Au début de la plaidoirie de Me David Perry (QC), représentant l’appelant, le Directeur des poursuites publiques, à 14h32 (heure de Maurice), ce dernier a dressé un tableau des questions essentielles entourant cet appel, notamment sur une éventuelle intention délictueuse (“mens rea”) ou encore sur un éventuel intérêt personnel concernant la réallocation des fonds pour payer la clinique MedPoint. Faisant état de la structure des dispositions de la loi sous l’article 13 de la Prevention of Corruption Act (PoCA), Me David Perry est revenu sur la définition de “public official” et de son « obligation de divulguer au corps para-étatique toute nature d’un intérêt quelconque ».
« A public body in which a public official is a member, director or employee proposes to deal with a company, partnership or other undertaking in which that public official or a relative or associate of his has a direct or indirect interest. That public official and/or his relative or associate hold more than 10 per cent of the total issued share capital or of the total equity participation in such company, partnership or other undertaking, that public official shall forthwith disclose, in writing, to that public body the nature of such interest. » De ce fait, Me Perry indique que sous cet article 13, « tout actionnaire a un intérêt direct ou indirect avec les négociations commerciales de la compagnie » et qu’il a « une obligation de divulguer tout possible conflit d’intérêts afin de préserver la confiance publique ».
Concernant son interprétation de l’article 13(2) de la PoCA sur l’intérêt personnel, Me Perry relate qu’un fonctionnaire (“public official”) est ainsi exclu ou doit s’abstenir de voter ou prendre part dans les procédures (“proceedings”) d’un corps para-étatique et que la loi est claire à ce sujet. « The reason for such an absolute prohibition is to preserve the integrity of the decision making process so that there may not be any perception of bias in the mind of a fair-minded and informed observer », a-t-il indiqué.
Ainsi, selon le juriste, Pravind Jugnauth « a outrepassé la ligne de démarcation qu’un fonctionnaire ne doit pas franchir », ajoutant qu’il aurait dû s’abstenir de prendre part dans quelconque décision pouvant impliquer un conflit d’intérêts. L’homme de loi devait ainsi rappeler l’importance d’appliquer rigoureusement les dispositions de la PoCA pour éviter toute perception de corruption, et des types de « négociations secrètes », aux yeux du public, comme l’avait observé le Select Committee mis sur pied. Me Perry avance de plus que Pravind Jugnauth « était au courant de tous les ingrédients du délit » et qu’il a « fait preuve d’imprudence en prenant part dans la prise de décision, ce qui équivaut à une participation ».
« Good faith »
Par ailleurs, Me Perry s’est appuyé sur les conclusions de la Cour intermédiaire quant à l’élément de « bonne foi », soit que la référence à la « bonne foi » avancée par le Premier ministre, du fait qu’il devait prendre une décision qu’il pensait dans l’intérêt public, sans avoir fait de favoritisme, n’est pas applicable dans ce cas. Me Perry a de plus donné raison aux conclusions de la Cour intermédiaire : « Clearly if you are taking part in proceedings where a relative has a public interest then it is a classic conflict of interest situation. Accused’s sister had direct personal interest in decisions regarding MedPoint, being holder of shares. » Par ailleurs, revenant sur les auditions de cadres de la fonction publique, Me Perry devait poursuivre en faisant état de cette « urgence sur une prise de décision pour débourser des fonds au sein du ministère de la Santé avant la fin de l’année financière car au cas contraire, l’État n’aurait pas obtenu les fonds envisagés et aurait dû passer par un vote à l’Assemblée nationale pour avaliser les fonds ».
Redistribution des fonds
Lord Philip Sales devait par la suite demander à Me Perry s’il y avait des preuves que Pravind Jugnauth était au courant du « critical nature of the timing ». Ce à quoi Me Perry a répondu par la négative. Les Law Lords devaient aussi demander des éclaircissements sur l’intérêt personnel de la sœur de Pravind Jugnauth dans la décision de débourser des fonds pour payer MedPoint. « A shareholder with 24% shares it is obvious that she has interest in the decision to pay MedPoint. » Les Law Lords ont fait état de l’obligation contractuelle du gouvernement de payer MedPoint. Me Perry a toutefois soutenu que Pravind Jugnauth « savait que sa sœur était actionnaire et aurait pu déléguer l’affaire au secrétaire financier ». Concernant l’élément de “corporate personality”, Me Perry a indiqué que « the Supreme Court was wrong to say that there was no direct personal interest which could arise where the decision has affected a company », avancant qu’il ne faut pas confondre avec le “property rights”.
Après la plaidoirie de l’avocate de Pravind Jugnauth, Me Clare Montgomery, QC, Me David Perry a eu droit à un temps de réponse, notamment sur l’interprétation de conflit d’intérêts. Ce dernier a avancé qu’il y a « clairement intérêt personnel » et que Pravind Jugnauth « a franchi la ligne » en ayant signé pour la redistribution des fonds pour payer MedPoint. Me Perry a alors invité les Law Lords à « accorder plus de crédit » aux conclusions de la Cour intermédiaire car elle est la « court of trial », et non la Cour suprême.
Me Perry a rappelé ainsi les conclusions de la Cour intermédiaire selon lesquelles Pravind Jugnauth « lied when he said he did not find minutes 5 and 5(a) ». Me David Perry devait ainsi demander aux Law Lords de « réinstaurer le “statement” » et « remettre l’affaire à la cour de justice pour que la sentence soit ordonnée ». La décision des Law Lords sera connue à une date ultérieure.