Comme prévu, Emmanuel Macron et Theresa May ont signé hier un traité sur le contrôle de l’immigration à leur frontière. Cet accord vise à compléter les accords du Touquet de 2004.
Emmanuel Macron et Theresa May ont vanté jeudi « l’entente cordiale » entre la France et le Royaume-Uni lors d’un sommet franco-britannique à Sandhurst qui a débouché sur la signature d’un traité sur le contrôle de l’immigration et le prêt de la Tapisserie de Bayeux. Ce traité conclut par le président français et la Première ministre britannique est destiné à compléter les accords du Touquet de 2004, qui avaient instauré des contrôles d’immigration communs dans les ports des deux pays – sans réussir à juguler l’afflux de migrants à Calais.
Les deux dirigeants se sont retrouvés dans l’après-midi à l’Académie militaire royale de Sandhurst, un prestigieux établissement situé à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de Londres. Estimant que la situation n’était « pas satisfaisante à Calais », Emmanuel Macron a affirmé que ce nouveau « Traité de Sandhurst » permettrait « d’améliorer la gestion technique, opérationnelle de cette frontière commune ».
« Cela va nous permettre de changer en profondeur les choses, aussi pour mineurs vulnérables, (…) d’avoir une approche plus humaine, plus efficace, et de préserver la qualité de notre frontière commune », a-t-il déclaré, lors d’une conférence de presse avec Mme May. Pour ce premier sommet bilatéral depuis le vote du Brexit, Londres entendait renforcer les liens avec Paris, comme en témoignent les annonces faites par le gouvernement britannique.
Downing Street a ainsi fait part de son intention d’augmenter de 44,5 millions de livres (50,5 millions d’euros) sa contribution financière au contrôle de la frontière à Calais, suite à une demande de la France. « Nous renforcerons les infrastructures de sécurité avec davantage de vidéosurveillance, des clôtures et des technologies infrarouges à Calais et dans d’autres postes-frontières », a assuré Theresa May.
« Coup monté »
Sur la coopération en matière de défense, elle a annoncé l’envoi de trois hélicoptères de transport lourd Chinook au Sahel pour épauler les troupes françaises, ainsi que des personnels non combattants. La contribution a été qualifiée de « conséquente » par une source proche de la délégation française, l’armée française manquant de capacités en la matière.
La France a promis de son côté un appui au groupement tactique de l’OTAN dirigé par le Royaume-Uni en Estonie. Ce sommet « montre qu’une relation solide entre nos deux pays est dans l’intérêt du Royaume-Uni, de la France et de l’Europe », a insisté Theresa May, répétant : « Le Royaume- Uni se prépare à quitter l’UE, mais cela ne signifie pas qu’il quitte l’Europe. » Le Brexit « n’a pas occupé l’essentiel de nos discussions », a relevé le président français. « Quelles que soient les négociations à venir, jamais ces discussions ne doivent nous amener à revenir sur la qualité de la relation bilatérale. »
Ces annonces ont cependant été diversement accueillies par la classe politique et la presse britannique, des voix s’élevant pour critiquer les concessions de Downing Street. « La France demande 45 millions de livres supplémentaires pour stopper les migrants à Calais, et on nous prête la tapisserie de Bayeux comme lot de consolation », s’est indigné le tabloïd europhobe Daily Mail, qui dé- nonce un « coup monté ».
Ce prêt fait partie d’un programme d’échanges d’œuvres d’art présenté au cours du sommet. La tapisserie en question, chef-d’œuvre du XIe siècle, relate la défaite de l’Angleterre face à l’invasion du duc de Normandie Guillaume le Conquérant. Elle reviendra au Royaume-Uni en 2022.
« Je suis honorée par le prêt d’une pièce si précieuse de notre histoire commune qui souligne encore une fois la proximité de notre relation », a salué Theresa May, qui a en outre annoncé un « nouveau fond » pour les échanges scolaires. En France, le Traité de Sandhurst a été critiqué par le président des Hauts-de-France, la région de Calais, Xavier Bertrand. « Il n’y a rien de nouveau », a-t-il déploré sur BFM-TV. « Les Britanniques vont faire un chèque qui ne va permettre de payer qu’une partie de la facture. »
M. Macron devra aussi convaincre l’opinion : selon un sondage Elabe pour BFM-TV publié jeudi, 61% des Français ne lui font pas confiance pour réformer la politique migratoire.