Environnement à Maurice en 2023 — Un bilan contrasté : du bon et du moins bon

La réduction alarmante de la couverture forestière (-10,6%), l’augmentation des émissions de GES (+5,3%) et la gestion croissante des déchets (+9,5%) soulignent la nécessité d’actions urgentes Des signes d’espoir avec l’augmentation de la productivité agricole et la diversification vers les cultures vivrières La hausse des précipitations (+15,5%) pose des défis, mais aussi des opportunités pour la gestion de l’eau et les pratiques agricoles

Maurice fait face à des défis environnementaux de plus en plus pressants. Le rapport de Statistics Mauritius sur l’état de l’environnement en 2023 offre un aperçu détaillé des tendances actuelles dans des domaines clés tels que la foresterie, l’agriculture, les émissions de gaz à effet de serre (GES) et la gestion de l’eau. Alors que certaines évolutions sont positives, d’autres soulèvent des inquiétudes quant à la durabilité écologique de l’île.

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Une réduction  alarmante des forêts de 10,6%

L’un des faits les plus marquants du rapport est la diminution significative de la surface forestière totale, qui est passée de 47,002 hectares en 2022 à 41,997 hectares en 2023, soit une réduction de 10,6%. Cette baisse est principalement attribuée à la conversion de terres forestières privées en terres destinées à d’autres usages, tels que l’agriculture ou l’urbanisation.

La déforestation pose un sérieux problème pour la biodiversité de Maurice, qui abrite de nombreuses espèces endémiques. En 2023, 52,4% de la surface forestière était détenue par l’État, tandis que 47,6% appartenait à des propriétaires privés. Cette répartition des terres forestières souligne la nécessité de politiques de conservation plus strictes, notamment pour les terrains privés, afin de protéger les forêts restantes.

Agriculture : baisse des récoltes hausse des rendements

Le secteur agricole, essentiel à l’économie mauricienne, a connu des changements notables en 2023. La surface cultivée en canne à sucre a diminué de 39,199 hectares en 2022 à 35,863 hectares en 2023, soit une baisse de 8,5%. Paradoxalement, malgré cette réduction de la surface cultivée, la production de canne à sucre a augmenté de 8,7%, atteignant 2,452,653 tonnes. Le rendement moyen par hectare a ainsi grimpé de 18,8%, passant de 57,57 tonnes en 2022 à 68,39 tonnes en 2023.

Cette augmentation de la productivité est le résultat de techniques agricoles améliorées et de meilleures pratiques de gestion des cultures. Cependant, la dépendance à la canne à sucre reste une préoccupation, car elle expose l’économie agricole aux fluctuations des marchés internationaux.

Émissions de gaz à effet de serre :  une augmentation inquiétante

En ce qui concerne les cultures vivrières, la surface cultivée a augmenté de 17,3% et la production alimentaire a bondi de 32,5%. Cette diversification vers les cultures vivrières est une évolution positive pour la sécurité alimentaire de Maurice, réduisant sa dépendance aux importations de denrées alimentaires.

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) sont une autre préoccupation majeure soulignée dans le rapport. En 2023, les émissions totales de GES ont augmenté de 5,3%, passant de 5,642.2 Gg CO2-éq en 2022 à 5,939.7 Gg CO2-éq. Le secteur de l’énergie est resté le plus grand contributeur, représentant 78,8% des émissions totales.

Cette augmentation est principalement due à une hausse de 12% dans l’utilisation de charbon pour la production d’électricité. Le recours accru au charbon, une source d’énergie particulièrement polluante, est préoccupant dans le contexte des engagements mondiaux en matière de réduction des émissions de GES et de lutte contre le changement climatique.

Maurice, en tant qu’État insulaire, est particulièrement vulnérable aux impacts du changement climatique, tels que la montée du niveau de la mer et les phénomènes météorologiques extrêmes. Il est, donc, crucial que des mesures soient prises pour réduire les émissions de GES, notamment en augmentant la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique du pays.

Températures et  précipitations : des  extrêmes marqués

L’année 2023 a été marquée par des températures mensuelles moyennes légèrement supérieures aux moyennes à long terme (1991-2020). Le mois de février a été le plus chaud, avec une température maximale moyenne de 29,5° C, soulignant une tendance à la hausse des températures qui pourrait avoir des impacts significatifs sur les écosystèmes et l’agriculture.

Gestion des déchets: une augmentation des “landfillés”

En termes de précipitations, Maurice a connu une hausse notable de 15,5%, atteignant 2,543 mm sur l’année. Janvier a été particulièrement pluvieux, avec des précipitations de 188% supérieures à la moyenne à long terme. Ces variations climatiques extrêmes posent des défis pour la gestion de l’eau et l’infrastructure de l’île, nécessitant des plans d’adaptation robustes pour faire face aux futures anomalies climatiques.

Le volume total de déchets solides enfouis à Mare Chicose, le principal site d’enfouissement de l’île, a augmenté de 9,5%, passant de 494,073 tonnes en 2022 à 541,141 tonnes en 2023. Cette hausse est indicative d’une augmentation de la production de déchets par habitant, qui a atteint 1,22 kg/jour en 2023.

La gestion des déchets est un défi majeur pour Maurice, étant donné la limitation des terres disponibles pour les sites d’enfouissement. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour promouvoir le recyclage, la réduction des déchets à la source, et l’adoption de technologies de gestion des déchets plus durables.

Le rapport de Statistics Mauritius sur l’état de l’environnement en 2023 révèle des tendances contrastées qui mettent en évidence les défis environnementaux actuels de Maurice. La réduction alarmante de la couverture forestière (-10,6%), l’augmentation des émissions de GES (+5,3%) et la gestion croissante des déchets (+9,5%) soulignent la nécessité d’actions urgentes et coordonnées pour assurer un développement durable.

L’urgence d’une approche intégrée et participative

Cependant, il y a aussi des signes d’espoir. L’augmentation de la productivité agricole et la diversification vers les cultures vivrières montrent que des améliorations peuvent être apportées par des pratiques de gestion efficaces. De plus, la hausse des précipitations (+15,5%), bien que posant des défis, pourrait également offrir des opportunités pour améliorer la gestion de l’eau et les pratiques agricoles.

Pour aller de l’avant, il est essentiel que Maurice adopte une approche intégrée et participative, impliquant toutes les parties prenantes, y compris le gouvernement, le secteur privé, la société civile et les communautés locales. Des politiques de conservation strictes, une transition vers des sources d’énergie renouvelables et des mesures de gestion durable des déchets sont cruciales pour protéger l’environnement de l’île et garantir un avenir durable pour ses habitants.

En fin de compte, le rapport de 2023 est un appel à l’action pour tous ceux qui se soucient de l’avenir de Maurice. Les décisions prises aujourd’hui détermineront la qualité de vie des générations futures et la capacité de l’île à maintenir son riche patrimoine naturel face aux défis environnementaux croissants. Les efforts combinés de conservation, d’éducation et de gestion durable peuvent aider à préserver les écosystèmes uniques de Maurice et à promouvoir un avenir plus vert et plus résilient.

 

 

Aller plus loin et plus en profondeur…

Pollution de l’eau : Le rapport n’aborde pas en profondeur les problèmes de pollution de l’eau, qui restent une préoccupation majeure, notamment en ce qui concerne les nappes phréatiques et les zones côtières affectées par les rejets industriels et domestiques.

Conservation de la biodiversité : La perte de biodiversité due à la déforestation et à l’urbanisation n’est pas suffisamment traitée. Maurice abrite des espèces endémiques uniques qui sont menacées par la destruction de leurs habitats naturels.

Initiatives de reforestation : Bien que la déforestation soit une préoccupation majeure, le rapport pourrait bénéficier d’une mise en lumière des initiatives locales et internationales visant à reboiser l’île et à restaurer les écosystèmes dégradés.

Gestion des zones côtières : Avec la montée du niveau de la mer, la gestion des zones côtières devient cruciale. Le rapport ne détaille pas les efforts de renforcement des infrastructures côtières pour protéger contre l’érosion et les inondations.

Sensibilisation et éducation : Les programmes de sensibilisation et d’éducation environnementale sont essentiels pour mobiliser la population mauricienne autour des enjeux écologiques. Le rapport pourrait inclure des informations sur les efforts en cours dans ce domaine.

Lutte contre les espèces invasives : Maurice lutte contre plusieurs espèces invasives qui menacent sa biodiversité native. Les mesures de contrôle et d’éradication de ces espèces sont cruciales pour la conservation des écosystèmes locaux.

Plaintes : une diminution des signalements

La gestion efficace de l’environnement nécessite une coordination et une surveillance appropriées des problèmes environnementaux. Le ministère de l’Environnement, de la Gestion des Déchets Solides et du Changement Climatique traite les plaintes reçues du grand public selon un protocole de traitement des plaintes.

En 2023, le nombre de plaintes traitées par la Division de la Prévention et du Contrôle de la Pollution du ministère a diminué de 42,4%, passant de 757 en 2022 à 436. Les principales catégories de plaintes étaient les suivantes : pollution sonore (17,2%), terres en friche (15,1%), pollution de l’air (9,9%), odeurs (9,9%) et déchets solides (5,7%).

Licences d’EIA et  de PER approuvées : une augmentation des projets

En 2023, 26 licences d’Évaluation d’Impact Environnemental (EIA) ont été accordées, comprenant 9 pour des “autres projets”, 4 pour des morcellements de terres, 4 pour des hôtels côtiers et travaux connexes, 4 pour des fermes photovoltaïques, 3 pour des projets de développement immobilier (logements, Integrated Resort Scheme, Property Development Scheme, Smart City), 1 pour la construction de routes et d’autoroutes, et 1 pour le développement industriel.

Parallèlement, 8 approbations de Rapport Préliminaire Environnemental (PER) ont été émises, comprenant 3 pour des développements industriels, 2 pour l’élevage de volailles, 1 pour l’élevage de bétail, 1 pour des projets de développement immobilier (logements, Integrated Resort Scheme, Property Development Scheme, Smart City) et 1 pour des “autres projets”.

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