Nucléaire iranien: Pékin, Moscou et Téhéran appellent à la fin des sanctions

La Chine, l'Iran et la Russie ont appelé vendredi à lever les sanctions visant Téhéran, lors de discussions tripartites à Pékin dans un contexte de forte pression de Washington sur le nucléaire iranien.
Ces échanges à haut niveau se sont tenus dans la capitale chinoise en pleine effervescence diplomatique, les grandes puissances espérant raviver l'accord international de 2015.
Ils interviennent au moment où le président Donald Trump, qui avait retiré avec fracas les Etats-Unis de l'accord en 2018 lors de son premier mandat, se dit désormais ouvert au dialogue avec Téhéran.
Mais le dirigeant américain a renforcé en parallèle les sanctions contre l'Iran et agité la menace d'une action militaire. Sa main tendue est ainsi perçue avec grande méfiance par les dirigeants iraniens.
"La situation a de nouveau atteint un moment critique", a déclaré vendredi le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi, en rencontrant à Pékin les vice-ministres des Affaires étrangères russe Sergueï Riabkov et iranien Kazem Gharibabadi.
Et d'ajouter: "Les sanctions unilatérales ne feront qu'exacerber les conflits. Le dialogue et la négociation sont les seuls choix".
Le représentant iranien a, lui, accusé "certains pays" de créer "une crise inutile", saluant "une réunion très constructive et positive" avec les parties chinoise et russe.
"Nous avons procédé à un échange de vues approfondi sur les questions nucléaires et la levée des sanctions", avait indiqué plus tôt vendredi devant la presse Ma Zhaoxu, vice-ministre chinois des Affaires étrangères, aux côtés de ses homologues.

Les trois hommes ont "souligné la nécessité de mettre fin à toutes les sanctions unilatérales illégales", d'après M. Ma, reprenant des termes d'un communiqué conjoint Chine-Russie-Iran diffusé par Pékin.
- Coquille vide -
Les pays occidentaux soupçonnent depuis des décennies Téhéran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. L'Iran dément et affirme que son programme n'existe qu'à des fins civiles, notamment pour l'énergie.
En 2015, l'Iran avait conclu un accord avec les membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (Chine, Russie, Etats-Unis, France et Royaume-Uni) et l'Allemagne pour encadrer son programme nucléaire.
L'Iran respectait ses engagements, selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). L'accord offrait au pays un allègement des sanctions en échange d'une limitation de ses ambitions nucléaires.
Mais en 2018, Donald Trump a retiré son pays de l'accord de manière unilatérale. Les sanctions américaines ont été rétablies et l'économie iranienne en souffre.
En représailles, l'Iran est revenu sur ses engagements et a fait progresser son programme nucléaire.
Toutes les tentatives pour raviver l'accord de 2015, désormais une coquille vide, ont échoué ces dernières années. La validité du texte court jusqu'en octobre 2025 et certains pays n'excluent pas de réimposer des sanctions contre Téhéran après cette date.
"Il faut poursuivre les efforts diplomatiques pour régler ce problème", a déclaré vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, défendant "le droit" de l'Iran "au développement du nucléaire civil" et dénonçant des "sanctions illégitimes" visant Téhéran.
L'Iran a mené ces derniers mois plusieurs tours de discussions avec l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni autour de son programme nucléaire.
- "Perdant-perdant" -
Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump se dit prêt au dialogue avec l'Iran sur le nucléaire. Il a révélé avoir écrit une lettre en ce sens aux dirigeants iraniens, tout en avertissant de possibles actions militaires en cas de refus de Téhéran.
Dans un document publié vendredi par le ministère chinois des Affaires étrangères, Pékin a appelé à "s'abstenir de toute action susceptible d'aggraver la situation". "Les Etats-Unis devraient faire preuve de sincérité politique et reprendre les négociations dans les plus brefs délais", a-t-il souligné.
La "menace" de Donald Trump est "imprudente" et Téhéran est "capable de riposter", avait déclaré mercredi le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei.
Donald Trump poursuit une politique dite de "pression maximale" envers l'Iran, entamée durant son premier mandat (2017-2021).
Le gouvernement américain a annoncé jeudi de nouvelles sanctions contre le ministre iranien du Pétrole, Mohsen Paknejad, ainsi que plusieurs organisations et navires accusés d'aider le pays à contourner les sanctions internationales sur son brut.
Une mesure dénoncée vendredi par Téhéran, qui a fustigé "l'hypocrisie" de Washington.
Les Etats-Unis avaient déjà annoncé le mois dernier une série de mesures contre des personnes, sociétés et navires accusés de contourner les sanctions contre le pétrole iranien.
Dans ce contexte, l'ambassadeur d'Iran en Chine, Mohsen Bakhtiar, a estimé vendredi sur X que les discussions à Pékin avaient été un "succès total".
De tels échanges tripartites offriront "une voie claire pour contrer l'unilatéralisme perdant-perdant de l'Amérique", a-t-il indiqué.