Patrimoine : Le théâtre de Port-Louis, en attendant les beaux jours

— Appel aux autorités sur les travaux de restauration

Il fut un temps où la voix des plus grands ténors du pays résonnait dans la belle bâtisse bicentenaire du théâtre de Port-Louis, alors premier centre d’opéra de l’île. Pièces de théâtre classiques, opérettes, spectacles de danse… la capitale des arts respirait encore.

- Publicité -

Après sa fermeture en 2008 pour des travaux de rénovation, le cœur de Port-Louis s’est arrêté de battre pour laisser place à un chantier… Un chantier qui devrait fermer dans deux ans, mais qui inquiète. Dans une correspondance envoyée par SOS Patrimoine en Péril « Save our Heritage » au National Heritage Fund, le président de l’association, Arrmaan Shamachurn lève le rideau sur certaines anomalies détectées sur la nouvelle bâtisse.

Des fissures ont
aussi été observées

Bien consciente des contraintes financières, l’ONG soutient que de telles rénovations devraient se faire correctement et surtout dans les règles de l’art de la restauration patrimoniale. « We have come across the hereby attached photos of the Municipal Theatre of Port Louis, which again calls to question the quality of renovation works being effected on our heritage assets », indique Arrmaan Shamachurn dans la lettre envoyée durant la semaine.

En effet, les images parlent d’elles-mêmes. Sur les façades extérieures du théâtre, peintes en blanc — qui, avouons-le, enlève tout le charme de cette bâtisse coloniale — des fissures. Des fissures ainsi que des taches de rouille sur les gonds des fenêtres sont clairement visibles. Inacceptable pour un bâtiment qui se dit être en rénovation. Arrmaan Shamachurn poursuit que ce point a été auparavant soulevé avec les autorités concernées, qui ont toujours su être réceptives en ce sens. « This issue has been one of the subjects of discussion we have had last year. Despite the fact that we welcome renovation projects and we are not aloof to financial constraints, we are of the view that quality of works should also be given due consideration, especially in regard to the Municipal Theatre of Port Louis. »

Ce dernier avance que ces photos lui rappellent les travaux de rénovation du collège Royal de Curepipe innové en 2001-02 « which has, at the end of the day, undermined its heritage value negatively and irreversibly. »

D’autant que le collège Royal de Curepipe, un des premiers collèges de Maurice, est classé comme patrimoine national sous la Schedule du National Heritage Fund Act 2003 (voir encadré). SOS Patrimoine en Péril lance ainsi un appel aux autorités concernées, don’t la municipalité de Port-Louis. « I will therefore be much grateful if your office may take up this matter with the City Council of Port Louis and if required call upon the contractor to effect remedial works along the basic norms of heritage conservation », conclut-il.

Éclairé à  l’huile de coco

Pour rappel, le théâtre de Port-Louis fête cette année ses 200 ans d’histoire. Comme le souligne un article du Mauricien publié cette année, « en 200 ans d’existence, il peut s’enorgueillir d’avoir vécu plusieurs vies, et surtout, d’avoir été bercé par des ballades lyriques et d’avoir pu accueillir en son antre opéra, opérette, vaudeville, mélodrame, comédie. » Pour célébrer cet anniversaire, l’historien et conteur Robert Furlong a tenu, en début d’année, un colloque destiné aux étudiants mauriciens à la municipalité de Port-Louis. Inauguré le 11 juin 1822 par le premier gouverneur britannique de l’île, Robert Farquhar, le théâtre de Port-Louis pouvait accueillir 510 personnes. Des personnes qui à chaque fois quittaient le théâtre avec un léger parfum d’huile de coco, car Robert Furlong le précise… le théâtre était éclairé à l’huile de coco, bien avant l’arrivée de l’électricité !

Et bien au-delà de l’amour de l’opéra, le théâtre de Port-Louis, berceau des Arts et de la culture, devient ainsi le symbole de « rapprochement entre les vainqueurs (les Anglais) et les vaincus (les Français) », souligne Robert Furlong, car c’est à Mahé de La Bourdonnais que revient l’idée de faire de l’île Maurice le théâtre du rayonnement de la culture française.

Les gonds des fenêtres déjà rouillés, à deux ans de la réouverture…

« La réconciliation entre les Anglais et les Français s’est faite grâce aux courses et au théâtre. Le théâtre de Port-Louis a été créé par l’architecte Pierre Poujade, à qui on doit ce fabuleux dôme qui fut décoré par un peintre belge, Henri Théodore Vandermeersch. Et le théâtre de Port-Louis a été inauguré le 11 juin 1822 par le gouverneur Farquhar. Un autre bijou du théâtre est ce fameux lustre-réverbère installé avant l’électricité, de style rococo datant de 1810. On appelle le théâtre de Port-Louis un théâtre à l’Italienne et qui se trouve être le deuxième théâtre dans l’hémisphère Sud », dit ce dernier. Bref, vivement le retour des beaux jours et, qui sait, du parfum de l’huile de coco pour une touche bien îlienne !

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -