Israël/Gaza — Depuis la bande de Gaza : Une mère témoigne au cœur des atrocités de la guerre

« Je pleurais tout le temps. Maintenant, il n’y a plus aucune larme. Le silence s’est emparé de moi » « Mon message au peuple mauricien : continuez de prier et de supporter le peuple palestinien ! »

Il est important pour vous, lecteurs, de comprendre le contexte dans lequel Le-Mauricien a recueilli ce témoignage d’un territoire subissant la guerre. La guerre, à ce sujet, ne se tient pas uniquement dans la région de Gaza. Elle est également en ligne et dans les médias, à travers la surveillance des canaux de communication, d’Internet, et la manipulation des informations et des opinions – à travers la propagande.

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Cette guerre digitale, nous en avons assimilé la portée en tentant de contacter des gens vivant à Gaza. Les points permettant d’accéder à Internet sont de plus en plus rares et les communications internes et externes sont étroitement surveillées. Nous avons dû, à cet égard, contacter des professionnels d’organismes internationaux œuvrant sur le terrain, au péril de leur vie. Grâce à ces intermédiaires, nous avons pu faire parvenir une liste de questions et recevoir des témoignages de gens vivant à Gaza.

Pour préserver leur sécurité, Le Mauricien évite de publier de détails quant à leur identité, la région dans laquelle ils se trouvent, leur profession. Aucune information qui permettra de les retracer. Ci-dessous, le premier témoignage d’une mère de famille réfugiée, qui ne parvient pas à quitter Gaza. Âgée d’une trentaine d’années, elle y vit depuis sa naissance.
« Pour l’heure, je suis toujours en vie. Ma petite famille se porte également bien, malgré la situation chaotique que nous subissons. Avec mon époux et mes enfants, nous sommes à cinq et nous partageons tous une seule pièce, ayant été déplacés depuis le début de la guerre. Nous avons appris à gérer nos besoins : comment préserver l’eau, la nourriture, les médicaments, les produits hygiéniques. Toutefois, tout coûte très cher, car les produits sont de plus en plus rares et de mauvaise qualité.

Mes parents, mes tontons, mes tantes, mes cousines et mes nièces… tous logent dans des conditions misérables, entassés dans des tentes. Mes parents sont vieux et souffrent de maladies chroniques. Ma nièce est une enfant vivant avec un handicap. Ils sont tous désespérés en raison du quotidien difficile en temps de guerre.
Depuis le 7 octobre 2023, notre vie a basculé. Les choses changent jour après jour, mois après mois. Tout empire. J’ai perdu ma meilleure amie… Beaucoup de mes proches et d’autres camarades aussi. Nombre d’entre nous ont été capturés par l’armée israélienne et faits prisonniers. Ma maison a été partiellement détruite. L’appartement de ma famille et celui de ma sœur ont été totalement ravagés. Ils ont été déplacés de camp en camp, de refuge en refuge, plus de cinq fois. Mon époux et mes frères ont perdu leur emploi. Nos enfants ont perdu leurs écoles, leurs enseignants et leurs amis. Beaucoup ont été tués par l’armée israélienne et les bombardements.

Je suis chanceuse d’être engagée auprès d’une organisation internationale. Dès lors, je bénéficie de certains avantages, comme la sécurité – plus que les autres du moins. J’ai été évacuée de ma maison au quatrième jour de la guerre vers une école transformée en refuge. Puis, j’ai été déplacée vers une petite pièce d’un bâtiment lié à mon organisation. Nous survivons entre quatre murs depuis plus de cinq mois.

Malgré tout, nous ne sommes pas en sécurité. Ils bombardent les régions alentour tout le temps, en utilisant toutes sortes d’armes militaires, depuis les airs, la terre et la mer. Nous prions Dieu constamment de nous garder en sécurité et le remercions tous les matins d’être toujours en vie. D’autant qu’avec mon travail sur le terrain, je voyage à bord d’un véhicule spécial de mon organisation. Mais ce n’est pas sans risque. Trop de fois, ces véhicules ont été attaqués par les tanks de l’armée israélienne et des frappes aériennes. Il y a eu beaucoup de victimes, des employés de notre organisation. Je dois être forte pour pouvoir continuer à travailler normalement. Désormais, je suis l’unique gagne-pain de ma famille.

Ils souhaitent m’évacuer de Gaza vers l’Égypte à travers le seul accès entre nous et le monde extérieur. Ils veulent me secourir et sauver mes enfants. Cependant, je ne peux quitter Gaza car le voyage est beaucoup trop onéreux : plus de USD 10 000 par personne pour traverser les frontières de Rafah. Et nous sommes cinq dans ma famille. De plus, j’ai peur de perdre mon emploi une fois en Égypte. Je suis donc bloquée ici, à Gaza.
Au début de la guerre, je pleurais tout le temps comme les autres citoyens de Gaza, à cause de la destruction et des morts. Des milliers de personnes sont décédées de causes diverses : de la famine, de maladies, de l’abandon et des bombardements. Maintenant, il n’y a plus aucune larme. Le silence s’est emparé de moi. Des fois, j’ai des crises de panique. Je crie et deviens anxieuse pour un rien.

Nous souffrons également de syndromes post-traumatiques. Mes enfants font des cauchemars, ils ont peur du noir et tressaillent quand ils entendent des fois. Nous ne pouvons plus discuter comme avant. Nous devons être patients, réciter le Coran en silence, et prier Dieu. Personne ne se soucie de nous si ce n’est Dieu qui teste notre foi. Tout cela peut se terminer si nous passons ce difficile examen.

Nous, les Palestiniens, aimons la vie et la paix. En tant que musulmans, nous aimons tant les catholiques que les juifs, et nous sommes tolérants envers toutes les religions. Nous ne sommes pas des ennemies de ce monde. Mais nous n’avons pas la chance de vivre en paix à cause de l’occupation israélienne. Depuis 1948, mes grands-pères et grands-mères sont devenus des réfugiés à Gaza et y ont établi une nouvelle vie après y avoir été déplacés.
J’implore au monde de nous soutenir et d’être à nos côtés. Soyez nos yeux et notre voix afin de porter notre message de paix sur terre. Plaidez pour que cessent cette guerre et ce génocide. Nous condamnons les crimes commis. Soyez du bon côté, soyez du côté de l’humanité.
Au peuple et au gouvernement israélien, s’il vous plaît, stoppez ce génocide et laissez-nous vivre en paix ! Que nous mettions fin à ce cauchemar et recommencions une nouvelle vie, et vivons comme deux pays en paix l’un à côté de l’autre !
Mon message au peuple mauricien est que les Palestiniens méritent également de vivre, comme les autres populations de ce monde. S’il vous plaît, continuez de prier et de soutenir le peuple palestinien ! »

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