Effondrement meurtrier en Serbie : des milliers de manifestants à Novi Sad

Des milliers de manifestants et des vitres brisées : Novi Sad, la deuxième ville de Serbie, qui pleure depuis vendredi 14 morts dans l'effondrement d'un auvent en béton de la gare, était mardi soir en colère contre le gouvernement accusé d'être responsable de cette tragédie.

"Je suis ici parce qu'une petite fille de six ans ne pourra jamais souffler les bougies de son 7e anniversaire (...). C'est pour ça que c'est important, la corruption tue", explique à l'AFP Maja Gledic, 50 ans.

"Cette fillette avait une soeur de neuf ans qui ne soufflera pas non plus les dix bougies", ajoute cette vendeuse originaire de la ville, "combien d'enfants devons-nous perdre encore pour que ce soit la fin ?".

Les deux fillettes se trouvaient sous l'auvent en béton lorsqu'il s'est effondré, provoquant la mort de 14 personnes et en blessant grièvement trois autres. Ces dernières âgées de 18 à 24 ans sont toujours hospitalisées.

La gare, un bâtiment brutaliste construit au début des années 1960, avait été en partie refaite ces dernières années.

Une enquête a rapidement été ouverte et 48 personnes ont déjà été entendues, selon le dernier communiqué des autorités serbes.

Le ministre de la Construction, Goran Vesic, a démissionné mardi matin - ce que demandaient les participants aux différents rassemblements.

Mais pour les manifestants réunis mardi à Novi Sad, cela n'est pas assez. "Vous êtes coupables !" a lancé d'un podium improvisé l'un d'eux après une minute de silence en hommage aux victimes. "Prison, prison !", "Arrêtez les criminels !", pouvait-on lire sur les pancartes.

- "Victimes du régime" -

"Ces quatorze morts et trois blessés sont, avant tout, victimes de ce régime et de tout ce qui s'est passé en Serbie au cours des douze dernières années. Ce malheur n’est pas venu de lui-même. C'est le produit de l’arrogance et du déshonneur, du pillage par cet Etat et par ce pouvoir. Leur façon criminelle de diriger l’Etat a conduit à la mort des gens, comme dans les années 1990", accuse Vladimir Gvozdenovic, un économiste de 60 ans.

Pour lui, comme pour ses compagnons de cortège, le SNS, le parti de droite nationaliste au pouvoir en Serbie, est coupable de négligences dans la surveillance des projets de construction d'infrastructures publiques qui se multiplient à travers le pays.

Un peu plus d'une heure après le début de la manifestation, quelques dizaines de manifestants s'en sont pris au bâtiment de la mairie, brisant des vitres, lançant des objets incendiaires et aspergeant de rouge les murs.

La police, présente dans le bâtiment, a répondu en faisant usage de gaz poivré, tandis que d'autres manifestants tentaient de s'interposer aux cris de "ne détruisez pas notre ville !", le tout dans une atmosphère très tendue.

Les échauffourées ont duré jusqu'à 22h30 environ.

Le président serbe, Aleksandar Vucic, a réagi dans une vidéo postée sur Instagram dans la soirée : "Mon message [aux manifestants violents]; c'est que la police est dans la retenue ce soir, pas seulement à cause d'eux, mais à cause du respect dont nous faisons preuve envers les victimes de cette terrible tragédie. Mais que les citoyens serbes ne pensent pas une seule seconde que la violence est autorisée. Tout ceux qui y ont pris part seront punis".

Il s'est également rendu à Novi Sad, où il a allumé une bougie devant la gare, puis s'est rendu au siège local de son parti, suivi par les caméras d'une télévision locale

Dans le cortège, avant les gaz et les heurts, Djordje Mitrovic, 30 ans, résumait les choses ainsi : "Nous, le peuple, sommes insatisfaits depuis longtemps. Nous ne vivons pas bien. Et maintenant nous ne nous sentons même plus en sécurité".