Libérée après presqu’un mois de détention : le retour en grâce de Marie Liliane Tonta, 86 ans

« Jamais je ne pardonnerai à mon fils pour ce qu’il m’a fait. Ziska mo lamor ! »

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Marie Liliane Tonta, 86 ans, est libre depuis mercredi, après presqu’un mois de détention, pour n’avoir pas respecté un ordre du juge en référé en date du 26 juillet 2019, lui interdisant de vendre un terrain de cinq arpents appartenant à la firme Omnicane Ltd, sis à La Cambuse, à son fils aîné, qui l’aurait manipulé dans cette affaire. La décision de lui octroyer la grâce présidentielle a été entérinée alors que le Président de la République, Prithviraj Roopun se trouvait à l’étranger. Le vice-président Eddy Boissézon a agréé à cette grâce qui a sonné comme un ouf de soulagement pour la famille Tonta qui s’était démenée comme un beau diable pour sortir leur doyenne de l’enfer de la prison de Beau-Bassin. Quand bien même elle confie vouloir « tourner la page et croquer de nouveau la vie à pleines dents », Marie Liliane Tonta souligne que cette détention lui a apporté « autant de souffrances que de leçons à tirer.  »

La soudaineté avec laquelle Marie Liliane Tonta a été jugée et condamnée à passer 3 mois entre quatre murs demeureront aussi indélébiles que les souvenirs des moments de détresse ressentie par sa famille en la voyant trembloter en prison. Alexandre, l’un des petits-enfants de l’octogénaire, se trouvait à La Réunion où il travaille, lorsqu’il a appris cette nouvelle qui a fait l’effet d’une bombe chez les Tonta. Il soutient que« j’en ai reçu des coups de massue à la tête, mais ce moment au j’ai appris que ma grand-mère avait été condamnée à trois mois de prison restera, je n’en doute pas, le pire moment de ma vie. Je n’ai pas hésité une seconde. J’ai pris l’avion pour lui apporter tout mon soutien. En retournant à La Réunion, quelques jours plus tard, j’avais la boule au ventre en voyant défiler les images d’elle assise comme une criminelle dans cette prison. Je suis soulagé maintenant ».

Chantal, l’une des filles de l’ex-détenue, avait les yeux embués de larmes et la mine défaite lorsque Week-End l’a rencontrée, le 10 juillet. Le contraste était saisissant, mercredi, après l’annonce que sa mère a obtenu la grâce présidentielle. C’est avec un large sourire qu’elle nous a annoncé la bonne nouvelle. « La justice a triomphé car il est notoire qu’elle n’avait rien à se reprocher dans cette nébuleuse affaire », dit-elle. Devant le seuil de sa maison, à Curepipe, Marie Liliane Tonta nous accueille aussi avec un large sourire qui peine, néanmoins, à dissimiler ses traits fatigués. « Avec quelques kilos en moins », dit-elle, avant de remercier tous ceux et celles qui se sont mobilisés pour qu’elle retrouve la liberté. Les témoignages de sympathie à son égard sur les réseaux sociaux avant et après sa libération en disent long sur les contours de cette affaire : « Je remercie Dieu, ma famille, les medias qui ont relayé mon histoire et Linion Moris. Sans vous, je ne serais peut-être plus de ce monde. »

« Le soutien indéfectible de certaines détenues »

Assise dans son canapé au confort douillet, Marie Liliane Tonta nous raconte les moments forts de sa détention. Angoisse, perte de sommeil, vertige, perte de poids, maux de tête, problèmes de tension et de cœur. Le récit est glaçant. « Allongée sur mon lit, les yeux grands ouverts, j’avais du mal à dormir et je cogitais sur tout. J’avais du mal à m’alimenter et je sais que ça faisait souffrir ma famille mais, à mon âge, c’est difficile de se montrer forte, même si on a la volonté. Un supplice qui me restera à travers la gorge jusqu’à ma mort », dit-elle. La prison signe fréquemment la rupture des liens sociaux et familiaux. L’isolement, la promiscuité et le bruit plongent les personnes détenues dans une atmosphère violente. Forcément, la famille Marie Liliane Tonta s’est faite un sang d’encre pour elle, mais la concernée soutient que « grâce au soutien indéfectible de certaines détenues, avec lesquelles je me suis liée d’amitié en papotant, je me suis sentie en sécurité, en dépit des scènes de bagarres et de disputes qui se sont offertes à mes yeux. Elles étaient avec moi jusqu’au bout. Lorsqu’elles ont appris que j’allais être libérée, elles m’ont serré fort dans leurs bras. Cette expérience, bien qu’accablante et étreignante, a été très enrichissante. »

À sa sortie de prison, Marie Liliane Tonta a été conduite par des policiers à Rose-Belle pour été consultée par un psychiatre. Elle soutient avoir confié au docteur qu’elle était impatiente de revoir sa famille, à l’exception de celui qui l’aurait manipulée jusqu’à la nausée pour arriver à ses fins et qui s’est muré dans un silence assourdissant après son arrestation. Des propos sans équivoque : « Mon fils a fait preuve d’une extrême malhonnêteté envers moi. Jamais je ne l’aurais cru ! J’ai été contrainte de passer un mois entre quatre murs, alors que j’avais de gros problèmes de santé. Jamais je ne lui pardonnerai pour ce qu’il m’a fait. Ziska mo lamor ! » L’écrivain et philosophe grec Esope disait que « lorsqu’on cherche par cupidité à avoir plus que l’on n’a, on perd même ce qu’on possède. » C’est perdre l’amour d’une mère, dans ce cas précis…

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