Pour la première fois hier, les employés du secteur privé ont été priés de ne pas se rendre au travail pour cause de pluies torrentielles. Jusqu’ici, le gouvernement prenait la décision pour les fonctionnaires et soumettait la demande à Business Mauritius de décider pour le secteur privé. Atma Shanto de la Fédération des Travailleurs Unis est d’avis que cela ne représente pas une avancée pour autant, surtout en période électorale. Seule une législation, dit-il, pourra assurer la protection des travailleurs.
Le communiqué de dimanche soir, invitant les employés du privé et du public à ne pas se rendre au travail le lendemain, a été une surprise pour beaucoup. Car généralement, une telle instruction s’applique surtout aux fonctionnaires. Les syndicats du privé avaient d’ailleurs dénoncé cette politique de deux poids, deux mesures à plusieurs reprises. La présente décision représente-t-elle une avancée ?
Pour Atma Shanto, il ne faudrait pas crier victoire trop tôt. « D’abord, j’apprécie la démarche de demander aux travailleurs du public et du privé de ne pas se rendre au travail, mais en l’absence d’une législation claire, rien n’est définitif. » Il est ainsi d’avis que la sécurité des travailleurs ne devrait pas rester entre les mains de Business Mauritius ou du gouvernement, qui prennent les décisions à leurs discrétions. « Il faut des règlements clairs et précis, comme c’est le cas pour les cyclones. Tout le monde sait qu’en classe 3, il n’y a pas de travail », préconise-t-il.
« Nous sommes actuellement en période électorale et que cela peut aussi avoir pesé lourd dans la décision. Si les autorités ont fait le choix d’appliquer une décision aujourd’hui pour le public et le privé, rien ne dit qu’elles en feront de même demain. Alors que s’il y avait une législation, ce serait pour tous les épisodes de pluies torrentielles. D’autant qu’avec le changement climatique, de telles conditions se reproduiront plus fréquemment », ajoute-t-il.
L’autre ambiguïté qui se pose, en l’absence de législation, c’est comment rémunérer ceux qui sont allés travailler hier. Outre les services essentiels, il y avait également les centres d’appels et les hôtels, entre autres, qui ont opéré normalement. En temps de cyclone, les employés sont payés le double de leurs rémunérations. Mais en l’absence de législation, une fois de plus, cela reste à la discrétion de l’employeur.
Atma Shanto est de fait d’avis que les autorités doivent veiller que ceux qui ont été au travail soient rémunérés correctement. « Ces personnes ont pris des risques en allant au travail, afin qu’il n’y ait pas de rupture dans le service. Il faut s’assurer qu’elles soient payées correctement et qu’il n’y ait pas d’abus », dit-il.
Dans la foulée, il dénonce certains employeurs, qui ont contraint leur personnel à venir travailler hier en dépit des instructions données la veille. « Il y a une grande compagnie du côté de Quartier-Militaire et une autre à Curepipe qui ont forcé les employés à venir travailler. Les autorités doivent mener une enquête et prendre des sanctions contre ceux qui ont fauté », fait-il ressortir.
Il plaide également pour des consultations au sujet de l’élaboration d’une loi protégeant les travailleurs en période de pluies torrentielles. « Le gouvernement a fait voter des lois en catimini dans le Finance Bill au détriment des travailleurs l’année dernière. Nous demandons que toute législation concernant le travail et le changement climatique soit faite en consultations afin de ne pas avoir de mauvaises surprises une nouvelle fois. »
Il déplore aussi que, souvent, la productivité et le profit passent avant la sécurité des travailleurs. « Seule une bonne législation pourra vraiment mettre un terme à ces pratiques », s’est-il appesanti.