C’est une véritable claque sonore – une énième serait-on tenté de dire – qu’a été administrée à la Gambling Regulatory Authority (GRA) du tandem Om Kumar Dabidin-Dev Bheekary par la Cour suprême. Dans un jugement rendu hier, les juges Aruna Devi Narain et Nicolas Oh San-Bellepeau, ont été très critiques à l’encontre de cette l’instance régulatrice, agissant « under the dictation or as a puppet of Government » en décidant de ne pas octroyer une licence de bookmaker On-Course pour les courses hippiques à Krishnamoorty Armoogum, qui en avait fait une demande. Et ce, sous prétexte que c’était une « Government Policy decision for a total ban on issue of new gaming and betting licenses ».
L’affaire remonte à septembre 2019 quand, suivant cette requête, la GRA lui répond par lettre que sa demande pour une licence de bookmaker On-Course (ndlR: au Champ de Mars) n’a pas été approuvée. « The Gambling Regulatory Board, at its last sitting, did not approve your application for a bookmaker’s license to conduct fixed odds betting on local races at the racecourse under section 44(2) of the GRA Act 2007 on the basis of Government Policy decision for a total ban on issue of new gaming and betting licenses. »
Non satisfait de cette décision, Krishnamoorty Armoogum avait logé une demande de révision judiciaire. Il trouvait que la décision de la GRA de ne pas lui octroyer cette licence était arbitraire, déraisonnable et irrationnelle d’autant que cette soi-disant politique gouvernementale de ne pas octroyer de nouvelles licences à ceux aspirant à opérer comme bookmakers n’a jamais été mise en oeuvre, voire n’existe pas. Si d’aventure cette politique existait, a argué le demandeur, elle était appliquée de manière arbitraire car deux licences On-Course ont été attribuées, à savoir Bheemsen Seetaram et MCK Racing Ltd, représentée par Marie Christiane Margaret Kwan Tat, le 26 février 2018 et le 24 octobre 2018 respectivement.
Pas une décision indépendante
Après avoir écouté les arguments des deux parties, les juges sont parvenus à la conclusion que la décision de la GRA de ne pas accéder à la demande ne peut tenir. Ils ont trouvé qu’en l’espèce, la GRA « a body corporate set up by statute to exercise important regulatory and licensing powers, has, in determining the application made by the applicant for an On-Course license, acted “under the dictation” or “as a puppet” of Government. » En d’autres mots, la GRA n’a pas fait usage de son jugement et n’a pas décidé en toute indépendance dans cette affaire. Au contraire, elle a appliqué, à tour de bras, pour ne pas dire aveuglément une soi-disant politique gouvernementale, ce qui est à l’encontre des principes de justice naturelle.
Il faut faire ressortir que ce n’est pas la première fois que la GRA se fait remonter les bretelles en Cour. Aruna Devi Narain et Nicolas Oh San-Bellepeau ont du reste regretté que l’instance régulatrice, visiblement indécrottable, n’a semble-t-il pas retenu la leçon dans les affaires l’ayant opposée à Stevenhills, Sportslepep et Automatic Systems Ltd en 2018. L’ancien Chef Juge, Keshoe Parsad Matadeen, avait qualifié la GRA de « mouthpiece of the government » alors que sous la loi, elle jouit d’une totale indépendance.
Une décision qui intrigue les juges
La décision de ne plus octroyer des licences aux personnes désireuses d’opérer comme bookmakers pour les courses, du moins son « reasonableness » intrigue les juges. Aruna Devi Narain et Nicolas Oh San-Bellepeau notent que la décision semble avoir été prise quelques mois, si ce n’est quelques semaines, après l’amendement à la loi pour l’octroi des licences On-Course seulement.
Or, selon les juges, la section 44(2) de la GRA Act qui prévoit l’octroi de licences On-Course, a toujours force de loi et n’a, semble-t-il, pas été abrogée ni en 2020 ni subséquemment. Ce qui laisse perplexe car ne cadrant pas avec la « Government Policy decision for a total ban on issue of new gaming and betting licenses ».