Les interviews de 2021 : questions et réponses choisies (partie 1)

Pour respecter la tradition établie, nous vous proposons de revivre l’année qui se termine à travers les questions et, surtout, les réponses de certains de nos interviewés. Ces réponses rappellent quelles ont été les préoccupations de Mauriciens et les sujets d’actualité de 2021.

3 janvier 2021
Vassen Kauppaymuthoo, ingénieur en environnement :
« La conscience environnementale des Mauriciens est encore très faible »

- Publicité -

— La conscience environnementale des Mauriciens n’est-elle pas plus forte que les lobbies?

— La conscience environnementale des Mauriciens est encore très faible. Quand on regarde les plages après le week-end, on se demande si on a une bonne conscience environnementale ou de bonnes équipes de nettoyage après. Une majorité de Mauriciens vit encore dans un monde où l’on jette les déchets de construction chez son voisin. On a assez utilisé la sensibilisation, il faut maintenant des méthodes plus répressives par rapport à l’environnement. Les lobbies sont puissants puisqu’ils financent les partis politiques. Tant qu’on n’aura pas de loi transparente sur le financement des partis politiques, les lobbies continueront à imposer leur loi aux gouvernements. Ce système a duré parce que, quelque part, le Mauricien est devenu, comme le politicien, un « rodeur boutte » qui cherche son avantage et choisit en fonction de ce que son vote pourrait lui rapporter personnellement. Cette situation provoque aussi la démotivation des jeunes — les non-rodeurs boutte — à s’engager en politique et à prendre la relève.

— Quelle est la solution que vous préconisez?

— Pour moi, tout passe par la remise en cause du système de financement des partis politiques. Il ne suffit pas de se contenter de la déclaration de candidats qui disent avoir dépensé Rs 250,000 pour l’ensemble d’une campagne électorale, alors que le moindre grand meeting avec défilé de voitures coûte plus d’un million! Il faut aussi un discours fédérateur allant dans le sens du mauricianisme, de la nation à construire, pas dans l’encouragement des divisions, des groupes et des lobbies.


10 janvier 2021
Ram Seegobin, porte-parole de Lalit :
« L’affaire Sawmynaden est un mauvais cinéma qui fait peur »

O Quelle est votre analyse de l’affaire — ou des affaires — Sawmynaden qui ressemblent à du mauvais cinéma ?

— C’est un mauvais cinéma qui fait peur. Au départ, on a parlé de contrats détournés, mais quand on a commencé à entrevoir des possibilités d’assassinat autour, cela devient inquiétant. La publication des comptes de campagnes connues sous le nom de Kistnen Papers, dont la paternité est réclamée par un autre agent du MSM, augmente les interrogations.

O Mais en fin de compte, est-ce que les “révélations” de ces comptes de campagne sont de vraies révélations ? Tout le monde — en premier lieu les politiques — sait que les vraies dépenses d’une campagne électorales sont des dizaines pour ne pas dire des centaines de fois supérieures à celles qui sont déclarées…

— Le rapport de la commission Sachs en 2002 disait déjà que tous les grands partis politiques avaient reconnu que la limite des dépenses autorisées par la loi, qui est de Rs
150 000 par candidat, était dépassée. La situation a perduré parce qu’il existe un loop hole dans la loi électorale, qu’aucun parti politique ne veut amender, qui dit que les candidats peuvent bénéficier des dons de leurs sympatisans sans aucun contrôle. C’est ce qui permet l’hypocrisie autour de cette question, ajouté au fait que la loi actuelle ne permet pas au Commissaire électoral et à l’Electoral Surpervisory Commission d’ouvrir des enquêtes sur les dépenses des campagnes électorales. Tant que la loi ne sera pas amendée, la situation ne changera pas.


24 janvier 2021 —
Le Dr Vasantrao Gajadhur, ex-DG de la Santé :
« Faire de la politique ? Je reponds ni oui, ni non »

—Vous avez acquis en quelques mois une popularité extraordinaire, surtout lors de vos interventions à la télévision. À tel point que certains ont dit que vous étiez devenu plus populaire que beaucoup, pour ne pas dire que tous les politiciens mauriciens. Est-ce que cette popularité pourrait vous inciter à vous lancer dans la politique active ?

— Le temps répondra à cette question. Pour le moment, je travaille sur la Covid et d’autres dossiers importants de la santé publique. Je partage mes connaissances et je donne un coup de main là où on me le demande, j’aide quand je le peux et cela me donne beaucoup de satisfaction.
— Vous n’avez pas répondu à la question : est-ce que, oui ou non, vous pourriez un jour faire de la politique ?

— Je ne réponds ni oui ni non à cette question, car je ne sais pas de quoi demain sera fait. Surtout avec la pandémie.


31 janvier 2021
La Contribution Sociale Généralisée
Eric Ng, économiste

— Je ne saurai terminer cette interview sans évoquer un de vos sujets favoris du moment : la Contribution sociale généralisée…

— Le ministre des Finances vient de déclarer sur une radio que la CSG rapportera Rs 4 à 5 milliards par an et qu’en 2023-24, pour payer Rs 13 500 à tous les retraités, il faudra trouver quelque Rs 13 milliards en plus. C’est-à-dire que pour payer une année de CSG — Rs 13 milliards —, il faudra trouver au moins trois années de ce que rapporte cette nouvelle pension. Comment va-t-il faire pour payer la deuxième année de CSG à Rs 13 milliards ? Vous comprenez maintenant pourquoi je dis que le ministre des Finances n’a pas de perspective et regarde la situation économique par le petit bout de la lorgnette. Vous comprenez pourquoi je dis qu’il n’est pas un ministre des Finances responsable puisqu’il imprime de la monnaie et augmente les dépenses publiques. Pourquoi est-ce que face à la situation dramatique de l’économie, le gouvernement ne crée pas un comité national avec l’opposition, le secteur privé, la société civile, les syndicats et les économistes pour trouver des solutions auxquelles le pays et tous ses habitants — qu’ils aient voté pour le gouvernement, l’opposition ou se soient abstenus — sont confrontés ?


7 février 2021
Dr Julien Quenette, président de la Société des professionnels en psychologie :
« Pour certaines personnes, aller voir un psychologue c’est aller voir un psychiatre, un médecin associé aux soins de troubles mentaux »

— Peut-on dire que les Mauriciens ont accepté les thérapies psychologiques et en parlent ouvertement ?

— Non. Ce n’est pas seulement à Maurice qu’il existe des tabous autour du fait d’aller voir un psychologue, de faire un suivi psychologique, un traitement et d’en parler ouvertement. À Maurice, il y a d’autres facteurs qui entrent en ligne de compte, dont des facteurs culturels. Pour certaines personnes, aller voir un psychologue c’est aller voir un psychiatre, un médecin associé aux soins de troubles mentaux. C’est reconnaître, admettre qu’on a des problèmes facilement assimilés à la folie. On ne fait pas la différence entre le psychologue et le psychiatre. Je pense qu’en général, on ne parle pas suffisamment et franchement de ce qu’est la psychologie, de ce que signifie un suivi, une thérapie.

— Parlons-en justement. Qu’est-ce la psychologie ?

— C’est à la base l’étude du fonctionnement humain. Et il y a différents courants ou approches psychologiques dans cette étude. C’est essentiellement un accompagnement, un soutien, une écoute. Aujourd’hui, avec les avancées au niveau des recherches scientifiques, on a beaucoup plus de moyens pour venir expliquer certains phénomènes dans le comportement humain. Comment est-ce que le cerveau fonctionne, par exemple, ce qui a permis de mettre au point des thérapies.

—Comment savoir si on a besoin d’une thérapie, d’un suivi psychologique ou pas ?

— Dans la plus grande des généralités, on peut dire que nous en avons tous besoin, dans la mesure où nous avons tous un vécu avec des choses qu’on arrive à prendre, à accepter et d’autres pas. Dès le premier jour de ma formation, on m’a appris que tous les êtres humains sont des névrosés, ce qui veut dire qu’on a tous au fond un problème gérable pour certains et pas pour d’autres. Quand ces névroses deviennent une entrave à la vie quotidienne, on parle alors de pathologie et il est utile d’aller voir un psychologue…


14 février 2021
Cassam Uteem, ex-président de la République :
« Je dis à Pravind Jugnauth : comportez-vous comme le PM
de tous les Mauriciens! »

—Que pensez-vous que le Premier ministre devrait dire aux Mauriciens?

— Qu’il a entendu ce que les Mauriciens lui disent depuis plusieurs semaines déjà. Qu’il admet qu’il y a eu des manquements de la part du gouvernement et qu’il donne les instructions pour que les institutions puissent fonctionner normalement, que les nominations politiques cesseront, comme les ingérences, que la police fera son travail sous la responsabilité du Commissaire de police, et non de M. Jangi. Je cite ce dernier comme exemple mais il y a, dans les corps para-étatiques, d’autres nominés incapables et incompétents qui doivent eux aussi lev paké allé pour que le pays puisse recommencer à fonctionner normalement. Je ne suis pas de ceux qui disent BLD au Premier ministre, mais de ceux qui lui disent : assumez vos responsabilités et souvenez-vous que vous êtes le PM de tous les Mauriciens, pas seulement des 37% qui ont voté pour vous : comportez-vous comme le PM de tous les Mauriciens!

— Tel que le Premier ministre fonctionne, vous pensez qu’il est capable d’écouter les doléances des Mauriciens, que vous êtes en train de lui transmettre, et de prendre des décisions pour changer de manière de faire?

— J’espère qu’il n’est pas capable de seulement dire kot monn foté. Le PM ne peut pas ne pas savoir quelle est la situation réelle dans le pays et quel est le taux de mécontentement de la population. S’il ne vient pas dire au peuple qu’il a entendu ses protestations et promet de rectifier le tir, il agira non seulement contre le pays, qui a plein de défis à relever, mais contre lui-même, et aura à en subir les conséquences.


28 février 2021
Nandkoomar Bodha, nouveau membre de l’opposition :
« Une tour de contrôle dirige le gouvernement « 

— Maurice fonctionne comme un système politique où c’est le Conseil des ministres qui prend les décisions concernant le pays. Vous êtes en train de dire que c’est une tour de contrôle qui prend les décisions que le Cabinet ratifie par la suite. Est-ce que cela signifie que des décisions du gouvernement sont prises par cette tour de contrôle dirigée par de non-élus?

— Je vous réponds : oui. Des non-élus font partie de la tour de contrôle qui pousse le gouvernement à prendre certaines décisions. Je vais vous donner des exemples précis. Nous, c’est-à-dire le Conseil des ministres, avons été informés que le Safe City System, au coût de Rs 19 milliards, allait être installé à Maurice. Nous avons été informés qu’il y avait des médicaments et du matériel médical qui allaient être achetés, sans nous dire qui étaient les vendeurs et les intermédiaires. On m’a juste dit, en tant que ministre des Affaires étrangères, où il fallait aller chercher le matériel qui avait été acheté, on l’apprendra après, pour plus d’un milliard!

— Qu’est-ce que vous appelez la tour de contrôle et qui sont ceux qui la contrôlent?

— Je ne peux pas vous répondre précisément.

O Est-ce que cette tour de contrôle est dirigée par le Premier ministre, son épouse, son beau-frère, les conseillers Arian, Singh et compagnie? Est-ce qu’il y a d’autres personnes qui contrôlent cette tour de contrôle?

— Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’il s’agit d’un système opaque qui place des gens dans un certain nombre d’institutions de l’État. On a ainsi placé quelqu’un à Air Mauritius qui a fait tous les fracas du monde au détriment de la compagnie et qui est super protégé. On a placé quelqu’un à Mauritius Telecom qui fait ce qu’il veut, y compris l’achat du Safe City System, sans avoir des comptes à rendre. Je n’ai pas besoin de parler de ce qui se passe à la MBC, dans la police et au port! Il existe un certain nombre d’institutions où des gens ont été placés pour exécuter les décisions de la tour de contrôle qu’on demande aux ministres de ratifier.

– Vous êtes en train de décrire un État au sommet de l’État! Est-ce que vous êtes en train de dire que les ministres se contentent de ratifier les décisions prises par la tour de contrôle?

— Sur le papier, c’est le Conseil des ministres et celui qui le préside qui décident, mais dans la pratique, on se rend bien compte que les recommandations sont faites ailleurs, avant. Par des conseillers qui contrôlent certains secteurs du gouvernement, sont super puissants et font ce qu’ils veulent. C’est ainsi qu’un conseiller qui a une compagnie de plongée s’est retrouvé sur le Wakashio avant tout le monde.

O Est-ce que cette tour de contrôle est l’autre nom de ce que la presse appelle “la kwizinn”?

— Moi, je préfère utiliser le terme tour de contrôle.


7 mars 2021
Sheila Bappoo, ex-ministre de la Femme :
« Les politiciennes sont plus préoccupées à plaire à leurs leaders qu’à défendre de vraies causes »

— Quel regard jetez-vous sur les politiciennes mauriciennes d’aujourd’hui ?

— Quand je les regarde et que je les écoute, je pense qu’elles n’ont, en général, ni la formation ni la conviction politiques nécessaires. Elles sont plus préoccupées à plaire à leurs leaders qu’à défendre de vraies causes. On dirait qu’elles ont reçu l’ordre de mentionner le nom et les qualités de leur leader à intervalles réguliers dans leurs discours — tout comme les hommes le font. On ne peut pas faire l’éloge du chef matin, midi et soir. Je prends par exemple la ministre de la Femme, qui se présente comme la guerrière du MSM, pour dire que les nouvelles politiciennes ne connaissent pas leur sujet. Au lieu de prendre les devants, de gérer les problèmes tombant sous la responsabilité de son ministère, elle attend que les ONG, les députés, l’Ombudsperson for Children ou des auditeurs des radios privées les évoquent pour qu’elle se réveille et agisse. Son travail semble être de remplir une salle par des femmes pour que le PM puisse faire un discours politique !

— Elle pourrait vous rétorquer que vous faisiez la même chose quand vous étiez ministre de la Femme…

— Oui, j’ai rempli des salles, mais pour que le PM d’alors parle des problèmes de la femme, de ce qui avait été fait et ce qui allait être fait dans ce domaine. Ces réunions étaient organisées pour parler des problèmes de la Mauricienne et des solutions, pas pour offrir une plate-forme politique au PM ou pour critiquer les marches citoyennes ! Je suis très déçue par ce qui se passe au ministère de la Femme, qui n’utilise pas les structures mises en place depuis des années pour aider la Mauricienne à se développer et s’épanouir. Des centres pour femmes ont été transformés en shelters pour enfants, mélangeant tous les âges, comme des dumping grounds. On n’utilise pas comme il le faut les structures mises en place et fonctionnant très bien juste parce que c’était une initiative du précédent gouvernement.


21 mars 2021
Ashley Itoo, 3e député du MSM au N°16 :
« Le MSM est un parti de jeunes »

— Vous êtes en train de dire que le gouvernement est un parti de jeunes alors que les oppositions sont des partis de vieux ?

— Je vous invite à faire les comparaisons nécessaires entre l’âge des leaders des partis de l’opposition et celui du parti gouvernemental. Nous avons au conseil des ministres quatre membres qui ont 40 ans ! Les vieux leaders des partis de l’opposition ont un problème de succession et certains l’organisent déjà en pensant à leurs enfants. Nous n’avons pas ce souci au MSM avec un leadership fort qui a donné sa chance à des jeunes à tous les niveaux du parti et du gouvernement. Le MSM a procédé en 2019 au renouvellement et au partage entre la jeunesse et l’expérience, ce qui n’a pas été le cas des partis de l’opposition et nous avons été choisis par la population…

O Par seulement 37% de l’électorat, permettez-moi de vous le rappeler !

— Mais c’est le système du first pass the post qui permet ce genre de résultat. C’est un système qui a été mis en place avant l’Indépendance pour répondre aux besoins de cette époque, il a fonctionné malgré les lacunes et a permis au pays de se développer. Mais le monde change et d’autres sensibilités, d’autres préoccupations sont nées, comme celles qui concernent l’écologie. Il faudra apporter des améliorations aux lois électorales pour que toutes les sensibilités politiques ou autres du pays soient représentées au Parlement.


28 mars 2021
Kadress Pillay, premier directeur du bureau de l’Audit :
« Les institutions de contrôle du gouvernement ne fonctionnent pas »

—Tous les ans, le rapport du bureau de l’Audit fait la une de la presse, suscite un débat de quelques semaines et puis tout est oublié jusqu’au prochain rapport, les conclusions du rapport n’étant ni respectées ni mises en pratiques.

— Selon les principes de bonne gouvernance, on ne peut pas concevoir un pays démocratique sans un audit pour contrôler ses dépenses. Tout comme une entreprise a besoin d’auditeurs pour veiller à la bonne utilisation de ses ressources. Mais le problème de la bonne gouvernance à Maurice ne concerne pas seulement le fait que le rapport de l’Audit n’est pas mis en pratique. D’autres institutions de contrôle ne fonctionnent pas, comme le Parlement, le PAC, le Speakership, entre autres.

—Pourquoi est-ce que ces institutions ne fonctionnent pas?

— Elles ne peuvent pas jouer pleinement leur rôle parce que nous avons une constitution figée au temps de sa rédaction, qui n’a pas été amendée en profondeur pour correspondre à l’évolution de la société mauricienne et du monde qui nous entoure. Cette constitution est d’autant plus bloquée et figée qu’aujourd’hui l’ethno politic, le money politics, l’importance des lobbies de toutes sortes défendant de multiples intérêts rendent quasiment impossible tout amendement en profondeur. Cette constitution a été écrite dans un contexte historique précis et pour répondre aux besoins de l’époque et de ceux du Premier ministre d’alors. Cette constitution, taillée pour SSR a, au fil des années, transformé le système en un prime ministerial dictatorship. Il faut voir quels sont les pouvoirs du PM qui se comporte, par ailleurs, comme un chef de parti. Et qui plus est, il utilise ses différents pouvoirs pour financer toutes sortes de projets dans sa circonscription, au détriment de toutes les autres circonscriptions et de tous les élus de la nation. C’est injuste et surtout profondément anti-démocratique! C’est encore un reflet du pourrissement du système que démontre le rapport du directeur de l’Audit.


11 avril 2021
Naraindranath Gopee, président de la FCSCOU :
« Le pays est ’embalao’ depuis que Pravind Jugnauth est devenu PM »

—Que pensez-vous de la proposition du leader de l’opposition de débattre d’une motion sur la situation sanitaire, proposition qui a été rejetée par le Speaker ?

— C’était une bonne initiative de demander au gouvernement d’organiser un débat national pour aider à trouver des solutions nationales pendant cette période de crise sanitaire et économique. Comme d’habitude, le gouvernement a rejeté avec arrogance cette demande. Pourtant, c’était une proposition positive de l’opposition pour aider le pays dans cette période extrêmement difficile. C’était l’occasion de mettre de côté nos divergences, de mettre tout le monde on board : employeurs, employés, secteur privé, ONG, forces vives pour un débat national sur un sujet qui concerne tous les Mauriciens. Mais le gouvernement a décidé autrement et continue sur la ligne qui nous a menés là où nous sommes aujourd’hui. Il a déclaré que nous étions Covid-safe, après avoir dit que nous étions Covid-free, alors que ce n’était pas le cas. La confusion qui s’est installée dans le pays est la preuve de cette mauvaise gestion. C’est en janvier, comme les Seychelles l’ont fait, qu’il fallait vacciner la population afin de pouvoir ouvrir les frontières en mai ou juin. On a commencé à vacciner avec retard et, vu le contexte international, on ne sait pas encore où nous allons avoir les vaccins nécessaires pour la deuxième dose. C’est un pays qui est géré dans l’à-peu-près dans le contexte dramatique que nous vivons.

— Vous êtes loin d’être tendre avec le gouvernement, c’est le moins que l’on puisse dire !

— Parce que, pour moi et pour de nombreux Mauriciens, le pays est embalao depuis que Pravind Jugnauth est devenu PM. Il ne lui aura pas fallu longtemps pour montrer son incompétence et sa volonté de placer ses protégés à des postes de responsabilité. Parfois, en ne respectant pas la loi. Exemple flagrant : on a nommé à la direction des Governement Information Services un non-fonctionnaire sous contrat. C’est lui qui drafte toutes les informations, dont celles du comité national Covid que la MBC diffuse tous les soirs. Voulez-vous un autre exemple de l’arrogance du gouvernement ? Des ministres qui ne portent pas de masques au Parlement et n’ont même pas une remarque du PM, alors que des citoyens sont verbalisés pour le même délit. Nous sommes aujourd’hui dans une impasse à cause des mauvaises décisions prises et le gouvernement essaye de faire croire que tout est parfait et qu’il maîtrise la situation ! Comment peut-il dire cela, alors que de mars à avril, nous sommes passés de 5 cas de Covid à plus de 550 au moment où nous parlons !


2 mai 2021
Me Dick Ng Sui Wa, président de l’ICTA :
« Ceux qui ne veulent pas comprendre ne comprendront jamais »

O L’une des principales critiques concerne la création de ce comité (de l’ICTA) qui sera responsable, disent les internautes, d’espionner a priori le contenu du courrier des internautes pour décider lesquels seront “harmful and illegal”, pour les censurer. Certains ont même parlé d’une tentative de création d’une police de la pensée.

— Votre question est elle-même harmful, puisque vous parlez d’espionnage. Il n’a jamais été question d’ouvrir, comme on l’a dit, une lettre postée avant que son destinataire ne la reçoive. Nous n’avons jamais parlé de private posts, mais de public posts, c’est-à-dire des posts qui auront été rendus publics par les internautes qui les auront rédigés. Quand vous envoyez une lettre à quelqu’un, quand vous lui envoyez un message, cela relève du domaine privé. Mais quand vous publiez cette même lettre dans les journaux ou sur un réseau social, c’est un document public. C’est à partir de cette publication publique que nous voulons intervenir. Nous n’avons jamais parlé de données personnelles et nous avons même mentionné dans notre proposition l’existence du Data Protection Act. Nous avons publié un deuxième communiqué pour bien souligner la différence: la proposition ne concerne pas les messages privés, mais ceux qui auront été rendus publics. Ce comité n’est pas créé pour espionner et censurer, mais pour protéger et sévir contre ceux qui ne respectent pas la loi. Tout cela est bien clair, mais ceux qui ne veulent pas comprendre ne comprendront jamais.


9 avril 2021
Dr Arvind Boolell, ex-ministre des Affaires étrangères :
« Maurice n’est pas et ne doit pas devenir a little India »

— Selon vous, est-ce que le deal secret sur Agalega est une sorte de contrepartie des aides et prêts — notamment pour le métro — que Maurice a récemment obtenus de l’Inde ?

— Tant que le gouvernement mauricien ne révélera pas les clauses de l’accord, je suis obligé de répondre oui à cette question. Par ailleurs, expliquez-moi comment nous pouvons, d’une part, nous battre pour notre intégrité territoriale dans le cas de Diego Garcia devant les instances internationales et, d’autre part, garder secret des Mauriciens le deal avec l’Inde sur Agalega ? J’aime et je respecte l’Inde, mais le dis fermement : Maurice n’est pas et ne doit pas devenir « a little India ». Je privilégie les liens historiques géographiques, culturels et religieux que nous avons avec l’Inde, mais nous ne sommes pas « a small State of India », mais un pays souverain, comme le dit notre Constitution. Devant les institutions internationales, l’Inde et Maurice ont chacun une voix égale. Nous ne pouvons pas devenir un instrument de la politique de l’actuel gouvernement indien.


16 mai 2021
— Judex Soulange, Chartered Marine Engineer :
« Le port est dirigé par des incompétents »

— Arrivons-en au fameux rapport que vous avez fait pour le compte de la MPA à travers la firme Mega Design.
— C’était un travail pour évaluer les « plants vessels assets » de la MPA. J’ai été approché par Mega Design parce que je suis non seulement un marine engineer, mais l’unique chartered du pays. Apres mon évaluation, je suis arrivé à la conclusion générale qu’il y a « poor maintenance and mismanagement at the MPA ».

—Vous dites aussi qu’il n’existe pas de Marine Section à la MPA qui pourtant, selon son président, « est le port le plus moderne de l’océan Indien ».
— Vous croyez qu’en emmenant une bourrique au Champ de Mars, il devient automatiquement un cheval de course ? On a remplacé un bon marine engineer officer par quelqu’un d’autre. Il faut bien faire la différence entre master mariner et degree master. Savez-vous que des Mauriciens hautement qualifiés travaillant dans des ports à l’étranger ont voulu revenir travailler à Maurice mais n’ont pas été recrutés par la MPA ?
— Vous voulez dire que le port est dirigé par des personnes non qualifiées, des incompétents ?
— Elles ne sont pas suffisamment qualifiées pour les postes qu’elles occupent.


23 mai 2021
Me Lovena Sowkhee, avocate :
« La CDU viole les droits des enfants mauriciens ! »

— Que faudrait-il faire pour changer cette situation qui donne le sentiment que l’État maltraite les enfants qu’il est censé protéger selon la loi ?

— Il faudrait que le gouvernement s’intéresse vraiment à la question. Il faudrait dès demain matin créer une task force indépendante — surtout pas composée des cadres du ministère ! — pour étudier le fonctionnement de la CDU, évaluer enfant par enfant tous ceux qui sont dans des shelters, retracer leurs parents et les écouter pour décider quels sont les enfants qui peuvent retourner dans leurs familles et les accompagner et trouver des solutions pour les autres. Il faut aussi revoir les installations et le fonctionnement des shelters, tester les aptitudes de ceux qui sont employés, dont ceux du ministère, afin qu’ils soient efficaces.

– Mais ce n’est pas ce que le ministère (de la Femme) est censé faire à travers la CDU ?

— C’est ce que le ministère NE FAIT PAS à travers la CDU, comme tous les cas dont nous avons parlé le démontrent. Ses officiers ont un comportement inacceptable pour des fonctionnaires payés pour protéger les droits des enfants. Il faut aussi revoir l’encadrement légal autour de ces questions, parce qu’à Maurice, les enfants n’ont pas droit au chapitre, ce sont des adultes qui parlent en leurs noms et il peut arriver, cela a été démontré, qu’ils ne disent pas toute la vérité en cour. Les décisions sont prises pour les enfants en cour sans qu’on questionne les enfants sur des décisions qui vont influencer leur vie immédiate et leur avenir.


30 mai 2021
Gérard Sanspeur, ex-principal conseiller du PM :
« La règle de ce gouvernement : être médiocre, écouter et applaudir ce que dit la kwizinn »

— Vous avez été vous-même membre de la kwizinn à une époque. Je ne vais pas vous demander si vous épluchiez les légumes ou faisiez cuire la sauce, mais est-ce que la situation n’était pas déjà comme aujourd’hui?

— Je le reconnais. Je pense même qu’à un certain moment, certains ont trouvé que je faisais de l’ombre au PM. Même lorsque j’étais là-bas, Pravind Jugnauth n’était pas entouré de lumières. Déjà, tout le monde applaudissait et disait que toutes les propositions et décisions étaient mari bonnes, même si elles étaient ridicules. On ne peut pas gérer un pays sans compétences juste avec des gens dont la principale « qualité » est la loyauté à Pravind et au MSM! La règle de ce gouvernement c’est qu’il faut être médiocre, écouter et applaudir ce que dit la kwizinn. Le gouvernement est privé de compétences parce que les professionnels, voyant que ce gouvernement prend ses instructions de la kwizinn, ne veulent pas perdre leur réputation en travaillant dans les institutions gouvernementales. Le plus grand crime de ce gouvernement, c’est de tuer à petit feu nos institutions.

— Est-ce que le gouvernement précédent était meilleur?

— Il y avait des problèmes, certes, mais il laissait travailler les gens et ne mettait pas son nez dans toutes les affaires. On pouvait, sous Navin Ramgoolam, citer au moins une dizaine de noms de personnes intelligentes et compétentes dans son entourage pour gérer le pays. Est-ce qu’on peut le faire aujourd’hui? J’ai travaillé sous Navin Ramgoolam, Paul Bérenger, Rama Sithanen et Vishnu Lutchmeenaraisoo. Ils n’intervenaient jamais directement au niveau des institutions: peut-être qu’ils le faisaient de façon détournée, indirecte. Mais ils n’ont jamais convoqué un conseil d’administration dans leur bureau pour leur donner des instructions !

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -