurs, donc, qui prouvent une fois encore que la question de la crise climatique est loin de pouvoir être réglée. Non seulement celle-ci a tendance à se banaliser à travers le monde, mais le fait qu’elle suscite si peu d’actions concrètes et ne bénéficie d’aucun véritable plan de gestion global ajoute à la complexité de sa résolution, ajoutant chaque jour un peu plus d’incertitude sur l’avenir du vivant. Ne serait-il pas temps d’instaurer une instance internationale dédiée exclusivement à l’urgence climatique et assortie d’accords contraignants ? Même si cette hypothèse apparaît hors de portée, rien n’empêche d’y rêver, non ?
Michel Jourdan