Enseignement à distance: Nivellement par le bas à l’horizon ?

Depuis presque deux ans, la pandémie de Covid-19 perturbe le déroulement de la vie scolaire et rien n’est moins sûr quant à la durée d’une telle situation contraignant l’arrêt des classes en présentiel et des cours télévisés et en ligne. Faute d’une bonne préparation de tels cours à distance, toutefois, avec le retard déjà accumulé depuis 2020, la qualité et le niveau de l’éducation, estiment les spécialistes de l’éducation, seront sérieusement impactés.

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L’ancien ministre de l’Éducation, Dharam Gokhool, se dit profondément « triste et indigné » par la tournure des choses. « Le déficit en termes d’heure d’enseignement va s’accentuer et les élèves n’auront pas l’encadrement nécessaire pour la continuité pédagogique. »
Cette situation, ajoute-t-il, « affectera bien plus les enfants de milieux vulnérables, ce qui donnera lieu à davantage d’exclusion ». Il est d’avis que le programme initial ne pourra être complété. « Il y aura un nivellement de l’éducation vers le bas. Ce déficit pédagogique s’explique par le fait que le ministère n’a pas de “Preparedness Plan” alors qu’ils ont eu deux ans pour tout préparer. » Il souligne l’urgence que le ministère discute avec les stakeholders et trouver des solutions pour aider les élèves.

Mahend Gungapersad, ancien recteur et député, pointe du doigt « le manque de coordination entre les acteurs du secteur éducatif, et encore moins avec les “stakeholders”du monde éducatif ». Il est d’avis que « la plupart des élèves ne pourront rattraper le retard, et en particulier ceux qui ont des difficultés d’apprentissage ».
Il fait ressortir que des milliers de tablettes dorment dans les tiroirs des écoles. « On aurait pu les utiliser pour continuer les classes en ligne. On aurait pu assurer que tous les élèves ont une tablette mais le bon sens ne semble pas prévaloir. » Pour lui, si les écoles payantes parviennent à assurer la continuité de l’apprentissage même avec la fermeture des écoles, « il faut émuler leurs “good practices” ».

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Sooryadanand Meetooa, président de l’Éducation Officers’ Union (EOU) et enseignant à la SSS de Camp-de-Masque, soutient que tous les enseignants auraient souhaité pouvoir travailler tous les jours car les élèves perdent beaucoup. « Malheureusement, nous ne pouvons le faire. Il n’y a pas eu de préparation depuis le premier confinement. Est-ce que le ministère a investi comme il le fallait ? On aurait même pu préparer les enseignants et les élèves du primaire aux cours en ligne. » Les enseignants, ajoute-t-il, sont prêts à donner un coup de main. « Encore faut-il avoir des réunions pour voir comment améliorer les choses. »

Ce qui est sûr, dit Sooryadanand Meetooa, c’est qu’il faut améliorer l’enseignement à distance. « Le ministère doit convoquer tous les “stakeholders” pour combler les lacunes. Sans investissement, on ne pourra l’améliorer. C’est une planification qui doit tenir compte des personnes qui sont sur le terrain, des difficultés des parents, élèves, enseignants. Le ministère doit être à l’écoute de tous les partenaires de l’Éducation. »

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DHARAM GOKHOOL (EX-MINISTRE DE L’ÉDUCATION) : « Déficit pédagogique en l’absence d’un Preparedness Plan »

La situation sanitaire a contraint le pays à fermer à nouveau les établissements scolaires et à opter pour l’enseignement à distance : télévisé pour les plus jeunes et en ligne pour les plus grands. Votre sentiment face à cela ?

Une profonde tristesse et de l’indignation. J’étais triste parce qu’au niveau du ministère, malgré les promesses de continuité pédagogique, malgré l’assurance que les élèves ne feront pas face à des difficultés, le déficit en termes d’heures d’enseignement va s’accentuer et ces derniers n’auront pas l’encadrement nécessaire pour la continuité pédagogique. Cette situation affectera bien plus les enfants de milieux vulnérables, ce qui donnera lieu à davantage d’exclusion.

Ma deuxième réaction est l’indignation et je pense que c’est le même sentiment qui anime tous les stakeholders. Notamment en raison de l’incohérence entre les propos de la ministre, selon lesquels tout était sous contrôle le lundi 15 et son annonce de la fermeture des écoles le lendemain ! On a aussi pu voir une absence de concertation entre la ministre et l’Acting PM. On note, en outre, l’absence d’un Preparedness Plan.

Vous êtes néanmoins d’accord avec la fermeture des écoles ?
Évidemment, vu l’ampleur que le virus avait prise dans le milieu scolaire. La ministre l’a dit elle-même : depuis le 18 octobre, en l’espace de deux semaines, il y a eu près de 2 000 contaminations. Elle n’avait pas révélé ces chiffres avant. Quand la psychose s’est installée, elle n’a pu tenir la pression populaire et a révélé ces chiffres effrayants. La fermeture était donc inévitable.

Des craintes et des doutes ont été exprimés quant à l’achèvement du programme d’études à travers l’enseignement à distance, notamment pour ceux prenant part à des examens nationaux. Même si le programme était complété à temps, des élèves pourraient avoir décroché en cours de route. Comment éviter que le taux d’échec n’augmente ?

Dans l’absolu, le programme initial ne pourra pas être complété ! Il y a d’abord bien moins d’heures d’enseignement sans compter le deloading systématique. La situation est plus compliquée pour ceux prenant part aux examens SC/HSC. Quant au NCE, c’est gérable, on peut réaménager les examens. Mais pour le SC/HSC, il n’y a pas de deloading.
Pour éviter les échecs, il n’y a pas mille solutions. Le ministère pourrait baisser le niveau des examens nationaux et des évaluations. Mais cela ne sera pas sans conséquence sur la qualité de l’éducation. Et, pour le SC/HSC, est-ce qu’on pourrait avoir une fois de plus recours à une special consideration ? Dans l’absolu, il y aura un nivellement de l’éducation vers le bas.

Certains proposent qu’on recommence l’année scolaire en janvier et repousse les examens à plus tard avec l’option que ceux qui se sentent prêts composent au moment prévu initialement. Qu’en pensez-vous ?

Dans des situations exceptionnelles, on doit prendre des mesures exceptionnelles. Pour moi, on ne peut avoir un “one size fits all” ; on doit ajuster et s’adapter. On ne peut pénaliser ceux qui sont prêts ; laissons-les composer leurs examens. Quant à ceux qui demandent plus de temps, on peut établir un nouveau calendrier scolaire en janvier. Je pense que le ministère devrait se pencher sur cette proposition.

N’y a-t-il pas un gaspillage de ressources, des profs du primaire et de Grade 7-9 restant chez eux alors qu’ils auraient peut-être voulu animer des classes en ligne pour des cours plus supervisés comme dans les établissements payants. Actuellement, les élèves doivent se contenter d’un programme télévisé d’une durée d’à peine plus d’une heure pour toute une journée…

Dans les établissements privés payants, les profs accompagnent les élèves. C’est le système qu’on aurait dû adopter et non pas laisser ces jeunes livrés à eux-mêmes, sans l’encadrement d’un enseignant. Ce déficit pédagogique s’explique par le fait que le ministère n’a pas de Preparedness Plan alors qu’ils ont eu deux ans pour tout préparer.

Pensez-vous que ce serait faisable que chaque enseignant anime en ligne sa classe comme en temps normal ?
Tout cela dépend des facilités et de la connectivité. Dans des maisons, s’il y a deux ou trois enfants, il peut y avoir des difficultés. Mais on aurait dû étudier tous ces aspects. L’accompagnement par un enseignant est effectivement nécessaire !

Les écoles payantes le font…
Oui, elles s’y sont bien préparées et cela marche !

Certes, pas toutes les familles ne disposent d’une tablette ou d’une télé. Mais ce problème est-il si difficile à résoudre ? N’est-il pas possible pour le gouvernement d’assurer que chaque famille en difficulté a une tablette ?

Cela aurait aidé partiellement. Mais pour l’online learning, il y a d’autres facilités qu’il faut prévoir : connectivité, accompagnement, etc. L’élève peut être connecté et être allé ailleurs. Il faut absolument un monitoring. La ministre a souvent parlé d’un Quality Assurance Control. Mais aucun rapport n’a jusqu’à présent été publié pour identifier les faiblesses. Je pense que la ministre devrait publier ce rapport. Quelles sont les faiblesses de cet online learning et quelles ont été les solutions proposées par le ministère ? Si on continue avec le même système, cela n’aidera pas les élèves.

Quelle meilleure formule aurait-on pu trouver dans un contexte où l’on se voit contraint de fermer les écoles ?

Prenons l’exemple du Rwanda qui avait beaucoup plus de difficultés que Maurice. Mais, avec la collaboration des instances internationales, le pays a pu développer une stratégie de remote learning. À Maurice, on a déjà le rapport préparé par l’Union of Rectors and Deputy Rectors (Online Teaching and Managing the System with and for Students). Ils ont fait des propositions intéressantes, notamment comment passer du classroom teaching à l’online teaching. Il faut une stratégie et là-dessus, le ministère a failli ! Ils ont pris des mesures palliatives qui ne vont pas aider grandement. Cela montre un manque de leadership.

En conclusion…
Nous sommes en situation d’urgence et le ministère devrait discuter avec les stakeholders et trouver des solutions pour aider les élèves.

MAHEND GUNGAPERSAD (ANCIEN RECTEUR) : « Émuler les bonnes pratiques des écoles payantes »

La situation sanitaire a contraint le pays à fermer les établissements scolaires de nouveau et à opter pour l’enseignement à distance : télévisé pour les plus jeunes et en ligne pour les plus grands. Votre sentiment ?

Il fallait à tout prix fermer les écoles étant donné la gravité et la rapidité avec laquelle le variant Delta se propageait dans la communauté. Les autorités ont certes tergiversé avant de prendre la décision qu’il fallait. N’oublions pas la volte-face du gouvernement. Lundi 8 novembre, la ministre disait qu’il n’y aurait pas de fermeture, que ce n’était que des spéculations. Durant la séance parlementaire, on ne pipe mot sur une éventuelle fermeture des écoles.

Le Premier ministre par intérim, Steven Obeegadoo, va même plus loin pour affirmer que la situation sanitaire n’est pas chaotique et que les écoles ne vont pas fermer sur une requête de « mon ami Ehsan Juman », et presque simultanément, la ministre de l’Éducation annonce la fermeture des écoles à la télévision nationale. Il ne savait même pas que la ministre allait le prendre au dépourvu. Résultat : la pagaille. Un manque de planification pédagogique et de coordination entre les acteurs du secteur éducatif. Zéro consultation entre les membres du gouvernement, et encore moins avec les stakeholders du monde éducatif.

La ministre de l’Éducation aurait dû planifier cette fermeture avec l’aval des parties prenantes, préparer les enseignants à cette éventualité afin que ces derniers puissent planifier les classes en ligne. Mais non, encore une fois on prend une décision brusque.
Imaginez le stress des apprenants, des enseignants et des chefs d’établissement scolaire qui ont à gérer cette situation. La ministre n’a pas appris ses leçons en dépit des deux confinements. Il est clair qu’elle n’a pas un Emergency Preparedness Plan, chose qu’elle aurait dû avoir pour gérer cette situation tout à fait prévisible, car l’imprévisible est notre new normal maintenant. Elle n’arrive plus à gérer la crise et elle est dépassée par la situation.

Des craintes et des doutes ont été exprimés quant à l’achèvement du programme d’études à travers l’enseignement à distance, notamment pour ceux prenant part à des examens nationaux. Même si le programme était complété à temps, des élèves pourraient avoir décroché en cours de route. Comment éviter que le taux d’échec n’augmente ?
Même avec les classes en présentiel, on a accumulé d’énormes retards car les élèves n’ont pas eu l’occasion d’avoir un emploi du temps normal. Avec ce retard conséquent en amont et avec les classes en ligne pour les cinq semaines à venir, il est inévitable que la plupart des élèves ne pourront rattraper le retard, et en particulier ceux qui ont des difficultés d’apprentissage. Le fossé entre les enfants qui ont les moyens technologiques (tablettes, laptop, smartphone et Internet) et les aptitudes pédagogiques et ceux qui n’ont pas les outils ou les facilités pédagogiques et qui sont en difficulté scolaire va se creuser davantage. On n’a rien fait pour mettre tous les enfants sur un pied d’égalité.
Avant de se soucier des résultats, il faut poser la question suivante : qu’est-ce que nos enfants ont acquis en termes de connaissances ? Il n’y a pas trop de soucis à se faire concernant les résultats. Que ce soit pour le SC ou pour le HSC, on a miraculeusement réussi une nette progression de 15% pour la cuvée 2020. C’est du jamais-vu. Maintenant il faudra rééditer cet exploit ! Et j’ai peur que les résultats puissent nous surprendre. Mais en termes d’acquisitions qualitatives, j’ai l’impression que les élèves vont accumuler des retards conséquents.

Certains proposent qu’on recommence l’année scolaire en janvier et repousse les examens à plus tard avec l’option que ceux se sentant prêts composent au moment prévu initialement…
Moi je suis pour un retour à l’ancienne formule : une année scolaire de janvier à décembre avec tous les inconvénients que cela pourra poser. Il faudra tôt ou tard retourner vers ce calendrier. Avec les mauvaises expériences de cette année, surtout les conditions climatiques qui ont bouleversé les examens de SC et HSC, je ne veux pas que les enfants vivent le cauchemar d’être transportés aux centres d’examens dans des véhicules de la police. D’ailleurs, j’ai soulevé ce retour à l’ancien calendrier scolaire au Parlement mais la ministre a dit qu’elle ne compte pas le faire.

N’y a-t-il pas un gaspillage de ressources, des profs du primaire et de Grade 7-9 restant chez eux alors qu’ils auraient peut-être voulu animer des classes en ligne pour des cours plus supervisés comme dans les établissements payants. Actuellement, les élèves doivent se contenter d’un programme télévisé d’une durée d’à peine plus d’une heure pour toute une journée…
Beaucoup d’enseignants auraient aimé continuer à dispenser des cours à leurs élèves en ligne. Ils sont mal à l’aise avec les émissions télévisées. Ils m’ont confié qu’ils ont la solution au problème mais qu’on n’a pas pris leurs opinions en considération. Ils réalisent que peu importe le type de retard accusé par les élèves, cela les affectera sur les moyen ou long termes. C’est au ministère de savoir comment optimiser les ressources de ces enseignants dans ces moments difficiles, comment mettre leur savoir au service du bien-être de nos enfants.

Toutes les familles ne disposent certes pas d’une tablette ou d’une télé. Ce problème est-il si difficile à résoudre ? N’est-il pas possible pour le gouvernement d’assurer que chaque famille en difficulté a une tablette ?
Est-ce qu’on a fait le relevé pour savoir combien d’enfants auront un souci pour suivre leurs classes en ligne ? On a eu amplement le temps de faire des études mais les autorités ont été trop complaisantes. Je crois qu’ils n’ont pas à cœur le bien-être de ces enfants des milieux défavorisés. Qu’en est-il pour les enfants autrement capables ?
Concernant les tablettes, la plus grande aberration est que des milliers de tablettes dorment dans les tiroirs des écoles. Il y a des millions de roupies investies pour justement développer l’Early Digital Learning Programme. On aurait pu les utiliser pour continuer les classes en ligne. On aurait pu assurer que tous les élèves ont une tablette, mais le bon sens ne semble pas prévaloir. Je me souviens le lui avoir demandé au Parlement. Sa réponse a été : « This is not the policy of the Ministry. » Les tablettes restent inutilisées à l’école tandis que nos enfants souffrent de ce manque à la maison.

Quelle meilleure formule aurait-on pu trouver dans un contexte où l’on se voit contraint de fermer les écoles ?
Il faut toujours avoir des plans de rescousse parce que nous vivons des moments incertains. Le cybervirtuel est devenu la cyberréalité. Le learn from home et le learn by yourself sont devenus la new normal à la suite de la pandémie. Mais il faut toujours consulter les stakeholders, les enseignants, les chefs d’établissement et les enfants pour mieux cerner les problèmes, les attentes et aussi les possibilités. Se fier seulement à quelques conseillers ne fera pas l’affaire.
Je demande à la ministre de mettre son ego de côté pour le bien-être de l’enfant mauricien. Il faut demander aux professionnels de l’informatique d’aider l’école à sortir de cette crise. Il faudra émuler les bonnes pratiques des écoles privées payantes qui ont réussi à assurer la continuité de l’apprentissage même avec la fermeture des écoles.

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SOORYADANAND MEETOOA (EOU) : « Il faut améliorer l’enseignement à distance »

La situation sanitaire a contraint le pays à fermer les établissements scolaires de nouveau et d’opter pour l’enseignement à distance : télévisé pour les plus jeunes et en ligne pour les plus grands. Votre sentiment ?
Presque tous les syndicats du secondaire d’Etat, confessionnel et privé, sont unanimes quant à la fermeture des établissements. Depuis plus de deux semaines avant, on avait constaté que le problème était grave. Certains élèves devaient s’isoler pour 7-14 jours dépendant s’ils étaient vaccinés ou pas. L’environnement n’était pas approprié pour l’enseignement et l’apprentissage. Lorsqu’une classe était contaminée, d’autres sections avaient tendance à ne pas venir au collège aussi car il y avait une frayeur tant chez les élèves que chez les profs. Même si on est vacciné, on n’est pas protégé à 100%.
Avec le variant Delta, on a demandé la fermeture des établissements. On était dans une situation très délicate. Notre préoccupation majeure était de protéger la santé des jeunes et du personnel. On parlait de distanciation sociale alors que dans les bus, c’était catastrophique !

On a fait ce qu’il fallait faire côté santé. Sur le plan éducatif, toutefois, des craintes et des doutes ont été exprimés quant à l’achèvement du programme d’études à travers l’enseignement à distance. On évoque le risque de décrochage de certains élèves en cours de route. Comment éviter que le taux d’échec n’augmente ?
On doit être franc. Les collèges devaient reprendre le 14 juin. Mais tout a été chamboulé. Il y a eu deux semaines en ligne, ensuite des staggered classes. Donc, dès le départ, on a eu du retard. Ce n’est la faute à personne, la priorité était de protéger la santé des enfants. Maintenant, avec le Delta, c’est hors de notre contrôle. Tous les enseignants auraient souhaité pouvoir travailler tous les jours car les élèves perdent beaucoup. Malheureusement, nous ne pouvons le faire. Les plus grands pourront certainement se débrouiller avec les cours en ligne. Mais nous avons beaucoup de soucis.
L’un des désavantages des cours en ligne est qu’on ne peut contrôler le comportement des élèves. De plus, depuis quelques mois, j’ai dit au ministère qu’on doit investir dans les IT Tools and Training. Certains profs n’ont pas d’ordinateur portable. Quand on parle de work from home, concernant les fonctionnaires, la loi dit qu’il faut pourvoir les outils nécessaires. Il y a des profs, surtout les plus âgés, qui ne sont pas IT literate.

Presque deux ans se sont écoulés. N’aurait-on pas pu les former depuis tout ce temps ?
C’est justement une grosse lacune. Il n’y a pas eu de préparation depuis le premier confinement. Est-ce que le ministère a investi comme il le fallait ? On aurait même pu préparer les enseignants et les élèves du primaire aux cours en ligne. Et, on parle de World Class Education… Nous avions demandé en vain au PRB une grant de Rs 40 000 pour un Laptop pour le Online Teaching.

N’y a-t-il pas un gaspillage de ressources, des profs du primaire et de Grade 7-9 restant chez eux alors qu’ils auraient peut-être voulu animer des classes en ligne pour des cours plus supervisés comme dans les établissements payants. Actuellement, les élèves doivent se contenter d’un programme télévisé d’une durée d’à peine plus d’une heure pour toute une journée…
Pour l’heure, je ne pense pas qu’on soit prêt. Il faut une préparation en amont. Il faut former les enseignants. Quant aux enfants ne disposant pas de toutes les facilités nécessaires pour les cours en ligne, n’y aura-t-il pas injustice ?

Certes, toutes les familles ne disposent pas d’une tablette ou d’une télé. Mais ce problème est-il difficile à résoudre ? N’est-il pas possible pour le gouvernement d’assurer que chaque famille en difficulté a une tablette ?
C’est tout à fait possible. Il faut de la volonté. À une époque, on avait distribué des tablettes dans les collèges. Il faut investir. Nous, notre travail est d’enseigner. Encore faut-il encadrer les enseignants. Il y a des enseignants qui m’ont fait part qu’ils rencontrent des problèmes au niveau de leur connexion à Internet. Faute d’une connexion de qualité, ils ne peuvent bien enseigner sur Zoom. Il faut avoir une approche holistique pour combler toutes les lacunes.
On parle d’online teaching, mais si l’enseignant n’a pas de soutien du ministère au niveau des outils informatiques, cela sera difficile. Ce virus ne partira pas du jour au lendemain. Si les profs doivent travailler de chez eux, ils devraient pouvoir bénéficier de certaines facilités. Pour moi, le programme télévisé est OK pour l’instant. Mais il faut pouvoir l’améliorer.

Le programme télévisé dure à peine plus d’une heure pour une journée entière et les cours se déroulent relativement vite… Une heure de cours peut-elle remplacer une journée ?
C’est clair que ce n’est pas suffisant. Je pense qu’on peut augmenter ce temps d’apprentissage. Nous, enseignants, nous sommes disposés à donner un coup de main. Encore faut-il avoir des réunions pour voir comment améliorer les choses.

Certains proposent qu’on recommence l’année scolaire en janvier et repousse les examens à plus tard avec l’option que ceux se sentant prêts composent au moment prévu initialement…
Tous les profs sont d’accord avec cela. Les conditions météorologiques ne nous permettent pas de tenir des examens en mai-juin.

En conclusion…
Il importe définitivement d’améliorer l’enseignement à distance. Le ministère doit convoquer tous les stakeholders pour combler les lacunes. Sans investissement, on ne pourra l’améliorer. C’est une new normal qui sera appelée à durer, que le Covid-19 soit là ou pas. C’est une planification qui doit tenir compte des besoins des personnes qui sont sur le terrain, des difficultés des parents, élèves, enseignants. Le ministère doit être à l’écoute de tous les partenaires de l’Éducation.
Nous sommes là pour aider pour le bien de nos jeunes qui sont les citoyens de demain. Combien ont-ils abandonné l’école depuis le début de la pandémie de Covid, ne pouvant s’adapter à l’apprentissage à distance ?

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