La série ne semble pas vouloir s’arrêter, donnant l’impression qu’elle perdurera. Les deux séances de prières organisées par la People’s Turf PLC avant le début de la saison semblent avoir eu un effet contraire. Au lieu d’être bénie, elle donne plutôt l’impression d’avoir été maudite à tel point que la poisse la suit comme son ombre, créant des tourments pour son Chief Executive Officer, Khulwant Kumar Ubheeram. Celui-ci ne sait plus comment faire comprendre à son employeur et magnat des paris, Jean Michel Lee Shim, qu’il ne peut lutter contre Dame Nature, bien qu’il ait compris que faire de l’argent est le nerf de la guerre par ces temps difficiles pour l’organisateur des courses.
Ainsi, hier dimanche, K.K. Ubheeram s’en est violemment pris au Chief Stipe, Riyaz Mohammad Khan, et à ses collègues, les accusant d’avoir influencé les jockeys et apprentis qui ne voulaient plus monter sur une piste qu’ils jugeaient dangereuse pour leur vie. Comme c’était le cas la veille samedi lorsque la HRD avait été contrainte d’abandonner 7 des dix courses au programme.
Le groupe Le Mauricien/Week-End a été sur le qui-vive dès samedi pour suivre les péripéties de cette double journée ratée, et le moins que l’on puisse dire est qu’au lieu de se montrer responsable et sérieuse dans son organisation, la PTP a adopté un comportement odieux, attirant des commentaires peu flatteurs. Cette réflexion postée sur la toile, résume tout : « Pas d’autre chose que de l’argent, for the people, by the people, c’est simplement de l’argent, pitaye, paisa. »
Peut-on dire que le masque de la PTP est tombé ? Sans aucun doute, d’autant plus que K.K. Ubheeram a maintes fois insisté sur le fait que les journées de samedi et dimanche devaient se poursuivre peu importe les circonstances, négligeant toute importance quant à la sécurité des jockeys, apprentis et chevaux.
«10 courses, qu’il pleuve ou non ! »
Incapable d’accepter les caprices de Dame Nature, K.K. Ubheeram a envoyé ce message à ses lieutenants après la 3e course samedi, soit vers 13h08 : « Les gars, il est hors de question que nous arrêtions les courses aujourd’hui. Nous devons absolument mener les 10 courses, qu’il pleuve ou non ! Nous attendrons que la pluie diminue, et nous continuerons. »
Pour lui, il était impératif de courir, peu importe les conditions météorologiques et l’état de la piste. Aussi malheureux que cela puisse paraître, il a été rejoint dans son entêtement par un ex-jockey, Derreck David, qui, au lieu de le raisonner, en a rajouté une couche : « Si les rails sont trop humides, tous les jockeys acceptent de courir en quatrième épaisseur comme nous l’avons fait plusieurs fois au Champ de Mars dans le passé. »
Incroyable ! La priorité des organisateurs de courses qui se respectent est la sécurité, point final ! Ils n’ont pas l’air d’avoir compris cet impératif… Alors ils n’ont plus le droit moral d’agir comme organisateurs de courses !
Samedi, K.K. Ubheeram s’est démené comme un beau diable dans les coulisses pour convaincre le Chief Stipe de poursuivre la journée, mais rien n’y fit, car entre-temps la pluie avait redoublé d’intensité et l’orage grondait, tandis que l’enceinte officielle de la PTP était submergée d’eau. Le paddock s’était transformé en piscine, et l’eau dévalait les escaliers comme dans les rapides.
Sans parler de la piste : celle en sable était devenue un bourbier, tandis que celle en gazon avait des flaques d’eau partout, surtout dans la ligne droite finale. Noyé dans son chagrin et perdu dans ses pensées, K.K. Ubheeram a dû se rendre à l’évidence, et c’est alors que la HRD a émis un bref communiqué.
« Toutes les courses restantes sont reportées à demain. Un nouveau programme sera communiqué bientôt. » Entre-temps, K.K. Ubheeram multipliait les appels téléphoniques. Nul besoin de préciser qui était à l’autre bout du fil. Prise de panique – car cette double journée était une question de vie ou de mort – la HRD, suivant les directives de la PTP, a annoncé la tenue de 12 épreuves pour hier. Un record à Maurice, mais le record n’a pu être établi ! La pluie a imposé sa puissance…
Imposer ses volontés!
Personne n’a jugé bon de dire à la PTP qu’il était impossible de faire courir 12 épreuves sur cette piste détrempée. Pas même un entraîneur ni un jockey. Au Champ-de-Mars aujourd’hui, les gens ont peur de parler. Même les commissaires des courses n’osent plus ouvrir la bouche ni tenir tête à la PTP.
Riyaz Mohammad Khan ne s’est-il pas prosterné devant le CEO de la PTP dimanche dernier pour lui faire comprendre qu’il ne pouvait maintenir la journée à cause de la pluie? Cela veut tout dire sur la capacité du PTP à tenter d’imposer ses volontés! Heureusement qu’il y a encore des gens qui ont une conscience que la vie humaine a davantage de valeur que l’argent…
Hier, K.K. Ubheeram et son équipe étaient sur le pied de guerre dès 6 h. Seul Jean Michel Lee Shim manquait à l’appel, car comme toujours, il pilote tout de loin. Oh pardon, Kamal Taposeea et Henri Leblanc brillaient également par leur absence.
L’équipe de la HRD était également sur le terrain, car il fallait inspecter la piste dès 7 h. Raj Ramdin et Nawaz Rawat faisaient partie des entraîneurs, qui avaient accompagné R.M. Khan et K. K Ubheeram.
Que pouvaient-ils dire, les pauvres ? Comment pouvaient-ils donner leur avis quand ils ne sont même pas capables de donner des instructions à leurs jockeys ? Avec plus de 75 millimètres de pluie samedi, on s’attendait que l’indice au pénétromètre soit de 3.5, voire 3.6, mais surprise, surprise, il n’indiquait que 3.1, d’où ce commentaire ironique lancé sur la toile par un internaute : « On pourrait croire qu’il a fait soleil à minuit. »
Les journalistes, animateurs et consultants de la PTP ont informé les turfistes que la piste était miraculeusement à 3. Mais la vérité, dit-on, finit toujours par triompher. Tout ce beau monde, qui avait délibérément ou naïvement induit les turfistes en erreur, devait effectivement être rattrapé par la vérité. Les jockeys allaient s’en charger. Ainsi, après la tenue de la première course, ils ont fait équipe pour descendre dans la salle des commissaires.
« Trop dangereux »
D’abord, il faut dire que cette course s’est déroulée sans ambulance, démontrant une fois de plus que l’aspect sécurité est secondaire pour la PTP. Quant à la course, après 600 mètres, les huit partants couraient éparpillés. Il y avait au moins 25 longueurs entre le leader et le dernier. Certains couraient à la corde, d’autres au milieu de la piste, et les plus prudents suivaient complètement Detached à l’extérieur. Pas question de courir comme d’habitude. La piste était gorgée d’eau, glissante, impraticable, et dangereuse.
Dès que la course a pris fin, Jameer Allyhosain, Rye Joorawon et leurs collègues se sont précipités dans la salle des commissaires pour leur dire qu’il n’était pas question de continuer. « C’est trop dangereux, et nous ne monterons pas. Nous craignons pour notre sécurité et celle des chevaux. »
Gêné, le Chief Stipe ne savait quoi dire, et après avoir parlé à ses collègues, il s’est dirigé vers le Jockeys’ Room pour leur dire : « Je comprends votre position. Je ne veux pas vous convaincre de monter ou de ne pas monter, et je ne laisserai personne vous mettre la pression. Ne laissez personne vous influencer. Chacun doit assumer sa propre responsabilité. Quelle que soit votre décision, je la respecterai… Si vous décidez de monter, nous continuerons, mais si vous ne voulez pas monter, nous arrêterons! »
Ayant eu vent de la nouvelle, K.K. Ubheeram s’est interposé de manière impolie : « Vous essayez de semer le doute dans leurs esprits. Nous sommes ici pour courir, et vous le savez. » S’en est suivie une violente altercation verbale impliquant non seulement le Chief Stipe, mais également son collègue S. Mahender qui n’a pas mâché ses mots à l’égard de K.K. Ubheeram.
Ce dernier leur a dit qu’il s’assurerait qu’ils soient renvoyés à l’image de l’ex-Chief Stipe, Deanthan Moodley. K.K. Ubheeram a alors été maîtrisé par ses amis pour être conduit hors du Jockeys’ Room. Sur ce, Riyaz Khan a ordonné aux quelques entraîneurs qui étaient sur place de quitter le Jockeys’ Room.
Après les bâches bleues, le rouleau compresseur
Entretemps, sur la piste, l’employé de la PTP, Gedeon Sampson, était affairé alors que le rouleau compresseur de la PTP a été aperçu faisant le tour du Champ-de-Mars. Pourquoi faire ? Personne ne le sait. On n’avait jamais vu un rouleau compresseur être utilisé pour évacuer l’eau de la piste. C’était effectivement une grande première ! Après les bâches bleues, voici le rouleau compresseur. Admettez qu’en matière d’entretien de la piste, la PTP a toujours beaucoup surpris.
Les entraîneurs Raj Ramdin et Vishal Ramanah étaient pris au piège et ne voulaient pas prendre position, de peur de provoquer la colère de leur maître et employeur. Shirish Narang et Vicky Ruhee, qui s’étaient prononcés en faveur de l’abandon de cette journée, auraient changé d’avis après avoir reçu des appels téléphoniques. Ils ont alors proposé de se donner une heure avant de prendre une décision finale, d’où cette longue attente que les téléspectateurs ont dû subir devant leur poste de télévision.
Les journalistes de service pour l’organisateur des courses savaient pertinemment qu’il était impossible de poursuivre cette journée, mais eux aussi, tout comme les entraîneurs, n’ont jamais osé dire ce qu’ils pensent vraiment. Il est devenu effectivement très difficile de travailler dans le giron des courses, surtout à la HRD, car les commissaires de courses n’ont plus cette latitude et cette indépendance que le Premier ministre, Pravind Jugnauth, et la Gambling Regulatory Authority leur avaient promises. Ils sont sous pression permanente de la PTP et doivent souvent s’y soumettre.
Il en est de même pour les entraîneurs, dont la plupart ne sont pas autorisés à donner des instructions à leurs jockeys, qui, eux, ne peuvent plus prendre d’initiatives. En résumé, ce que craignait le PM est devenu une réalité : l’industrie des courses est tombée entre les mains de la mafia. Tout ce qui faisait la beauté de ce sport des rois a disparu en l’espace d’un an, et à en juger par les commentaires sur les réseaux sociaux, il est clair que les Mauriciens ont compris qu’ils ont été bernés, pour ne pas dire menés en bateau sur la piste du Champ-de-Mers gorgée d’eau.
Sur la base de ce qui est public, la quasi-certitude est qu’à Petit Gamin, cela sera pire, car ils seront sur leurs terres et tout sous leur contrôle. Aux autorités et au gouvernement qui ont approuvé cette décision de délocalisation des courses sur une propriété privée d’assumer leurs responsabilités et de faire front au revers de la médaille. Les turfistes, à qui on avait promis monts et merveilles, et les autres mauriciens qui ont assisté à cette descente aux enfers des courses hippiques, sont aussi des citoyens qui marqueront leur petite croix le moment venu…