Cour suprême : La position du judiciaire sur l’homosexualité attendue

Avec la fin des arguments juridiques visant à contester l’article 250 du Code Pénal, qui criminalise les relations homosexuelles, la communauté LGBT retient son souffle

- Publicité -

Les arguments légaux contestant la constitutionnalité de l’article 250 du Code pénal mauricien devant la Cour suprême sont désormais bouclés. L’affaire avait été initialement déposée devant la Cour suprême le 25 octobre 2019 par Ridwan Ah Seek, président du Collectif Arc-en-Ciel (CAEC) et militant des droits de l’homme. Les audiences avaient été entamées en novembre 2021 et le jugement est attendu par la communauté des lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT).

Ce recours au judiciaire vise à mettre fin à la criminalisation des relations homosexuelles consensuelles. Cette bataille légale a ainsi pour objectif de se défaire de l’article 250 du Code Pénal, remontant à 1838, et qui est considéré comme une relique du passé colonial de Maurice. Les personnes reconnues coupables en vertu de cette provision de la loi peuvent en effet encourir une peine allant jusqu’à cinq ans de prison.

Après avoir présenté ses arguments en faveur de modifications des dispositions discriminatoires du Code pénal aux juges de David Chan Kan Cheong et Karuna Gunesh-Balaghee, l’avocat de Ridwan Ah Seek, Me Gavin Glover, SC, a déclaré que cette affaire représente « le cri du cœur d’un jeune homme désireux d’aimer celui qu’il choisit ». Il poursuit : « Mon client demande à être libéré du colonialisme carcan de l’article 250, qui l’empêche de vivre pleinement sa vie. L’amour est l’élément sous-jacent de notre argumentation. Pourtant, un acte d’amour peut entraîner une servitude pénale allant jusqu’à cinq ans. L’article 250 nie l’expression la plus fondamentale de cet amour en criminalisant l’un des aspects les plus intimes d’une relation consensuelle, la relation homosexuelle. »

L’homme de loi a mis en avant les nombreux droits constitutionnels violés par l’article 250, soit le droit à la vie privée, celui de liberté d’expression et le droit à la liberté. Il a également souligné que l’article 250 est en contradiction avec divers accords et traités internationaux ratifiés par la République de Maurice. L’équipe juridique a par ailleurs fait référence à des contestations constitutionnelles similaires réussies contre la criminalisation des relations sexuelles consensuelles entre personnes de même sexe à Belize, au Botswana, en Inde ainsi qu’aux États-Unis.

« À ce jour, les droits constitutionnels de mon client – garantis par la Cour suprême – sont bafoués. L’histoire législative de l’article 250 nous renvoie à une ère de désapprobation morale, alors que notre Constitution devrait être considérée comme un instrument embrassant le progrès de notre société. La stigmatisation inutile des homosexuels doit cesser. Cette affaire concerne le droit à l’amour. Il n’y a aujourd’hui pas de justification constitutionnelle de l’article 250 », dit encore Me Gavin Glover, Senior Counsel.

Pour sa part, Ridwan Ah Seek a laissé entendre qu’il est « heureux que cette affaire ait pu aller de l’avant », et qu’il garde espoir d’un dénouement positif. « Alors que les membres de notre communauté sont toujours confrontés à la discrimination quotidienne en raison de leur orientation sexuelle, la société mauricienne devient progressivement plus inclusive et prête à embrasser pleinement la diversité. Je crois fermement que la loi de notre pays devrait refléter notre temps, et le moment est venu de changer », déclare-t-il.

Il soutient dans sa démarche par le CAEC, qui est la plus grande et la plus ancienne organisation mauricienne de défense des droits des personnes LGBT. À la suite de l’audience de deux jours, Jean Daniel Wong, directeur du CAEC, déclare que c’est un moment historique pour la nation, qui a toujours placé l’égalité et la non-discrimination au cœur du tissu de la société. « Qui nous sommes et qui nous aimons ne devraient jamais être des motifs de discrimination ou encore d’abus. Il est temps que notre pays nous offre les mêmes protections juridiques et l’égalité devant la loi, comme tous les citoyens mauriciens. Nous sommes convaincus que notre société sera plus forte si Ridwan Ah Seek gagne son procès », avance-t-il.

Plus de 70 pays à travers le monde criminalisent encore les personnes LGBT. Si cette contestation constitutionnelle est couronnée de succès, Maurice rejoindrait d’autres nations africaines, telles que le Botswana, l’Afrique du Sud et les Seychelles, qui ont hardiment supprimé les dispositions obsolètes criminalisant l’époque coloniale de leurs livres de droit.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -