Porter la production sucrière à 350 000 tonnes dans les trois à cinq prochaines années. Tel est l’objectif fixé par le ministère de l’Agro-industrie, qui multiplie les rencontres avec les différentes parties prenantes de l’industrie cannière.
« Afin d’empêcher une mort lente du secteur, nous voulons mettre à contribution toutes les parties prenantes, du petit planteur aux usiniers, afin de corriger les déséquilibres et assurer la pérennité de la filière cannière et maintenir la rentabilité à long terme. Et ce, tout en répondant aux défis environnementaux, sociaux et économiques », déclare le ministre de tutelle, Arvin Boolell. Il souligne par ailleurs que plusieurs facteurs jouent un rôle crucial dans la détermination de la durabilité de l’industrie sucrière.
« Ces dix dernières années ont été marquées par une détérioration soutenue de divers indicateurs, tels que le modèle de production, la matrice des coûts, la disponibilité de la main-d’œuvre, la mobilité et les rendements en général. Dans le passé, lorsque l’industrie avait été soumise à des chocs à la fois exogènes et endogènes, le ministère de l’Agriculture avait toujours élaboré des stratégies pour maintenir le dynamisme qui anime l’industrie grâce à de nouvelles politiques et des soutiens monétaires, de manière à maintenir un équilibre pour toutes les parties prenantes », poursuit Arvin Boolell.
« Mais ces dix dernières années, nous avons assisté à une nette diminution des rendements et de la rentabilité, en particulier pour les petits producteurs. En une dizaine d’années, la production sucrière est passée de 425 000 tonnes en 2015 à 240 000 tonnes en 2024, ce qui a entraîné des effets multiplicateurs et des facteurs de causalité pour les planteurs de petite taille, l’abandon étant le mot d’ordre », s’insurge-t-il.
À l’initiative du ministère de l’Agro-industrie, la Mauritius Cane Industry Authority (MCIA) a tenu des consultations avec des représentants du secteur, dont ceux du Syndicat des Sucres, afin de solliciter la collaboration de ces derniers pour aider ceux ayant abandonné leurs champs à relancer la production cannière. « Il est heureux que les gros planteurs et les usiniers, qui ont compris la gravité de la situation, jouent le jeu en venant en aide aux petits planteurs », indique Arvin Boolell.
Dans le cadre de la stratégie gouvernementale, les autorités sont donc déterminées à augmenter la production à une moyenne à long terme de 350 000 tonnes au cours des trois à cinq prochaines années, de manière progressive de 20% annuellement à partir de la récolte 2025/26. Des subventions ont ainsi été identifiées sous forme de soutien financier direct pour la plantation, l’équipement ou la mise à niveau technologique.
De même, des allégements fiscaux sont prévus sur les investissements liés à la production de sucre avec un plafond pour encourager les petits producteurs, d’après lui ; en plus de prêts à faible taux d’intérêt pour financer les investissements liés à la productivité.
Par ailleurs, les services de vulgarisation seront relancés pour la formation, la lutte contre des maladies et les outils liés à la productivité. Quant au rôle des coopératives, il sera revu en vue de consolider les pouvoirs de négociation et pour partager les ressources relatives aux segments à forte intensité de capital. Enfin, l’adoption de nouvelles technologies – telles que l’agriculture de précision, la biotechnologie et les techniques de production de rapports pour les interventions chronométrées – est aussi envisagée.
La MCIA et les représentants des producteurs sucriers poursuivent en outre leurs discussions sur le prix du sucre pour les petits planteurs, qui a été fixé à Rs 35 000 la tonne. L’écart de Rs 11 000 entre le prix estimé au départ par le Syndicat des Sucres et celui du prix visé par l’État devrait être financé conjointement par le gouvernement et le secteur sucrier.
Le gouvernement augmentera également les terres de canne à sucre par 18 000 hectares via le Sugar Investment Trust et le RBSE, ce qui devrait injecter entre 80 et 100 tonnes supplémentaires de sucre. Pour sa part, le taux de réimplantation sera fixé à 8% annuellement. Sans compter que les limites de conversion des terres seront basées sur des quotas et axées sur les critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG) afin de limiter le ratio de perte de terres par an.
L’initiative d’amélioration des prix est, comme le souligne le ministère de l’Agro-industrie, un investissement pour l’ensemble du secteur afin d’accroître la productivité et d’amortir les coûts grâce à des économies d’échelle. Une limite de productivité moyenne de 300 000 tonnes réduira les coûts et relancera les composantes auxiliaires de l’industrie de la canne à sucre, notamment l’énergie, la biomasse et le commerce des matières premières.
L’effet multiplicateur doit être supérieur à l’investissement en un rien de temps, avec une période de récupération estimée à moins de cinq ans et, plus important encore, en minimisant les risques et les conséquences d’une mort lente de l’industrie sucrière, conclut le ministre.