Le masque est devenu, ces deux dernières années, un indispensable. Si l’adulte a pu s’adapter, pour l’enfant beaucoup moins et pour l’enfant souffrant d’un handicap ou d’un trouble du spectre de l’autisme encore moins. Si les autorités locales restent intransigeantes quant au port du masque, elles devraient aussi songer à s’adapter à ces cas exceptionnels, qui loin d’être des cocovid, sont avant tout de petits patients.
À Maurice, selon la Public Health Act, tout enfant de plus de cinq ans doit obligatoirement porter le masque. Une recommandation conforme aux lignes directrices de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), alors que les Centers for Disease Control and Prevention aux États-Unis recommandent le port du masque pour les enfants âgés de deux ans et plus. Si en théorie tout semble bien se passer, dans la pratique, les choses sont beaucoup moins simples. Sweety est une mère inquiète. « Mon enfant a à peine six ans et quand on sort, il doit absolument porter son masque. Du coup, c’est un double stress pour moi, car il est parfois difficile de faire comprendre à un enfant qu’il doit garder le masque, même s’il a chaud ou s’il transpire ou s’il a du mal à respirer. Et donc, je dois tout le temps le rappeler à l’ordre, quitte à lui crier dessus, par peur qu’il ne soit contaminé ou alors sanctionné par les autorités ! Et puis, c’est angoissant pour nous adultes de tout le temps porter le masque, et je n’ose pas imaginer comment cela doit être pour un petit enfant qui grandit sans voir le visage des autres… », nous confie-t-elle.
En effet, il y a aussi la peur des répercussions sur le développement de l’enfant. D’ailleurs, en France, la Société française de pédiatrie tirait la sonnette d’alarme en début d’année pour permettre aux écoliers d’aller en classe sans masque, comme cela se fait en Angleterre. Dans un article du Parisien, l’on indiquait que « Christèle Gras-Le Guen met aussi en avant le fait qu’avec les fortes chaleurs, la pénibilité de cette mesure (…) devrait être épargnée aux jeunes enfants. Cette levée permettrait d’achever l’année scolaire sur un message positif pour les écoliers alors qu’ils ont subi fortement les effets indirects (de la pandémie) sur leur santé mentale, note encore la présidente. »
Masques colorés pour les petits
À Maurice, c’est surtout ceux qui s’occupent des enfants vivant avec un handicap qui en parlent. Cynthia Payendee, directrice d’Autisme Maurice, nous explique que les enseignants du centre mettent un point d’honneur à enseigner les bons gestes à leurs étudiants. « Depuis le début, nous donnons l’habitude à nos élèves de porter le masque », dit-elle. Elle soutient que si pour un enfant dit normal cela peut être compliqué, pour un enfant vivant avec un handicap, c’est encore plus compliqué. D’ailleurs, elle nous confie que la mère d’un de leurs élèves a dû s’expliquer auprès des policiers, car son enfant étant autiste ne portait pas le masque. Et ce, malgré la lettre officielle de dérogation du SEDAM qu’elle avait en sa possession…
Vincent Mandrou est psychologue à Autisme Maurice et parle justement de l’importance de sensibiliser la population aux différents cas d’enfants qui pourraient trouver le masque « juste insupportable ». Il explique que « dans les cas d’enfants autistes par exemple, l’on parle souvent d’hypersensibilité au toucher et un simple pansement peut être pour eux vraiment insupportable. » Il soutient ainsi que dans ces cas-là, le port du masque peut être problématique, tout comme dans le cas d’enfants déficients mentaux, où il est encore plus compliqué de leur expliquer de porter le masque. Vincent Mandrou est ainsi conscient que beaucoup de parents sont démunis face à la situation et sont perdus entre sortir avec leurs enfants ou alors subir le regard des gens dans la rue qui ne comprennent pas, par manque d’informations sans doute, que ces enfants ne peuvent pas porter le masque pour des raisons médicales.
Il explique, en outre, qu’il y’a effectivement le problème de « décoder le visage » que pose le port du masque pour ces enfants, ou le stress des parents qui ont peur d’une sanction financière. Toutefois, le psychologue reste positif et avance qu’a priori, le port du masque dans le long terme n’affectera pas le développement de l’enfant, mais que « le fait d’avoir raté plusieurs mois de cours, ça oui ! Mais c’est un autre sujet », dit-il.
Pour ainsi aider l’enfant à surmonter cette peur du masque, Vincent Mandrou propose l’idée des masques colorés ou à l’effigie de la bande dessinée préférée de l’enfant. Et du côté de l’enseignant, il trouve l’idée des masques transparents laissant voir la bouche ou des t-shirts avec les visages des enseignants qui y seraient imprimés une idée intéressante pour permettre aux enfants de s’adapter à la situation. Il conseille aussi aux parents de rester à l’écoute et d’essayer de faire porter le masque à l’enfant à la maison pendant un certain temps, ne serait-ce que pour l’habituer à la sensation.