Christian Lefèvre (président de Friends in Tourism) : « Notre stratégie marketing doit être impérativement repensée »

Mis à terre par la pandémie, le secteur touristique se redresse, mais pas suffisamment vite pour atteindre l’objectif des autorités. Pire, il se fait dépasser par d’autres concurrents de la région, où la destination Maurice a perdu sa place de leader. Une situation inquiétante pour le futur. Comment en est-on arrivé là ? Christian Lefèvre, Managing Director de Coquille Bonheur et président de Friends in Tourism, apporte quelques éléments de réponse.

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Maurice a perdu sa place de leader dans la région. Cela vous inquiète-t-il ?
Malheureusement, ce n’est plus une perception, mais une certitude qui frappe de plein fouet l’image de marque de notre industrie touristique, et cela depuis 2011, comme confirmé par le rapport du World Economic Forum, The Travel & Tourism Competitiveness Report 2013 – Reducing Barriers to Economic Growth and job Creation.
Cela fait un bail que nous demandons que notre stratégie marketing et notre offre touristique soient impérativement repensées. Cela fait un bail aussi que nous parlons du Rebranding, cet exercice tant essentiel. La destination a besoin d’une marque forte et distinctive pour se différencier d’une autre destination de même nature, c’est-à-dire les îles.

Les retours des clients nous alertent depuis quelques années, en pointant du doigt certaines structures, comme le service et les prestations, qui sont en baisse. Autre problème récurrent : l’incontournable connectivité aérienne, qui est un vrai sujet et qui impacte les ventes. Cette situation s’est aggravée par le manque de personnel dans les hôtels.

Pourquoi les Maldives font bien mieux que nous sur le plan des arrivées ?
Par leur flexibilité et leur accès aérien, les vols d’Emirates, d’Aeroflot, de Singapour, d’Etihad Airways, du Sri Lanka, des voies aériennes de Bangkok, de nombreuses autres compagnies aériennes, et un Office du tourisme innovateur et dynamique.
Le succès du tourisme des Maldives n’est pas dû au hasard. L’archipel s’impose comme une destination de vacances de luxe avec ses paysages magnifiques, sa biodiversité et la qualité de ses services. L’industrie touristique aux Maldives continue de croître et a largement dépassé Maurice en termes d’arrivées et de revenus.

Ces destinations progressent vite et semblent très proactives. Et nous parlonsmaintenant d’un nouveau concurrent pour Maurice, Zanzibar. Dites-nous en plus…
Zanzibar est certainement une nouvelle destination. Tout le monde en parle. Zanzibar, comme Maurice, est un pays tropical, avec des plages de sable blanc idylliques, entourées de récifs coralliens florissants, et une riche architecture. Maurice demeure plus attractive, sûre et sécurisée.

Néanmoins, Zanzibar est une destination d’Afrique qui attire de plus en plus les pays de la SADC. L’accès aérien se fait via un charter, ou sur les transporteurs IATA, Kenyan Airlines, Ethiopian Airlines, Fast Jet et Airlink via Dar es Salaam.

Depuis le reste du monde, il existe des compagnies aériennes régulières et de nombreux charters quotidiens. Zanzibar dispose en outre de 836 établissements hôteliers – allant du style boutique et des maisons d’hôtes jusqu’au luxe 5-étoiles. 455 hôtels sont enregistrés.
Ils disposent aussi de certaines grandes marques, comme Hilton, Melia, RUI, Marriott, Golden Tulip, Hyatt, Residence, Mantis, TUI et Bill Gates Property Mnemba. Les hôtels offrent toutes les commodités, ainsi qu’une variété de cuisines et d’activités à un prix inférieur à celui de Maurice.

Vous dites que la perte de compétitivité de Maurice date d’avant la pandémie. Que s’est-il passé et pourquoi rien n’a été fait depuis ?
Tout s’est appauvri dans ce secteur, construit sur l’opportunité tarifaire. Ce n’est pas en brassant du volume qu’e nous donnerons de la qualité. Le contenu du voyage dans son ensemble reste le même. C’est la manière de faire du tourisme qui a changé, et notre approche est largement dépassée.

La tendance, depuis une dizaine d’années, pointe vers le haut avec beaucoup plus d’attractivité vers le tourisme durable. Notre industrie n’a pas suivi et n’a pas connu de réel impact de transformation vers le partage des valeurs, qui correspond mieux à la vision du monde responsable. L’industrie du tourisme repose non seulement sur le bien-être des touristes, mais aussi sur le bien-être de l’environnement, de la communauté et de l’économie de la destination.

Le challenge du tourisme mauricien est clair : les grands axes de développement à venir seront certainement dans la nouvelle technologie, le développement de l’offre touristique communautaire, l’aménagement des sites touristiques, l’avenir du travail dans ce secteur, l’amélioration de la visibilité et de la compétitivité de la destination, les stratégies de vente et de marketing, le protocole sanitaire pour la santé, la sécurité et la durabilité, tout en gardant la flexibilité de s’adapter à toute éventualité.

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