Échiquier Politique – Démocratie et élections : Transparency Mauritius et l’UE galvanisent la jeunesse

129 281 électeurs sont dans la tranche d'âge de 18 à 25 ans, et iront voter pour la première fois aux prochaines élections générales

Transparency Mauritius a organisé un atelier de travail au Caudan Arts Centre, avec le soutien financier de l’Union européenne. Le thème était La jeunesse et la démocratie : droits, responsabilités et participation. L’objectif était de faire comprendre aux jeunes l’importance de la gouvernance démocratique, de leurs droits et responsabilités en tant que citoyens, et surtout les stratégies à mettre en place pour une participation active et percutante à la démocratie.

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Mohamed Mahgoub, Board Director de Transparency Mauritius, estime que la démocratie n’est pas seulement un système politique, mais un mode de vie. Car la démocratie entend garantir que chaque voix soit entendue, que chaque vote compte et que chaque citoyen ait un accès égal au processus décisionnel. Il a salué les jeunes, qui ont fait le déplacement, tout en soulignant l’importance de leur participation à l’élaboration « de l’avenir de la démocratie ».

Le fait que l’atelier soit axé sur un thème fort, “Jeunesse et démocratie”, vient, a-t-il dit, démontrer que la démocratie, à la base, est un système de gouvernement dans lequel le pouvoir est confié au peuple et qu’elle repose sur les principes fondamentaux de participation, d’égalité et de liberté. Il a tenu, de ce pas, à s’adresser aux jeunes qu’il a présentés non seulement comme tant des dirigeants de demain, mais aussi comme étant les acteurs du changement d’aujourd’hui.

« Vous disposez des droits fondamentaux de liberté d’expression et du droit de vote. Ces droits vous permettent d’exprimer votre voix et de faire la différence. Ces droits s’accompagnent de responsabilités », s’appesantit-il. D’où l’importance, selon Mohamed Mahgoub, d’être des électeurs informés, de s’engager dans des activités civiques et de défendre les valeurs de respect et de tolérance.  « La participation active est la pierre angulaire d’une démocratie dynamique et l’engagement civique est essentiel au renforcement de notre démocratie », ajoute-t-il.

Pour faire avancer les choses, Mohamed Mahgoub a suggéré aux jeunes d’être des acteurs à travers le bénévolat, en rejoignant des groupes civiques et en participant à des forums publics. Il leur a aussi rappelé que dans leur quête, « leur route sera aussi parsemée d’embûches qui peuvent parfois prendre la forme d’un désenchantement politique ». Il a insisté sur le fait que ce passage à vide devrait les stimuler à surmonter ces obstacles en les renforçant en défis et que pour cela, ils devraient être formés « tout en échangeant leurs points de vue avec d’autres jeunes à travers la création de plateformes inclusives ». Le monde du numérique a aussi été évoqué, surtout qu’aujourd’hui la technologie et les médias sociaux sont des outils puissants pour l’engagement civique et la sensibilisation.
Mohamed Mahgoub affirme que Transparency Mauritius joue un rôle crucial dans la promotion de la transparence et de la responsabilité dans notre société. « Avec une équipe qui travaille sans relâche pour surveiller les processus électoraux, sensibiliser aux droits et responsabilités démocratiques et plaider en faveur de réformes qui renforcent la démocratie. Grâce à ses initiatives portant sur des campagnes d’éducation des électeurs et de leurs efforts de plaidoyer, Transparency Mauritius est parvenu à donner aux citoyens les moyens de participer activement au processus démocratique et à demander des comptes à leurs représentants élus », fait-il comprendre.

Dans le même ordre d’idées, il fait comprendre aux jeunes que Transparency Mauritius collabore activement avec des institutions publiques et privées pour garantir que les pratiques éthiques sont respectées dans tous les secteurs. Tout en se disant fier que l’une des principales réalisations repose sur le travail approfondi auprès des jeunes à travers les forums jeunesse. Forums qui offrent une plate-forme permettant aux jeunes d’exprimer leurs points de vue sur les questions socio-économiques, « favorisant ainsi une nouvelle génération de citoyens informés et engagés ». Il y a aussi des actions de plaidoyer dans les écoles, les universités et les centres sociaux de l’île pour promouvoir les droits civiques, en dotant les individus des connaissances et des outils nécessaires pour participer pleinement aux processus démocratiques. Sans oublier, leur plaidoyer en faveur de la liberté d’information et de la protection des lanceurs d’alerte.

Pour sa part, Oskar Benedikt, ambassadeur de l’Union européenne auprès de la république de Maurice, a marqué cet atelier de travail de Transparency Mauritius de sa présence pour encourager les jeunes à participer au processus électoral. « La jeunesse, il faut la conscientiser face aux élections. On note une certaine apathie et un désintérêt des jeunes pour la vie politique et les politiciens. Il y a des axes sur lesquels il faudrait se concentrer, l’éducation démocratique, la séparation des pouvoirs, les développements, et surtout comment engager la jeunesse dans cette voie…» dit-il.

Johanne Rannoojee, Advocate in Youth Inclusion in Politics, a été convaincante dans son approche. Elle a abordé la question du ras-le-bol des jeunes à l’égard de la chose politique, les stéréotypes selon lesquels un jeune ne s’intéresse pas à ce qui se passe dans son pays, ne veut pas s’engager. Dans la salle du Caudan Art Centre, elle a donné la parole aux jeunes pour tâter le pouls, savoir ce que représente la politique pour eux.

Les réponses ne se sont pas fait attendre : « La politique, c’est travailler avant tout pour le progrès du pays sans rien attendre en retour. » Après avoir discuté avec des jeunes en juillet 2019, a-t-elle dit, son constat est que pour ces derniers, la politique ne se résume pas uniquement à ce qui se passe au Parlement. Elle a confié qu’elle n’a pas apprécié le fait que dans un collège mixte qu’elle fréquentait, les filles devaient se contenter à faire les Home Economics alors que les garçons, eux, avaient droit au Design. « Nous étions partis voir le recteur et nous lui avons dit que ce n’était pas acceptable. Cela a changé des années après. Ce que je ne savais pas à l’époque, c’est que mes amis et moi avions fait un acte politique. Idem, lorsque les jeunes s’engagent au sein d’une association, en donnant de leurs temps et de leurs ressources et ne savent pas qu’ils font de la politique. C’est ce que nous faisons tous les jours, à travers nos prises de décisions, notre engagement, nos prises de paroles », fait-elle ressortir.

S’approprier sa citoyenneté

Johanne Rannoojee, qui a fait des études en sciences politiques, pensait être la seule à être découragée face aux remarques de certains que les jeunes ne s’intéressent pas à la politique. En 2019, avec d’autres amis, ils ont fait un sondage sur les réseaux sociaux. Résultat, ils ont eu 441 réponses de personnes âgées entre 13 et 35 ans. Et 95% de jeunes interrogés disaient qu’ils suivaient l’actualité politique principalement sur les réseaux sociaux, 95% indiquaient ne pas être affiliés à aucun parti politique, mais 47% souhaitent un jour s’engager en politique.

Pour elle, le constat est clair, les jeunes s’intéressent à la politique, mais ne sont pas suffisamment équipés pour y participer activement. « De là, nous avons lancé une plateforme : la politique expliquée aux jeunes à travers un téléphone et la Constitution qu’on peut trouver en ligne. Nous avons trouvé qu’aujourd’hui, il y a ce besoin de proposer un contenu fait par les jeunes. Pour aider les jeunes à développer leur Political Literacy et prendre en main leur destinée. » La politique passe par le pouvoir de l’image dans la communauté, à école, et dans la vie de tous les jours, a-t-elle dit.
« J’encourage les jeunes à connaître la Constitution, à visiter les Cabinet Highlights”(décisions prises au cabinet ministériel disponibles tous les vendredis) qui sont publiés par le GIS. Il faut que les jeunes établissent des rencontres entre eux. La deuxième piste est d’explorer et de s’approprier sa citoyenneté », conseille-t-elle.

Un jeune dans la salle du Caudan Arts Center s’exprimera en disant : « Pour moi, ma citoyenneté, c’est mon identité par rapport à un pays. » Et Johanne Rannoojee de rétorquer : « Très intéressant, ce point soulevé. C’est mon identité, mon appartenance à mon pays, nous appartenons tous à un pays, on vit sa citoyenneté tous les jours sans le savoir tout comme on fait de la politique sans le savoir. Maintenant, il faut se redécouvrir comme citoyen et être au cœur de ce changement en commençant par le voisinage, en étant dans le social. » Elle a aussi demandé combien de jeunes connaissent les élus de leurs circonscriptions. « Nous sommes des contribuables, nous contribuons à l’économie du pays et nous devons savoir qui sont des élus de notre circonscription. Il faut prendre cette responsabilité de les contacter et savoir ce que font ces élus », avance-t-elle.
En parcourant le volet des Changemakers avec les élections qui approchent, Johanne Rannoojee a souligné qu’il est essentiel pour un jeune de voter : « Même si nous nous sentons seuls, notre voix a de la valeur. Il faudrait que l’éducation politique et la citoyenneté fassent partie intégrante de notre système éducatif. Comprendre la société dans laquelle nous vivons est aussi important que l’éducation académique », affirme-t-elle.
Laura Jaymangal de Transparency Mauritius trouve, pour sa part, que s’engager dans le processus électoral n’est pas seulement un droit, « mais une responsabilité qui peut conduire à des changements significatifs et à un avenir meilleur ». Dans de nombreux pays, la participation électorale des jeunes est considérablement faible par rapport aux groupes plus âgés, a-t-elle déclaré. Cependant, lorsque les jeunes votent, « ils peuvent avoir un impact substantiel sur les résultats électoraux ».
L’intervention de Vigianee Coonjan, Chief Electoral Officer, a permis aux jeunes de soulever de nombreuses questions pertinentes. Le nombre d’électeurs entre 18 et 25 ans en 2021 était de 127 958 et qu’ en 2014, ils sont au nombre de 129 281.


HANS SOOBRAMANIEN :
« J’irai voter pour la première fois »
Âgé de 21 ans, Hans Soobramanien vient de terminer son diplôme en droit et il poursuit actuellement un stage à Transparency Mauritius et dans d’autres firmes légales. Cette année, il va voter pour la première fois et avoue qu’avant de travailler à Transparency Mauritius, il n’était pas conscient de cette importance de voter.

« Je me disais que cela n’allait rien changer. Alors que maintenant je réalise qu’être jeune, c’est avoir cette mentalité que c’est nous qui allons construire le pays et qu’on a cette possibilité d’emmener ce changement qu’on a envie de voir.»

Parlant de l’effet boomerang que les jeunes et nouveau-nés perçoivent déjà un pactole de démarrage dans la vie, Hans est d’avis que ce n’est pas « un appât » du gouvernement pour gouverner de nouveau. « Nous devons aussi parler de construction de base. Nous misons sur les jeunes pour le progrès. Moi, je veux apporter ce changement de mentalité. Beaucoup diront : Gouvernman-la pa bon. C’est à nous aussi les jeunes de nous réveiller et d’oser apporter ce changement en ayant des jeunes politiciens qui peuvent apporter ce renouveau pour le pays. C’est bon d’avoir les jeunes au pouvoir, mais il faut aussi de la maturité. Qui dit poste élevé dit aussi plus de maturité. »


KERVIN RATINON :
« Je suis convaincu que les jeunes seront nombreux à voter »
À 22 ans, Kervin Ratinon, président du Rotaract Club Uclan Mauritius vient de terminer ses études en LLB. Il est d’avis que pour connaître le sens du vote comme jeune, il faut d’abord voter. « Certains jeunes diront aussi pourquoi voter alors que ce sont les plus âgés qui brigueront les suffrages. Le président de la République, d’après la loi (section 28 – 3) de la Constitution ne devrait pas avoir moins de 40 ans pour siéger. C’est un contraste car notre Président de la République est plus âgé. Le plus jeune parlementaire a été Adrien Duval, à 23 ans. Il n’y a pas vraiment de jeunes au pouvoir actuellement. Les jeunes ont pris conscience de cela. Je suis convaincu qu’ils seront nombreux à voter cette année, déjà beaucoup ont fait entendre leurs voix sur les réseaux sociaux durant le Covid. Le vote est important que ce soit dans l’ordre de la continuité ou du changement.»


AURELYNE TARER :
« Inquiétant de voir en France l’émergence du RN »
D’origine française, Aurelyne Tarer, 18 ans, cadre à Transparency Mauritius pour quelque temps en vue de mieux comprendre les enjeux de notre démocratie. Elle a souhaité parler de cette vague contre le macronisme au profit du RN.

« La participation est en augmentation, donc c’est très important pour la démocratie. Le fait que l’extrême droite monte est assez inquiétant, cependant les élections ne sont pas encore faites, il y a encore un deuxième tour. Donc à voir ce que les électeurs diront dimanche ? Pour être PM, il faut avoir de l’expérience. Après, si c’est le choix de la population, on est dans un pays démocratique, il faut accepter les élections. Cependant, avec le RN en France qui refuse la double nationalité… Je suis française sans double nationalité, mais je pense à tous ceux qui ont la double nationalité, cela reste assez inquiétant d’être discriminés de la sorte, car ils ne sont pas forcément plus corruptibles qu’une autre personne. C’est inquiétant de voir en France la poussée, voire l’émergence du Rassemblement national et de ses pensées. C’est aussi une forme de discrimination, de racisme. »

Peut-on s’attendre à une dérive électorale française avec la montée du RN ? « Je ne pense pas que la France aille vers la dérive, car on a un système électoral avec de bonnes bases, une Constitution qui ne permet pas d’aller à la dérive. Cependant, il faut rester vigilant et cela, c’est le rôle de l’Assemblée et des députés que les Français ont voté. La Constitution établit une cohabitation. Normalement cela devrait se faire avec des pouvoirs qui sont quand même bien séparés, mais ce sera dur. Il faudra bien documenter la population et les problèmes qui peuvent y avoir en France et l’Assemblée, elle est là comme moyen préventif. »


ASHLEY VITHILINGEM :
« Aux jeunes de prendre conscience de leur pouvoir »
Président sortant du Rotaract Club de Uclan Mauritius, co-chair de l’aile jeune du conseil des religions, Ashley Vithilingem, 22 ans vient de terminer ses trois années de droit à Uclan et votera.

« Le gouvernement prend soin d’écouter la population et de subventionner les différentes tranches d’âges, mais nous voyons avec peine que cette tranche d’âge de 18 à 25 ans, qui sont de jeunes étudiants, professionnels et universitaires, mérite aussi que leurs voix soient entendues. Évidemment, un jeune doit s’intéresser à la politique, à cette prise de responsabilité, et, pour moi, chaque jeune devrait se poser la question de la manière dont il pourrait apporter sa contribution pour son pays. Cela pourrait se faire, en soignant ses relations dans divers milieux sociaux, tout en veillant à ce que ses frères et sœurs qui sont des concitoyens de Maurice vivent en harmonie : As one people as one nation. »

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