Quelles sont les perspectives pour la nouvelle année, qui verra la tenue d’élections générales ? Et comment est susceptible de se porter la santé économique du pays ? Si Mubarak Sooltangos, observateur économique et consultant en stratégie, reconnaît que les difficultés liées au Covid-19 « sont derrière nous », il précise que cette amélioration s’applique davantage aux entreprises et qu’on ne peut en dire autant pour la macroéconomie. Il note que les diverses allocations sociales accordées par le gouvernement, couplées à la hausse du salaire minimum, risquent de peser lourd sur les finances nationales à très brèves échéances. « Le déficit du prochain budget risque d’être très difficile à maîtriser, parce qu’en dehors de l’impact de l’augmentation des salaires et les diverses allocations sociales, il y a un service de la dette nationale qui ira en augmentant exponentiellement. » Une des priorités économiques en 2024, dit-il, « sera de réduire notre déficit commercial, qui a atteint des sommets dangereux ».
L’économiste Takesh Luckho ne nie pas non plus que l’économie se porte mieux que les deux dernières années. « L’inflation en pourcentage est à la baisse, mais le prix du panier moyen de la ménagère est en hausse. » Toutefois, analyse-t-il, « le CPI a augmenté de 0,4 point de base, passant de 131,5 en octobre 2023 à 131,9 en novembre 2023, contre 105,9 avant le Covid-19 ». Ce qui l’induit à dire que le consommateur aura bien du mal à récupérer un pouvoir d’achat pré-Covid 19. « Le prix de l’essence reste artificiellement élevé a Rs 69 et la roupie a perdu plus de 30% vis-à-vis du dollar durant cette période. » Pour lui, si le citoyen lambda ne ressent pas l’effet de la reprise économique, la reprise est « plus illusoire que réelle ».
Faizal Jeeroburkhan, observateur politique et social, dit pour sa part avoir beaucoup de craintes pour la nouvelle année, car « les nombreuses crises qui nous ont menacés ces dernières années vont de mal en pis sans l’espoir d’un redressement possible ». Il interroge ainsi : « Peut-on compter sur les législatives de 2024 pour des développements positifs capables de nous extirper de cette asphyxie chronique ? ». En cette année électorale, il prévoit ainsi que « certains électeurs se laisseront influencer par les gains mirobolants » mis à leurs dispositions.
« C’est difficile dans un tel contexte d’avoir une Free and Fair Election. » Il prône en dépit de tout des « élections saines, transparentes et équitables, dans le respect des droits des citoyens » et estime que « notre seul salut semble une nouvelle classe de politiciens intègres, sincères et compétents, qui vont défendre et promouvoir le mauricianisme et l’unité nationale ».
MUBARAK SOOLTANGOS (Observateur économique) : « Le déficit du prochain budget risque d’être difficile à maîtriser »
En 2023, d’après le Business Pulse Survey, 98% des compagnies opéraient normalement. Comment s’annonce la santé économique du pays en 2024 ? Pouvons-nous espérer que les consommateurs retrouvent leur pouvoir d’achat d’avant le Covid-19 ?
D’après les indicateurs économiques, l’économie se porte bien et nous pouvons dire que les difficultés provoquées par le Covid-19 sont derrière nous. Mais si ce raisonnement s’applique aux entreprises, nous ne pouvons en dire autant pour la macroéconomie. Le gouvernement s’attache à améliorer le pouvoir d’achat de la population en multipliant allocations sociales et salaire minimum à une vitesse et une envergure telles qui laissent supposer d’autres motivations que de la simple philanthropie. Et cela risque de peser lourd sur les finances nationales à très brèves échéances.
2024 sera une année électorale. Comment anticipez-vous les répercussions des élections sur l’économie ?
Si nous effectuons un couplage de toutes les dernières et soudaines initiatives du gouvernement, nous voyons bien que nous sommes déjà en campagne électorale, où tous les moyens, en particulier la surenchère, sont bons. Nous ne pouvons pas, sur une base humanitaire, parler contre des augmentations de salaires et d’allocations lorsque nus connaissons l’envergure de l’érosion du pouvoir d’achat subie en raison de la dépréciation de la roupie et de l’inflation, mais il y a un coût à cela.
Toute dépense ne peut s’envisager que lorsque nous avons évalué si les moyens d’y faire face existent bien. Si on nous dit que cet exercice a bien été fait et qu’en dehors de ce que l’État lui-même déboursera, les pouvoirs publics sont satisfaits que l’ensemble du secteur privé – qui ne se constitue pas seulement de gros capitalistes, mais d’une multitude de PME qui arrivent tout juste à subsister – est en mesure de payer, nous sommes rassurés. Mais si tel n’a pas été le cas, beaucoup de PME risquent de sombrer, et le gouvernement lui-même devra, après coup, trouver les moyens de financement. Ceci ne pourra se faire que par un alourdissement de la fiscalité, ou autrement, par la création monétaire. Nous serions dans une situation où nous aurions mis la charrue devant les bœufs.
Le déficit du prochain budget risque d’être très difficile à maîtriser, parce qu’en dehors de l’impact de l’augmentation des salaires et les diverses allocations sociales, il y a un service de la dette nationale qui ira augmentant exponentiellement. L’État finance ses déficits budgétaires par l’endettement à travers l’émission des Treasury Bills, Certificates et Bonds avec des durées allant de 90 jours à 20 ans. Tous les nouveaux emprunts – particulièrement pour refinancer ceux qui arrivent à échéance – se font depuis déjà un an à un taux de 4%, contre 1% jusqu’à 2022. Nius ne sommes pas loin d’atteindre une moyenne de 2% pour l’ensemble de la dette domestique, et le coût additionnel de la dette devrait se situer autour de Rs 4.5 milliards, soit 0,8% du PIB. Lorsque nous y ajoutons le coût des augmentations de salaires et allocations diverses, nous réalsions que noius autons un trou à combler, qui ne représente pas moins de 1,3% du PIB, soit environ Rs 7,5 milliards.
Quelles devraient être les priorités pour une santé économique optimale en 2024 ?
L’objectif No 1 sera de réduire le déficit commercial, qui a atteint des sommets vertigineux. Cela passe nécessairement par une protection de notre industrie de substitution d’importations. Malheureusement, deux facteurs militent contre cet objectif. L’un est l’entêtement des économistes à rejeter les mesures quantitatives, comme l’imposition des droits de douane sur les produits importés, et ce, pour ne pas se mettre à dos l’Organisation mondiale du Commerce(OMC), qui milite pour le démantèlement des barrières douanières.
Ces économistes oublient que la toute-puissante Amérique, qui contrôle pratiquement l’OMC, a, sous l’administration Trump, introduit toute une série de taxes douanières pour se protéger des importations venant de Chine. Nos économistes s’estiment plus puritains que ceux qui contrôlent l’OMC. L’autre facteur est la hausse inconsidérée des taux d’intérêt, devenus aujourd’hui un boulet sans avoir atteint son objectif de juguler l’inflation et qui augmente le coût de l’endettement des producteurs et décourage l’investissement nouveau.
Un autre objectif prioritaire est une refonte de la mentalité même de l’Establishment gouvernemental pour accompagner les efforts du secteur privé dans ses projets d’expansion et de diversification en devenant Business-Friendly. Le secteur privé s’attend que ses objectifs soient compris et que l’État, à travers ses fonctionnaires, devienne partie prenante du développement, et non un frein par la somme de bureaucratie qu’il génère et son aversion pour le risque et l’innovation, qui demande un effort de réflexion positive et Running the Extra Mile.
Comment voyez-vous la situation du monde du travail en 2024, compte tenu du problème de pénurie de main-d’œuvre, et les entreprises peinant davantage à recruter aujourd’hui ?
Cela fait un temps que noius parlons de pénurie de main-d’œuvre sans faire beaucoup d’efforts raisonnés pour y remédier. Il n’y a d’autres solutions que d’importer de la main-d’œuvre. Des pays prospères, comme Dubaï, emploient presque dix fois plus d’expatriés que leur population autochtone. Il convient cependant de mettre en place les structures administratives, légales et de contrôle de l’immigration illégale pour nous protéger et, en même temps, éviter l’exploitation de cette main-d’œuvre importée. Il semblerait que l’effort de réflexion sérieuse nous fait cruellement défaut et que nous nous confortons dans l’attitude selon laquelle « il est urgent d’attendre ».
L’augmentation du salaire minimum compliquera-t-elle le recrutement ?
Elle pourrait désavantager certains employeurs qui ont bâti leur modèle d’opération sur une main-d’œuvre à bon marché et qui peinent à augmenter leur volume d’activité pour éponger cette augmentation de salaire. Tout entrepreneur qui voit loin et qui se lance dans une nouvelle activité devra s’efforcer de bâtir un modèle sur cette nouvelle donne tout en s’assurant qu’il pourra extraire de la productivité accrue de sa main-d’œuvre. Si un salaire minimum amené à un niveau somme toute raisonnable fait peur, nous ne pourrons jamais faire face à la concurrence.
TAKESH LUCKHO (Économiste) : « Si le citoyen ne ressent pas l’effet de la reprise, elle est illusoire »
En 2023, d’après le Business Pulse Survey, 98% des compagnies opéraient normalement. Comment s’annonce la santé économique du pays en 2024 ? Peut-on espérer que les consommateurs retrouvent leur pouvoir d’achat d’avant le Covid-19 ?
Les chiffres, dans leur globalité, montrent que les indicateurs macroéconomiques du pays fin 2023 sont au vert : la croissance économique est estimée à 7% par la Banque de Maurice, l’inflation globale en novembre 2023 est à 7,7% tandis que celle de l’inflation en glissement est à 4%. Le Mood des entreprises est au beau fixe – avec plus de 98% des compagnies qui disent opérer normalement –, tandis que les bénéfices dans certains secteurs sont mirobolants, dépassant ceux d’avant le Covid-19. La dette publique est passée de 81,2 % à 79,6% en septembre 2023. Nous ne pouvons pas nier que l’économie se porte mieux que ces deux dernières années.
Mais il faut aussi analyser les données en détail. L’inflation en pourcentage est à la baisse, mais le prix du panier moyen de la ménagère est en hausse. Dans la même publication de Statistics Mauritius de novembre 2023, il faut noter que l’indice des prix à la consommation (CPI) a augmenté de 0,4 point de base, passant de 131,5 en octobre 2023 à 131,9 en novembre 2023. Le même panier avant le Covid-19 avait un indice de 105,9. Malgré les diverses compensations salariales, le consommateur aura bien du mal à récupérer un pouvoir d’achat pré-Covid 19, car le prix de l’essence reste artificiellement élevé a Rs 69 et la roupie a perdu plus de 30% vis-à-vis du dollar durant cette période. Si le citoyen lambda ne ressent pas l’effet de la reprise économique dans son quotient, cette reprise est plus illusoire que réelle.
2024 sera une année électorale. Comment anticipez-vous les répercussions des élections sur l’économie ?
L’année 2024 sera très importante sur le plan électoral. La teneur des échanges entre adversaires, les différents rassemblements de partisans, la finalisation des projets d’envergure et les promesses de changement… La campagne électorale a en fait déjà débuté. Le gouvernement en place à tout le loisir d’utiliser l’appareil d’Etat pour séduire l’électorat. Le budget 2024/25, dernier budget de son mandat de cinq ans, va probablement faire la part belle à des mesures populaires, voire populistes, qui vont toucher les différents segments de la population.
La pension de vieillesse n’est toujours pas à Rs 13 500, comme promis en 2019, et les aînés attendent son nivellement avec le salaire minimum. Le secteur public aussi attend des ajustements après l’augmentation du salaire minimum. Mais je pense que les votants de 2024 ne vont pas s’attarder uniquement sur ces mesures populistes pour décider de leurs votes. La quantité d’informations en circulation sur les plateformes sociales va leur permettre d’analyser toutes les propositions des partis et alliances avant de prendre leur décision.
Quelles devraient être les priorités pour une santé économique optimale en 2024 ?
L’économie sera confrontée à un certain nombre de défis en 2024 – notamment l’incertitude liée au conflit géopolitique avec deux guerres, une inflation élevée qui ne se réduirait que progressivement, l’exode des cerveaux et les inégalités sociales.
Dans une année électorale, les priorités des autorités ne seront peut-être pas les options les plus parfaites. Pour une santé économique optimale en 2024, nous avons besoin d’une croissance inclusive et durable permettant de réduire les inégalités sociales tout en intégrant les contraintes environnementales. Il faut aussi tenter de rétablir une qualité de vie convenable afin de promouvoir le bien-être social dans le pays.
Comment voyez-vous la situation du monde du travail en 2024, compte tenu du problème de pénurie de main-d’œuvre et les entreprises peinant davantage à recruter aujourd’hui ?
La pénurie de la main-d’œuvre locale – principalement dans les secteurs de l’hôtellerie, de la grande distribution, des finances, etc. – ne va pas se résoudre automatiquement avec un revenu minimum garanti de Rs 18 500. Beaucoup d’ouvriers non qualifiés et beaucoup de professionnels ont décidé de partir pour l’étranger à cause de salaires plus intéressants et des opportunités qu’ils n’auront pas dans le pays. Si l’employé ne trouve pas des conditions de travail plus favorables et des opportunités de développement professionnel, il va être réticent à retourner sur le marché du travail à Maurice.
Dans le budget 2023/24, le gouvernement avait voté la levée de quotas concernant l’emploi des travailleurs étrangers; il n’y a plus de Ratio à respecter. Mais avoir un trop grand nombre d’expatriés dans le pays n’est pas sans conséquences. L’acceptation n’a pas été de tout repos et cela a parfois dégénéré en des troubles civils. Des exemples de tels troubles ont été notés dans des pays tels que la France ou l’Afrique du Sud.
L’augmentation du salaire minimum compliquera-t-elle le recrutement ?
Oui. Les entreprises les plus vulnérables à l’augmentation du salaire minimum sont plus particulièrement les plus petites, les toutes petites, comme les boutiques du coin, les petites usines, etc., et les moyennes entreprises. Elles peuvent être contraintes de licencier pour réduire leurs coûts ou tout simplement mettre la clé sous le paillasson. Les plus touchés seront les jeunes travailleurs sans expérience, les travailleurs peu qualifiés ou la gent féminine. Avec moins de recrutements, les employés restants doivent travailler plus dur pour compenser le manque de personnel. Ce qui peut entraîner une baisse de la qualité du travail, une augmentation d’erreurs menant à une baisse de ventes et une perte de réputation de l’entreprise.
Vos préoccupations et vos espoirs ?
Mes préoccupations sont qu’avec des mesures populistes en 2024 et des allocations sociales multiples, le risque d’aller vers un cycle vicieux de l’inflation sera plus élevé. Une augmentation de la masse monétaire génère de l’inflation, qui sera compensée par d’autres allocations. De ce fait, nus ne combattons pas les causes réelles de l’inflation.
Mes espoirs, c’est de voir une augmentation du pouvoir d’achat des travailleurs de la classe moyenne et ceux de la classe vulnérable, qui se sont sacrifiés pour remettre les entreprises et le pays sur la voie de la croissance économique.
FAIZAL JEEROBURKHAN (Observateur social) : « Les élections pour nous extirper de l’asphyxie chronique ? »
Vous démarrez l’année rempli d’espoir, léger ou préoccupé ?
J’aurais bien aimé démarrer l’année avec énormément de confiance et d’espérance. Malheureusement, la situation politique, économique, sociale et environnementale dans le pays n’y est guère favorable. Je ressens même beaucoup de craintes et d’appréhensions pour cette nouvelle année.
Les raisons sont multiples. D’abord, je constate avec beaucoup de peine que les nombreuses crises qui nous ont menacés ces dernières années vont de mal en pis, sans espoir d’un redressement possible. Nous sommes des spectateurs impuissants face à la consolidation de l’autocratie, de la mauvaise gouvernance, du népotisme, de la mafia de la drogue, de la fraude, de la corruption, du dépérissement des libertés et des droits humains, de la mainmise de l’Exécutif sur l’appareil de l’État, de la mauvaise administration financière, de l’accaparement des terres de l’État et des manipulations soutenues pour se débarrasser des Check and Balances et des contre-pouvoirs comme le DPP.
Pour nous réconforter, il y a quand même quelques lueurs d’espoir émanant de secteurs comme le tourisme et le secteur financier, mais on est vite confronté à la spirale du changement climatique, au vieillissement de la population, à la fuite des cerveaux… Pouvons-nous compter sur les élections législatives de 2024 pour des développements positifs capables de nous extirper de cette asphyxie chronique ?
Quelles sont à vos yeux les priorités du pays pour 2024 ?
Les priorités pour 2024 sont multiples. En premier lieu, il faut garantir le rétablissement du pouvoir d’achat des familles au bas de l’échelle sociale. Il est primordial de relancer l’économie en investissant massivement dans des secteurs productifs, en assurant la sécurité alimentaire et en réduisant la dette publique et le déficit de la balance commerciale. Il faut impérativement s’atteler à la création de nouveaux pôles économiques générateurs de devises et d’emplois.
Une bonne gestion passe nécessairement par le renforcement de la démocratie, la méritocratie, la bonne gouvernance, la transparence, etc. Il faut assurer un fonctionnement efficace du Parlement et des institutions étatiques établi sous la Constitution, aussi bien que des corps para-étatiques et des compagnies d’Etat. Cette relance doit passer par une réduction de nos importations superflues et une incitation à l’épargne. Pour une société plus juste, nous devons réduire les inégalités, l’exploitation et l’exclusion, et assurer la sécurité des démunis et des vieilles personnes. Notre agenda doit aussi inclure la préservation de notre environnement et de nos ressources naturelles.
2024 verra la tenue des élections générales. Avez-vous des appréhensions quelconques à ce propos pour 2024 ?
Ce sera une année décisive pour l’avenir de la nation. Elle sera monopolisée par le déroulement des législatives. Toutes les énergies des dirigeants politiques de même que les prétendants politiciens se focaliseront sur le Vote Banking au détriment du développement socio-économique du pays. Les débats d’idées, de projets de société, de modèle économique etc. seront éclipsés par les attaques personnelles, les fausses promesses, les slogans creux, l’autoglorification ou la glorification des leaders, les bribes électoraux, le recours aux sociétés socioculturelles, les calculs communaux et castéistes, les langages blessants et orduriers, les trahisons, etc.
Les récentes hausses vertigineuses du salaire minimum, de la compensation salariale et d’autres allocations sociales laissent entrevoir une détérioration drastique de certains indicateurs macroéconomiques, déjà en berne, dans les mois qui suivent. Dans cette conjoncture, certains électeurs se laisseront influencer par les gains mirobolants mis à leur disposition. C’est difficile dans un tel contexte d’avoir de Free and Fair Election. Nous aurons finalement le gouvernement que nous méritons.
Comment souhaiteriez-vous que ces élections se déroulent ?
Je souhaite des élections saines, transparentes, équitables et représentatives dans le respect des droits des citoyens. L’Electioral Supervisory Commission (ESC) doit agir avec autorité et en toute indépendance pour assurer l’équité et l’impartialité. Les élections ne doivent pas être entachées de fraudes, de manipulations et d’autres formes d’irrégularités.
Vos attentes sur le plan éducatif ?
Le système éducatif n’a malheureusement pas grand-chose à offrir de mieux pour 2024, malgré les Rs 15 milliards de l’argent public qu’on y injecte annuellement. Moins d’un enfant sur trois qui entre au primaire parviendra au bout du cycle secondaire. Des milliers d’enfants termineront le Grade 6 sans maîtriser le Literacy and Numeracy. Des milliers de jeunes sont jetés sur le pavé sans certificat et sans aucune formation. La vice-Première ministre et ministre de l’Education est une des rares personnes à exprimer sa satisfaction publiquement. Au niveau du primaire et du secondaire, le curriculum est figé et dépassé, et ne répond plus à nos nouveaux besoins économiques, sociaux et environnementaux.
L’élitisme amplifie les inégalités sociales et le gaspillage de ressources humaines (les recalés). Le système est démesurément dominé par les examens basés sur les connaissances livresques et le bourrage de crâne; le 9-Year Schooling et l’Extended Programme introduits pour corriger ces faiblesses n’ont fait que les amplifier, avec les résultats effroyables que l’on connaît. Des enfants, avec des talents et des potentiels cachés, sont rejetés, dévalorisés et stigmatisés, finissant par croire qu’ils sont stupides et incapables. Les nouveaux programmes d’étude (Bright Up Programme et Technology Education Stream) lancés en catimini récemment, surtout pour le besoin de la campagne électorale, souffrent d’un déficit aigu de réflexion, de consultations, de préparation, d’organisation, d’infrastructures et d’enseignants, entre autres.
En conclusion ?
Pour être plus optimiste, je dirais qu’il ne faut pas reculer face à autant de défis. Notre seul salut semble une nouvelle classe de politiciens intègres, sincères et compétents qui travailleront pour la nation entière, surtout pour les démunis. Des politiciens qui combattront avec acharnement la corruption, le favoritisme, le népotisme, l’opacité, le communalisme et le castéisme. Et qui promouvront le mauricianisme et l’unité nationale. Hélas, ce ne sera certainement pas pour 2024 !