La randonnée a tourné au drame pour Zahiir Ruhomaun, 17 ans, dimanche dernier, à Alexandra Falls. Son corps a été repêché à Bel-Ombre, soit à presque cinq kilomètres du lieu de l’accident à Cascade 500 pieds, dans la réserve naturelle Frederica Lodge.
Le même jour, deux autres jeunes qui l’accompagnaient ont dû leur salut à un rocher auquel ils se sont agrippés, le temps que l’Helicopter Squadron organise leur évacuation. Alexandra Falls sont devenues un lieu très fréquenté par les Mauriciens, quo s’adonnent à des sorties en plein air.
Par ailleurs, la Special Mobile Force (SMF) et d’autres unités policières spécialisées ont mené une série d’opérations pour porter secours à des randonneurs piégés par les débordements. Au total, 34 personnes ont été secourues aux Gorges de la Rivière-Noire dont le député de l’opposition, Fabrice David du parti travailliste. En retournant sur leurs pas sous les grosses pluies, ils ont été incapables de regagner le parking.
Le-Mauricien a rencontré trois professionnels expérimentés en matière de randonnées. Fawsee Bharkuth, membre de la Community Disaster Response Team du Fire and Rescue Service de la Croix Rouge et d’International Surf. Cet habitant de Bambous a été sauveteur pour les activités de kitesurf aux derniers Jeux des îles de l’Océan Indien.
Daniel Thomson, 36 ans, habitant Beau-Bassin, est un passionné de la nature, qui a escaladé dès son jeune âge des sommets encore inaccessibles pour de nombreux Mauriciens. « We have continued our crossing of the Gorges by facing several obstacles. But we have succeeded. By braving the danger I put myself adapting the most frightening thing that I have crossed in the Gorges. I got stung by bees while being in a section where there were a huge cliff. » Et le troisième, C.V, un ex-membre de la Special Mobile Force, avec plus de 40 ans d’expérience. Il a participé à des compétitions à Édimbourg en 1994 et à diverses activités à Maurice.
Fawsee Bharkuth, le randonneur qui connaît tous les coins et recoins des montagnes à force de les escalader, peut passer sa journée à raconter la beauté des huit montagnes les plus pittoresques de Maurice. « Il y a plus de 27 ans, mes amis de la SMF et moi avons exploré les Gorges de la Rivière-Noire. Ce n’était pas facile du tout. Nous avions frôlé la mort car il y avait des éboulements, des rivières en crue. Il y a beaucoup d’endroits très dangereux à Maurice. Il ne faut jamais prendre de risque sans se faire accompagner. Ena boukou zeness inn pran ban gro risk. Pa krwar ki kan ou finn grimp montagn ek ou finn trap enn bout lakord ou fini vinn exper ou enn jack dan grimp montagn », conseille-t-il.
La météo reste un facteur extrêmement important dans toute sortie puisque la sécurité est en jeu. Les prévisions météorologiques ont un rôle crucial dès la planification d’une sortie. « Si malgré une bonne planification, vous êtes surpris par un orage en montagne, vous devez trouver un endroit approprié et sécurisé pour attendre la fin de l’orage avec votre partenaire de cordée », dira-t-il.
Fawsee Bharkuth préconise que les autorités doivent mettre en place un protocole pour éviter des drames. Les autorités doivent sévir et faire respecter les lois. L’ancien membre de la SMF a escaladé des montagnes en 1994 lors de sa participation dans un concours à Édimbourg. Là-bas, il faut un permis pour entreprendre une ascension.
« Dans certains pays d’Amérique du Sud, par exemple, il faut payer un droit pour entrer dans les parcs naturels. Ce droit sert à leur entretien. Je ne dis pas qu’il faut imposer une sorte de taxe aux randonneurs mais réclamer une somme minimale pour plus de contrôle et garder un Record des visiteurs avec noms, adresses et d’autres détails qui pourraient être utiles en cas de danger. Il faut, par exemple, placer à l’entrée de ces lieux un personnel formé pour vérifier les qualifications. Bizin aret toler bann dimoune ki pran enn vie per soulie e enn bout lakord al lo montagn. Il est grand temps de filtrer et limiter le nombre de personnes dans des endroits à risque comme Alexandra Falls. Actuellement, il n’est pas possible d’obliger un alpiniste ou même un amateur avec un minimum d’équipements. On a ainsi besoin d’un permis pour chasser », fait-il ressortir.
Le meneur d’une expédition, suggère C.V, doit aussi apporter comme au Canada une carte indiquant l’itinéraire qu’il compte emprunter. Daniel Thomson propose que tous les randonneurs soient accompagnés pour certaines ascensions. Il dénonce les guides marrons, qui emmènent les touristes et les Mauriciens au sommet des montagnes. « lIs ne connaissent pas le terrain. Il y a beaucoup de sommets que les gens escaladent dans le noir. C’était surtout le cas pendant le confinement. Comme les plages étaient interdites, les gens s’organisent pour faire des sorties entre amateurs, et souvent sur les montagnes ou dans les forêts », rappelle-t-il.
Daniel Thomson, qui est aussi directeur de Discovering Mauritius, préconise un cadre légal plus sévère. « C’est de l’anarchie actuellement et cette situation ne peut plus continuer », regrette-t-il. Il raconte que pas plus loin que la semaine dernière, il a sermonné une jeune fille de Baie-du-Cap qui s’était retrouvée en difficulté pendant une sortie à cascade Balfour, dans un lieu connu comme Bassin Serpent où un jeune de 14 ans, qui s’y était rendu en 2019 en compagnie de ses amis avait péri noyé. « J’ai été très dur envers elle. Je lui ai fait comprendre qu’en pareille situation, il faut être très prudent. Bef dan disab, sakenn guet so lizie. Heureusement qu’elle a compris et est rentrée chez elle », ajoute-t-il.
Daniel Thomson reconnaît qu’à Alexandra Falls, la communication n’est pas toujours facile et même les professionnels éprouvent de grosses difficultés. « J’ai moi-même été confronté à des difficultés un jour. Je n’avais pas pu communiquer avec mes proches, je n’avais pas voulu prendre de risque, il pleuvait beaucoup. J’ai attendu que le temps retourne à la normale », concède-t-il.
Fawsee Bharkuth demande aux autorités de revoir les prix des équipements pour les escalades et les randonnées, notamment les chaussures, les vêtements et les mousquetons. « Je souhaite que les autorités encouragent les enfants à faire des randonnées, à aller à la découverte de notre faune et notre flore, qu’il y ait des installations, des murs d’escalade dans la cour des collèges, des municipalités et des conseils de district », dira-t-il.