Dans une récente étude publiée le 4 mai 2023 dans la revue Nature Medicine, l’équipe du Professeur Alexandre Loupy, néphrologue réunionnais, a créé un assistant informatique automatisé qui corrige les diagnostics de rejets de greffes et permet de mieux orienter la prise en charge des patients.
Le rejet est la principale cause d’échec de greffe après transplantation rénale. Il constitue donc, compte tenu de la pénurie mondiale d’organes, un problème majeur de santé publique.
Par conséquent, face au nombre grandissant d’erreurs diagnostiques qui sont continuellement documentées dans la littérature scientifique, les sociétés savantes internationales de transplantation ont appelé les chercheurs du monde entier à réagir et trouver une solution pour simplifier le diagnostic du rejet.
Le Professeur Alexandre Loupy, PUPH, néphrologue à l’hôpital Necker à Paris et expert en sciences des données, directeur d’une équipe de recherche à l’Inserm (U970) et de l’Institut de Transplantation multi-organe et de médecine régénératrice PITOR de l’Université Paris Cité, avance que la médecine de précision a besoin d’outils d’aide au diagnostic qui soient fiables, robustes, précis, largement validés et démontrant un bénéfice réel et mesurable pour les patients.
« Il est capital que ces systèmes digitaux soient éthiques et bénéficient d’une transparence complète tant dans leur construction que dans l’interprétation et le rendu des résultats. Dans notre étude nous avons pu démontrer qu’un assistant informatique automatisé permettait aux médecins de poser des diagnostics plus précis », indique ce dernier.
Il fait ressortir que le principal défi était d’établir un consortium réunissant des experts en transplantation, néphrologie, anatomopathologie mais aussi en sciences des données, épidémiologie, biostatistiques, programmation informatique et intelligence artificielle, capables de développer ce système informatique et de recruter des patients dans le monde entier afin de tester s’il était capable de correctement diagnostiquer les rejets
« Les résultats sont sans appel, puisque plus de 40 % des diagnostics sont corrigés et requalifiés par la machine. Cet outil permettra de mieux traiter les patients et également améliorer les essais cliniques et le développement de traitements immunosuppresseurs ».
Le consortium a dans un premier temps conduit une revue systématique de la littérature scientifique afin de colliger l’ensemble des règles diagnostiques de la classification du rejet publiées au cours des 30 dernières années.
Les médecins et les pathologistes ont ensuite travaillé avec les data scientists, développeurs et programmeurs informatiques, afin que ces derniers puissent traduire ces règles diagnostiques en un algorithme informatique couvrant l’ensemble des scénarios possibles de rejets.
Ils ont ensuite créé un assistant informatique automatisé disponible en ligne et facile d’utilisation, qui interprète instantanément grâce à l’algorithme les données médicales complexes renseignées par les médecins, afin de fournir aux patients un diagnostic en appliquant scrupuleusement les règles de la classification internationale.
« Il s’agit en quelque sorte d’un ChatGPT spécialisé dans les rejets », indique Daniel Yoo, data scientist et co-premier auteur de l’étude. « Nous avons mis au point un système intelligent et très simple d’utilisation. Les médecins peuvent en quelques clics obtenir un diagnostic correct pour leurs patients. L’assistant informatique leur fournit également un compte-rendu de l’analyse ainsi qu’un arbre décisionnel qui explique le raisonnement de l’algorithme, pour éviter tout effet ‘black box’ ».