MV Wakashio – Deux ans après : Les Mahébourgeois toujours dans le flou de la marée noire

Seule une poignée de villageois a été dédommagée par les Japonais Le secteur touristique peine à se relancer dans cette partie de l'île

Ce 25 juillet, cela fait deux ans depuis que le MV Wakashio s’est échoué sur les récifs de Pointe-d’Esny. La marée noire traumatisante, qui colle toujours encore sur la côte Sud-Est, interviendra 2 jours plus tard. Même si la mer et les plages ont été nettoyées et que les activités reprennent graduellement, les Mahébourgeois et des habitants des villages avoisinants se disent dans le flou par rapport à leur situation.

- Publicité -

D’une part, la compensation promise se fait toujours attendre et, de l’autre, il n’y a aucune communication des autorités sur la suite de l’affaire Wakashio. On sait que la Cour d’investigation instituée sur cette catastrophe écologique a bouclé son travail et que le capitaine du vraquier, mis en cause, a quitté le pays. Qui va répondre de cet acte, s’il y a une poursuite ?, se demandent les Mahébourgeois.

« Mank kominikasion ek difikilte fer Wakashio res vivan dan nou latet. » Cette phrase de Tony Apollon, de l’Association des plaisanciers, témoigne de l’état d’esprit des Mahébourgeois deux ans après la marée noire causée par le MV Wakashio. Il avance que même si les activités touristiques ont repris dans cette partie de l’île, les clients se posent de nombreuses questions sur la marée noire. « La première question que les touristes nous posent quand ils arrivent, c’est si l’eau n’est pas contaminée, s’il n’y a aucun danger pour se baigner. Nous les rassurons, mais si nous avions un rapport pour soutenir nos propos, cela aurait été mieux. C’est dommage que valeur du jour, il n’y a eu aucun rapport officiel certifiant de la qualité de l’eau dans le lagon du sud-est. Nous déplorons fortement cette absence d’information et de communication », avance-t-il.

Tony Apollon se dit également sceptique sur la position du gouvernement mauricien par rapport à ce désastre écologique. Il fait référence au fait que le capitaine du MV Wakashio ait été autorisé à rentrer chez lui, alors qu’il avait été mis en cause par la Cour d’investigation. « Si le gouvernement devait porter plainte demain, contre qui va-t-il le faire ? Pourra-t-on faire revenir le capitaine du Wakashio en cour pour répondre de ses actes ? D’ailleurs, c’est étonnant que deux ans après, aucune plaine n’ait été logée », se demande-t-il.

De même, ajoute-t-il, l’épave du vraquier a déjà été enlevée, une partie se trouvant au fond de l’eau et l’autre démantelée. « Comment va-t-on mener une enquête s’il n’y a pas de preuves ? Tout cela est très flou. On ne comprend pas ce que veut faire le gouvernement au fait. C’est pour cela que les Mahébourgeois sont en colère », poursuit-il.
Parlant des compensations à ceux qui ont été affectés, il indique que les plaisanciers devaient également être payés, au même titre que les pêcheurs, pour Loss of Business. Toutefois, c’est dans la presse qu’il a appris que tout a été gelé en raison d’un affidavit logé en Cour par l’assureur. « C’est dommage que nous devions nous fier aux médias pour avoir des informations qui nous concernent directement. En tant que stakeholders, nous aurions dû être en communication directe avec les autorités », s’interroge-t-il.

Il évoque également des craintes au niveau environnemental. Les récifs de Pointe-d’Esny, indique-t-il, ont été très endommagés, et les pêcheurs ne peuvent plus y trouver les appâts comme auparavant. « Les coraux ont été écrasés, il y a de gros morceaux qui se sont détachés. Il y a une accumulation de sable à certains endroits et, plus choquant, il y a encore de la ferraille, alors qu’on nous avait dit qu’on a tout enlevé. Nous allons filmer et montrer les preuves très bientôt, dès que le temps s’améliore », confie-t-il.
De plus, ajoute-t-il, on ne sait quelles pourraient être les répercussions sur le long terme. Il souhaite qu’un comité, réunissant tous les Stakeholders, incluant des scientifiques, soit mis sur pied pour faire la lumière sur toute cette affaire. « Au moins, on peut nous donner des réponses à donner aux touristes », suggère-t-il.

Chris Barlaine Vayavery, de l’Association des entrepreneurs de Grand-Port, se dit lui aussi dans le flou. Ce restaurateur n’a eu d’autres choix que de fermer le restaurant pour poursuivre ses activités à domicile. « Nous n’avions pas le choix. Nous sommes restés fermés pendant longtemps, avec le bail et les emprunts à payer. À la reprise, je constate que les touristes ne sont pas nombreux. Ici, ce n’est pas Grand-Baie ou Flic-en-Flac. Il n’y a pas eu le développement nécessaire pour booster le secteur »; regrette-t-il.

Comme Tony Apollon, il affirme avoir lui aussi appris dans la presse que tous les paiements par l’assureur du MV Wakashio ont été gelés en raison d’une action en cour en vue de limiter le montant des compensations. « J’ai essayé d’avoir une copie du contre-affidavit du gouvernement pour voir quelle est sa position, mais je n’ai pas pu. Notre association a aussi eu une rencontre avec le ministre Bobby Hurreeram. Nous lui avons demandé la mise sur pied d’un comité avec tous les stakeholders, incluant les Japonais et le gouvernement, mais on attend toujours », s’insurge-t-il.

Chris Barlaine Vayavery dit avoir également appris que la cellule de crise mise en place suivant la marée noire n’opère plus. « Une personne bien placée m’a dit que la cellule n’a plus sa raison d’être puisque tout est revenu à la normale. Pourtant, c’est loin d’être le cas pour nous », fait-il comprendre.

Ce dernier donne un coup de gueule également, se demandant comment certaines personnes dans des villages comme Deux-Frères ou Quatre-Sœurs ont eu des facilités pour l’élevage de crabes, alors que les plus affectées sont à Mahébourg et Rivière-des-Créoles en ajoutant que « je ne suis pas en train de dire que les autres ne méritent pas, mais il faut considérer tout le monde sur un même pied d’égalité. »

Pour l’heure, ajoute le restaurateur, il parvient à garder la tête hors de l’eau, car la DBM lui a accordé un délai, soit jusqu’à décembre, pour le remboursement de son emprunt. « Si d’ici décembre il n’y a rien, que vais-je faire ? Comment je vais m’en sortir ? » se demande-t-il.

Les Mahébourgeois souhaitent ainsi que le gouvernement leur donne un éclairage sur la suite de l’affaire Wakashio, car ils se disent plus que jamais dans le flou. De plus, disent-ils, les activités peinent à redémarrer et les séquelles sont encore très vives.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -