Ce mercredi 30 mars, ça fera neuf ans depuis que les inondations meurtrières qui avaient frappé Port-Louis et fait 11 victimes : Keshav Ramdharri, Sylvia et Jeffrey Wright, Amrish et Trishul Tewari, Vikesh Khoosye, Simon “Margéot” Henriette, Retnon Navin Sithanen, Rabindranath Bhobany, Vincent Lai et Christelle Moorghen. Neuf ans que « nous, parents et proches souffrons en permanence », expliquent Alan Wright, porte-parole des familles. Et il ajoute : « Aucun gouvernement, aucune institution, aucune autorité ne réalise que nous tous, ces parents et proches, avons mis nos vies en veilleuse. Zot inn pran nou lavi an otaz. »
Ce qu’attendent ces personnes « meurtries et brisées, depuis la disparition brutale des nôtres, c’est que soit l’Etat, soit le gouvernement en place, soit des institutions, soit les autorités prennent une initiative ! » Alan Wright rappelle que « la “judicial enquiry” a trouvé coupables cinq institutions, nommément SPDC (maintenant Landscope Mauritius), la météo, la RDA, la mairie de Port-Louis, et le ministère des Infrastructures publiques ». Et de poursuivre : « Selon les procédures légales, nous devons poursuivre ces institutions au civil, et tous les cinq en même temps, et non individuellement. Ce que nous avons fait. Nous avons logé une seule et même affaire. Cela remonte à 2015. Et depuis… nous sommes en attente ! »
M. Wright, qui a perdu son épouse Sylvia, et l’un de ses fils, Jeffrey, dans le drame concède que le Covid-19, ces deux dernières années, a énormément ralenti toutes les procédures. « Mais, hélas ! avant 2020, rien n’a été fait ! »
L’homme explique : « Nous nous rencontrons, régulièrement, avec les autres parents. Une chose qui revient, à chaque fois, c’est qu’il nous semble que nous avons été condamnés à souffrir en permanence ! Peu de Mauriciens réalisent que nous ne pouvons pas aller de l’avant, faire des projets importants… C’est comme si nous avions arrêté de vivre. Oui, autour de nous, le monde continue et les gens vivent. Mais nous ne pouvons faire le deuil des nôtres, parce que cette partie reste incomplète. Les institutions ont été trouvées coupables par la “judicial enquiry”. Pourquoi est-ce que des sanctions ne sont pas prises par les personnes qui occupaient les fonctions concernées, au moment du drame ? »
Cet état de choses, souligne encore A. Wright, est très éprouvant pour les proches des victimes. « Pour l’affaire que nous avons logée en cour, nous avons mis le chiffre de Rs 11 millions. Ça a été fait ainsi uniquement pour respecter la procédure. Mais ce n’est pas cet argent qui va nous rendre ceux que nous avons perdus à tout jamais. » Le porte-parole des familles des victimes fait aussi remonter que « depuis 2013, nous demandons, systématiquement, qu’il y ait une approche au cas par cas des familles éprouvées ».
Et poursuit-il : « Cela, parce que beaucoup sont très pauvres et que ceux qui ont péri dans les inondations meurtrières étaient ceux qui faisaient tourner la cuisine familiale. Au moins, une aide financière sur une base régulière aurait pu avoir été offerte à certaines des familles qui sont vraiment mal loties. »
Plusieurs familles ont également perdu certains de leurs membres. Ainsi, le père de Keshav Ramdharri n’est plus de même que la mère des frères Amrish et Trishul Teewari. « L’an prochain, cela fera dix ans que nous vivons cette rude épreuve. Combien de temps encore nous faudra-t-il vivre ainsi, dans l’incertitude et sans grand espoir que quelque gouvernement ou institution pense que cela vaut la peine que justice nous soit rendue ? » se demande A. Wright.