Facebook a affiché des compteurs largement dans le vert pour le deuxième trimestre 2019, à l’exception du bénéfice net, lourdement affecté par l’amende record des autorités américaines, mais avertit sur un risque de ralentissement côté revenus publicitaires pour la fin de l’année.
Le groupe a réalisé 16,7 milliards de dollars de chiffre d’affaires, supérieur aux attentes des analystes, et comptait fin juin 2,41 milliards d’utilisateurs mensuels actifs et près de 1,6 milliards d’utilisateurs actifs quotidiens (sur au moins une de ses plateformes, Facebook, Instagram, WhatsApp et Messenger), des chiffres conformes aux attentes des marchés.
« Notre deuxième trimestre a été bien mené, avec des optimisations (…) notamment sur l’app Facebook, qui nous ont aidé à combattre la tendance générale du ralentissement », a commenté David Wehner, directeur financier du groupe, lors d’une conférence pour les analystes financiers.
Il prévoit néanmoins un ralentissement de la croissance à taux de change constant, notamment au quatrième trimestre et en 2020, à cause de « vents contraires dans le ciblage publicitaire ».
Le modèle économique de Facebook repose sur les données personnelles de ses millions d’utilisateurs à travers le monde, qu’il collecte et compile de façon à proposer aux annonceurs de cibler les consommateurs de façon personnalisée et à grande échelle.
Trois « vents contraires », tous liés au mouvement global pour le respect de la vie privée, inquiètent M. Wehner.
La pression croissante des régulateurs (démontrée notamment par l’encadrement par l’Union européenne de la récolte des données en ligne) touche directement ce modèle économique.
L’évolution technique des systèmes d’exploitation des plateformes, plus centrés qu’avant sur la protection des données, affecte leur capacité à suivre et mesurer les audiences, essentielle pour le ciblage.
Le directeur financier cite enfin « nos propres changements de produits, repensés avec la confidentialité comme priorité ».
Au deuxième trimestre, Facebook a tiré 16,6 milliards de dollars de ses ventes publicitaires, en hausse de 28% sur un an (32% à taux de change constant), notamment grâce aux marchés américains et asiatiques, suivis par l’Europe, et malgré un prix moyen par publicité en baisse de 4% au deuxième trimestre.
– « Investissements significatifs » –
Conséquence attendue de l’amende record de 5 milliards de dollars infligée par les autorités fédérales américaines (FTC), Facebook a publié un bénéfice net en baisse de 50% au deuxième trimestre, à 2,6 milliards de dollars. Son bénéfice par action est du coup ressorti à 91 cents, très inférieur aux attentes.
Le réseau social avait déjà mis de côté 3 milliards au premier trimestre en prévision de cette amende et avait annoncé qu’il s’attendait à un montant total pouvant aller jusqu’à 5 milliards.
La FTC a qualifié d’historique cette sanction. Après un an d’enquête à la suite du scandale Cambridge Analytica qui a éclaté en mars 2018, elle a conclu que le réseau social avait « trompé » ses utilisateurs sur leur capacité à contrôler leurs données.
L’autorité a négocié un accord avec Facebook obligeant la plateforme à mettre en place un programme plus rigoureux de respect et de protection de la vie privée de ses utilisateurs, y compris sur ses filiales Instagram et WhatsApp.
Facebook devra établir des rapports trimestriels sur ce programme, qui engageront personnellement son patron, et subir des contrôles indépendants sur sa façon de traiter les données, qui sont à la base de son modèle économique.
Mark Zuckerberg a souligné pendant la conférence pour les analystes que ce programme allait nécessiter des « investissement significatifs » mais qu’il espérait en faire un « modèle » pour tout le secteur.
L’accord avec le régulateur a pourtant été fraîchement accueilli par de nombreux observateurs. la décision « vient bénir ce modèle économique (fondé sur la surveillance de masse et la manipulation) et ne résout pas le problème », a tweeté Rohit Chopra, membre démocrate de la FTC, qui a voté contre l’accord avec son autre collègue démocrate.
« En échange de modifications modestes au niveau de sa gouvernance interne, cette décision exonère Facebook de sa responsabilité », a estimé Neema Singh Gulian, avocate de l’Union américaine pour les libertés civiles, qui appelle de ses voeux une véritable « législation sur la vie privée, avec des moyens forts pour l’appliquer et le droit pour les consommateurs de poursuivre en justice les entreprises qui ne enfreignent la loi ».
Le titre de la société était en hausse de 0,7% dans les échanges électroniques après la clôture de la Bourse de New York.