Le Cambodge pourrait suspendre l’exportation des macaques vers les laboratoires. Cette décision fait suite à l’enquête menée par les autorités américaines sur le trafic mondial de macaques à longue queue vers les États-Unis à des fins de recherche et de tests de toxicité (empoisonnement).
L’approvisionnement en singes d’origine cambodgienne aux Etats-Unis, des sociétés américaines pourraient chercher à augmenter leurs importations en provenance de Maurice. C’est ce que craignent les ONG internationales telles que Action for Primates (qui œuvre pour la défense des primates non humains dans le monde), qui ont crié victoire trop vite après la décision de la compagnie Air France de renoncer au transport des primates destinés aux laboratoires. Le Dr Nedim Buyukmihci, Professeur émérite de la Médecine vétérinaire et représentant d’Action for Primates, questionne encore le besoin de recourir aux primates non humains dans la recherche, alors qu’il existe d’autres alternatives.
La World Monkey Day a été célébrée jeudi 14 décembre. À Maurice, l’exportation de macaques — l’espèce la plus prisée est le Macaca fascicularis, macaque originaire d’Asie du Sud-Est — pour la recherche scientifique est un business très profitable. Six entreprises se partagent un marché qui rapporte environ deux milliards de roupies chaque année. Elles sont Noveprim Group, Les Campêches Ltd, Biodia Co Ltd, Bioculture (Mauritius) Ltd, Bio Sphère et Prima Cyno Ltd. L’île Maurice fournit des macaques à plusieurs grandes entreprises de vivisection dans le monde entier, tels que Huntingdon Life Sciences, Covance, Charles Rivers Laboratories (CRL), le plus important fournisseur d’animaux de laboratoire.
Pour la compagnie Noveprim, bien qu’Air France ait décidé de mettre définitivement fin au transport des singes d’ici juin 2023, le transport des animaux pour la recherche ne prendra pas fin. « En 2021, l’ensemble des élevages mauriciens a exporté 14 640 macaques pour une rentrée de devises équivalente à 2 milliards de roupies. Aussi longtemps que des espèces animales, incluant le macaque, seront reconnues comme des éléments essentiels au progrès de la médecine par les institutions officielles compétentes, des solutions pour les transporter seront trouvées. Et cela pour le bien de la santé humaine », affirme Laurent Levallois, COO de Noveprim.
Tandis que les ONG internationales craignent qu’il y aura une demande encore plus grande de macaques mauriciens par le marché américain, il affirme que : « les élevages locaux sont la référence mondiale en termes de bien-être animal. Cet engagement ferme et continu permet l’accès des singes mauriciens dans les laboratoires médicaux les plus sérieux, dans les marchés excessivement contrôlés que sont l’Europe et l’Amérique du Nord. Ajouté à cela, il y a aujourd’hui un besoin accru du secteur de la recherche médicale pour le développement de traitements contre le cancer, le Covid, les problèmes cardiaques, le diabète, et d’autres maladies graves. Ce qui se passe au Cambodge ne change rien au deux faits ci-dessus », affirme-t-il.
Pourtant, en mars de cette année, le groupe de spécialistes des primates de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) avait fait passer le macaque à longue queue du statut d’espèce « vulnérable » à celui d’espèce « en danger ». À cela, le COO de Noveprim répond que, « sur le site de l’IUCN, le macaque à longue queue est menacé dans les pays du Sud-Est asiatique où est sa répartition naturelle. Maurice ne fait absolument pas partie de son habitat naturel cartographié par l’IUCN. Bien au contraire, de nombreux articles citent le singe à Maurice comme une espèce invasive nuisible aux espèces endémiques telles que le pigeon rose, et à l’agriculture. L’IUCN a classé le macaque dans la liste des 100 espèces animales et végétales les plus invasives au monde », dit-il. Bien qu’Action for Primates salue la probable suspension de l’exportation de macaques à longue queue du Cambodge, son appel est pour la fin définitive du commerce mondial de primates non humains. Pour l’ONG internationale, il existe d’autres alternatives à une époque où des méthodes modernes et de pointe existent, et qui permettent de sauver des vies. « Suite à l’enquête américaine Fish & Wildlife sur le trafic de macaques à longue queue au Cambodge, il y aura probablement une augmentation de la demande des laboratoires américains pour des singes d’autres pays. Maurice exporte déjà des singes capturés dans la nature vers les États-Unis, et Action for Primates craint que ce nombre n’augmente et que de nouvelles souffrances ne soient désormais infligées aux macaques de Maurice afin de répondre à cette demande accrue.
Compte tenu de l’avenir instable en termes d’approvisionnement fiable en singes, les chercheurs devraient en profiter pour trouver des moyens innovants, non animaux, humains et pertinents pour l’homme de trouver des solutions aux maladies et aux maladies, plutôt que de simplement rechercher une autre source. Nous sommes une espèce intelligente et capable. Si nous utilisons notre intelligence avec compassion, nous pouvons trouver des moyens de répondre aux questions que nous nous posons sans avoir à blesser et à tuer des primates non humains », déclare le Dr Nedim Buyukmihci, Emeritus Professor of Veterinary Medicine et représentant de Action for Primates.