Avec la flambée des prix des produits alimentaires importés se pointant à l’horizon, il est plus que jamais temps pour chaque famille de cultiver un petit potager. Et pour le pays, de produire davantage localement. Dans ce contexte, Eric Mangar, agronome et directeur du Mouvement pour l’Autosuffisance Alimentaire (MAA), recommande de construire un « bloc économique en collaboration avec l’Afrique du Sud, Madagascar et d’autres pays voisins pour assurer notre sécurité alimentaire ».
Avec les céréales provenant essentiellement de Russie, le pays risque de connaître une pénurie de maïs, utilisé dans l’élevage des volailles. « Si le maïs ne parvient pas à Maurice, il sera impossible de nourrir nos volailles. Le poulet contribue à hauteur de 40% de nos protéines. Il est nécessaire en l’absence de stock d’approvisionnement en maïs de négocier avec l’Afrique du Sud ou Madagascar pour en avoir », prévient Eric Mangar.
Il recommande en outre un vaste programme de production nationale. « Le gouvernement doit libérer des terres pour qu’on produise de la nourriture dans le pays », suggère-t-il. L’autre aspect essentiel aux yeux du directeur du MAA : l’exploitation des ressources de la mer, « dont la superficie s’est élargie avec les Chagos, etc. »
Il poursuit : « il nous faut récupérer un maximum de poissons, la source de protéines, quand le poulet et les grains secs font défaut. Il faut aussi miser sur les recherches. Par exemple, des recherches avaient démarré sur les algues, qui peuvent nous fournir des protéines, mais celles-ci n’ont pas connu de suite et on n’a pu aller de l’avant. Il faut exploiter toutes les sources possibles de protéines. »
Eric Mangar se dit par ailleurs en faveur d’un retour à l’élevage, tels que la volaille, les canards et le cabri. « J’encourage les gens à s’adonner à l’élevage intégré, c’est-à-dire faire son propre compost pour ne pas avoir à utiliser de fertilisants, qui deviennent très coûteux. Il faut retourner à l’élevage de canards-manille, de volailles, etc., comme autrefois. Il faut envisager ce retour à nos habitudes d’antan pour pouvoir assurer la sécurité nutritionnelle de la population », indique-t-il.
Une autre idée lancée par l’agronome porte sur la culture du fruit à pain dans les forêts et le Community Garden dans les régions, avec la culture de bananiers, de papayers et de fruits à pain… « La brède mouroum, par exemple, est très riche en apports nutritionnels, mais les Mauriciens ne l’exploitent pas suffisamment », regrette-t-il.
Il encourage par ailleurs les Mauriciens à avoir de potagers chez eux. « Si on n’a pas d’espace, on peut planter sur le toit de sa maison. Il suffit d’un robinet et de semer des semences dans des bacs. On peut utiliser des bidons de lessive vides ou autres conteneurs pour planter des brèdes tom pouce, petsai, laitue, coriandre, etc. », dit-il.
Dans des bacs de 15-20 pouces de profondeur, il est ainsi possible de planter, suggère Eric Mangar, des goyaviers ou des papayers. « On ne va peut-être pas récolter de grosses goyaves, mais c’est toujours une importante source de vitamine C. Or, ce dont on a besoin aujourd’hui, en temps de Covid-19, c’est d’avoir une immunité forte. Ce que nous plantons chez nous, cela sera des produits organiques. Il faut apprendre à faire du compost chez soi pour nourrir ses plantes », conclut-il.