Distribution et vente – riz ration : rien en vue !

Voilà des mois depuis que les consommateurs attendent que les sachets de riz ration refassent surface dans les différents marchés de l’île. Si le mot « pénurie » ne veut pas être évoqué par les autorités et que la State Trading Corporation (STC) a laissé entendre que la situation se rétablirait vers le mois de novembre, force est de constater que pour cette fin de mois, pas un seul sac de riz ration (riz non-basmati) n’a été aperçu dans les rayons des supermarchés. Beaucoup se rabattent sur une alternative commercialisée le triple du prix du sachet de riz ration de la STC.

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Le riz du Pakistan 3 fois plus cher que celui de la STC

Sur les groupes de réseau d’entraide sur Facebook, les demandes continuent : « Kotsa kapav gagn bal diri ? » Ils sont d’ailleurs nombreux à arpenter les ti-laboutik pour tenter de s’en procurer, quitte à payer bien plus cher que d’habitude. « Mo’nn resi gagne, me li mari ser, plis ki Rs 80. So kalite osi pa korek », se plaint une autre internaute. Un autre a publié la photo d’un « riz pour chien » vendu à plusieurs centaines de roupies dans un supermarché de l’île… Pour en avoir le cœur net, Week-End a arpenté les rues de Port-Louis, hier, pour essayer de trouver le fameux riz ration. Que nenni !
Le seul sachet qu’on a pu trouver est un riz en provenance du Pakistan au prix de Rs 73, soit presque trois fois plus cher que le riz ration de la STC. En effet, depuis trois mois, après la décision de l’Inde de stopper les exportations de riz, Maurice s’est retrouvée en situation difficile. Toutefois, après des négociations bilatérales entre les deux pays, l’Inde a décidé d’exporter du riz vers Maurice… au compte-gouttes. La STC a ainsi reçu depuis août plusieurs cargaisons de tonnes métriques de riz et en attend d’autres. De plus, au vu de la situation et du retard accusé par les bateaux de cargaison, cette dernière a diminué la distribution du riz ration sur le marché local, le temps de reconstituer le stock de riz ration dans les entrepôts.
Si les autorités assurent qu’une distribution journalière se fait dans les commerces de l’île et si ces derniers assurent la vente quotidienne de ce riz, pourquoi les sachets de riz ration sont-ils absents des étagères ? « Les gens achètent en masse.
Si nous avons tenté d’établir que ce serait deux sachets de riz par client, il y en a qui contournent le système, en faisant le tour des boutiques du coin. Ce n’est pas facile, parce que parfois nous avons des clients dans le besoin, qui, eux, en consomment et qui rentrent bredouilles. Ils se rabattent alors sur des sachets de pâtes, mais même ça il y n’en a plus », nous confie M., boutiquier d’un village du Sud. « Nous comprenons que les gens achètent ce riz pour leurs animaux de compagnie, chose que je comprends, mais il ne faut pas oublier qu’il y a des familles entières, des enfants qui en dépendent. Mo bizin vann mo prodwi, koman mo pou al dir sa klian-la ? », confie-t-il.

Hausse de prix à prévoir ?

De plus, ils sont nombreux à se pencher sur la question de l’autosuffisance alimentaire. Dans une déclaration à Week-End il y a un mois, Éric Mangar, agronome et membre du Mouvement pour l’autosuffisance alimentaire (AMM), soulignait qu’il était grand temps d’enclencher un système d’approvisionnement régional. « Nous devons penser à l’avenir et le changement climatique demeure un des plus gros dangers qui nous guettent.
Ce qui se passe en ce moment avec l’importation du riz est un signal fort. Nous devons nous préparer et la région indiaocéanique doit coopérer davantage. »  Selon lui, la Commission de l’océan Indien devrait se pencher sur de nouvelles coopérations, notamment dans la production de riz. « Nous avons dans le passé importé du riz de Madagascar. Nous ne pouvons plus dépendre d’un seul importateur, ce n’est plus possible dans la conjoncture. » Dans cette même veine, Le Point Afrique publiait il y a quelques mois un article sur la « Korean Rice Belt », initiative lancée par Séoul et huit pays africains (le Sénégal, la Gambie, la Guinée, le Ghana, le Cameroun, l’Ouganda, le Kenya et la Guinée-Bissau) avec pour objectif d’aider à stimuler la production de riz et à réduire la dépendance aux importations, alors que des inquiétudes persistent concernant la sécurité alimentaire sur le continent.
Il est par ailleurs bon de tout remettre en contexte. Si Maurice fait actuellement face à une crise du riz, elle n’est malheureusement pas la seule. Réchauffement climatique, tensions géopolitiques, et autres, les petits États insulaires dépendant lourdement d’importations sont les premiers à subir les dommages collatéraux.
En outre, l’ancien ministre du Commerce, Soodesh Callichurn, évoquait le mois dernier une éventuelle hausse du prix d’un certain type de riz, à
cause de la taxe à l’exportation de 20% sur le riz étuvé mis en place par l’Inde qui assure 40% du commerce mondial du riz. Dans un article du Monde publié le mois dernier, l’on s’inquiétait de la hausse du prix du riz. En effet, d’après l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en août, les prix mondiaux du riz ont augmenté
de 9,8% par rapport au mois précédent.
Il s’agit du prix le plus haut depuis quinze ans, précise la FAO.

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