Environnement Bill : les autorités ont-elles manqué le coche ?

L’Environment Bill partait d’un bon sentiment, mais les principaux acteurs de l’environnement ont vite déchanté. Durant la semaine, plusieurs collectifs militant pour la protection de l’environnement ont donné de la voix pour faire part de leur déception. Pour cause, le nouveau projet de loi, qui se voulait révolutionnaire, présente des zones d’ombre, des inexactitudes, qui au final ne répondent pas aux problématiques actuelles liées, entre autres, au changement climatique et au bétonnage pas très intelligent du pays, notamment par la grande distribution de permis EIA…

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Les autorités avaient l’occasion de rectifier le tir, avec les nombreux rappels de collectifs, tel que Platform Moris Lanvironnman (PML), qui avait envoyé une lettre ouverte au Premier ministre, mais en vain. « Nous maintenons tout ce qu’on a dit dans nos communiqués », déclare Adi Teelock, une des porte-parole de PML. Sur la page Facebook du collectif, PML indiquait d’ailleurs, hier que « le ministre Ramano est satisfait de lui-même et parle de loi historique », précisant que « le ministre/gouvernement ne comprend toujours pas ce qu’est un SEA (évaluation environnementale stratégique). Il est intéressant de noter que le ministre ne parle pas du fait que la nouvelle National Land Development Strategy (outil de planification spatiale nationale) n’est pas soumise à un SEA alors que c’est un point fondamental. »

PML se demande aussi « comment peut-il dire que la “bétonisation” est intégrée dans la planification, alors qu’aucune des smart cities depuis 2015 n’était prévue dans le National Developement Strategy de 2003. La NDS est considérée, elle, avoir été soumise à un SEA suite à l’Environment Protection Act de 2002 qui incluait la nécessité de faire un SEA pour la planification spatiale nationale. »

Par ailleurs, dans un document de 13 pages intitulé Environment Bill ? Economic Business as Usual, authorised, le collectif énumère les nombreuses lacunes que présente ce nouveau projet de loi en passe d’être adopté au Parlement. Encore une fois, et ce, malgré le tapage des collectifs militants durant toutes ces années, le citoyen — premier concerné, disons-le clairement — semble avoir été mis de côté, au profit de projets du gros capital. De plus, PML craint que le Strategic Environmental Aseessment (SEA) tel qu’il est présenté dans l’Environment Bill ne soit considéré que comme étant l’extension d’un Environment Impact Aseessment (EIA).

« Public interest » ?
Le collectif le répète : un SEA n’est pas un EIA et vice-versa.
En effet, le SEA est, en des termes simples, une évaluation globale d’un projet et de son impact sur l’environnement, la société et autres. Tandis qu’un EIA est l’évaluation détaillée d’un projet particulier. Est-ce qu’avec cette nouvelle loi, si un promoteur soumet un rapport SEA d’un projet de Smart City — qui rappelons-le, comporte plusieurs composantes notamment hôtel, blocs d’appartements, terrain de golf — il ne sera plus dans l’obligation de présenter un rapport EIA ? À ce stade, PML indique que ce n’est pas clair.

L’autre zone d’ombre concerne les EIA, SEA ou encore les Premilinary Environment Report (PER) pour les travaux d’intérêt public. Pour PML, encore une fois, ce n’est pas clair, car le projet de loi ne définit pas « public interest », qui pourrait laisser libre cours à toutes sortes de projets. « PER, EIA or SEA approval mandatory for public interest undertaking. The also fraught notion of public interest and national interest for that matter, is used in a loose, unclear way in the Bill. Public interest needs to be legally circumscribed. And not just invoked in potentially contradictory, arbitrary ways at the discretion of ministers, who may not be necessarily public-spirited », souligne PML dans ses commentaires.

PML regrette que la « citizen science » ne soit pas prise en compte, alors que ces dernières années, les citoyens mauriciens ont prouvé être de parfaits alliés dans le combat pour la protection de l’environnement. « This ‘modern’ piece of legislation is silent on citizen science. While it is gaining ground. It is not surprising. As the Bill is so poorly etched in terms of adaptation, in terms of stipulating anything beyond the blandest generalities when it comes to society, culture, psychology, philosophy, spirituality and such vital matters to our resilience », indique PML.

Pour cause, malgré les nombreuses requêtes de différentes organisations non gouvernementales, les Digital Elevation Model and Land Drainage Maps n’ont toujours pas été rendues publiques. Une aberration, compte tenu des dernières inondations… Un projet de loi, donc, qui comporte des inexactitudes linguistiques, avec de lourdes conséquences juridiques. PML remarque aussi qu’il n’est pas spécifié clairement si c’est l’île Maurice seulement qui est concernée ou tout le territoire de la République. « We are not sure in numerous references throughout the text, whether it is Mauritius Island or the Republic of Mauritius and thus of the territorial jurisdiction of this Bill », souligne PML. Un détail qui pourrait faire toute la différence en cas de litige ou de contestations.

La Commission Développement Durable du MMM s’est aussi exprimé sur le fameux projet de loi. Lors d’une conférence de presse en début de semaine, les membres de la commission ont exprimé leurs inquiétudes, notamment sur l’Environmental Stewardship.

Rien de nouveau…
Concernant la section 9 du projet de loi sur le National Network for Sustainable Development, Daniella Bastien souligne que « pa enn nouvo zafer-sa ! » et précise qu’il s’agit en fait de consultations entre les partenaires de l’État, des ONG et l’État pour des discussions portant sur le patrimoine national. « Mais le plus aberrant, c’est qu’il n’y a pas eu de représentant du ministère des Arts et du Patrimoine culturel dans le third schedule du projet de loi. »

Concernant les Environmental Sensitive Areas (ESA), la députée Joanna Bérenger indique que le nouveau projet de loi ne vient pas protéger les Environmentally Sensitive Areas (ESA). « À la place, nous voyons la création d’un énième comité prévu dans la section 22 qui est censé s’occuper de la protection des ESA. Ce comité aura la prérogative de veiller à minimiser l’impact du développement sur les ESA. Me kouma li pou kapav fer li alor ki li pena okenn pouvwar konkretmanpou li fer-sa ? » a-t-elle demandé. Elle a aussi déploré le manque de transparence des autorités, avec notamment le mapping des ESA, attendu depuis déjà deux ans. « Kouma eski minister pou kapav vinn deklar enn terin leta ou prive kouma enn ESA, kouma lalwa otoriz li fer, si mapping-la pa ankor pare ? » s’est-elle demandé. La commission du MMM a pris l’engagement de publier la carte des zones à risques, a souligné Joanna Bérenger.

En tout cas, si ce projet de loi se voit être un upgrade de la loi existante, soit l’Environment Protection Act (2002), il semble être passé à côté de l’essentiel… le ministère de l’Environnement a une fois de plus manqué le coche, alors que tous les éléments étaient là. À savoir que les commentaires complets de PML et de la commission durable du MMM sont disponibles sur leur page Facebook respective.

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