Le Domaine de Chazal, un site éco-touristique situé à Chamouny, est en train de connaître une reconversion après sa fermeture en 2021. Soutenue par l’Union Européenne, l’association Vélo Vert a décidé de lancer des pratiques agricoles durables au sein de cet espace vert, à travers son programme EMBEROI III, d’installer sa ferme d’expérimentation et d’accueillir, depuis février dernier, les premiers participants de la formation en agroécologie. D’autres activités qui feront du bien au corps et à l’esprit sont à prévoir dans une prochaine phase.
Des changements se sont opérés au Domaine de Chazal, sur les rives de la Rivière des Galets, dans le Sud, soit sur les hauteurs de Saint-Félix. Fermé temporairement depuis deux ans, il est loué à bail à l’association le Vélo Vert qui s’occupe de lui redonner une seconde vie. À part les bureaux qui ont pris un coup de neuf, la restauration d’autres surfaces désaffectées est également prévue : l’ancienne cuisine, le chalet, les lodges et le grand restaurant idéalement situé au bord d’un bassin. Au cœur de ce cadre vert qui apporte un sentiment de connexion à la nature, un espace Bien-être pourrait être aménagé, afin d’accueillir une clientèle touristique à la recherche de calme et de sérénité. Le lieu connaîtra, alors, un nouveau nom.
Pour le moment, au Domaine de Chazal où nature sauvage et authenticité cohabitent en toute harmonie, le Vélo Vert a déjà enclenché la 3e phase de son programme EMBEROI (Expansion en Maraîchage Biologique avec Expertise régionale Océan Indien) pour poser les bases pour une transition agroécologique à Maurice. L’espace est également consacrée à la production en maraîchage, à la ferme d’expérimentation, à la formation de ceux qui souhaitent faire évoluer leurs pratiques ou s’installer en agroécologie. On y retrouve également d’autres activités : l’agroforesterie, les techniques de compostage, la ferme animale et une petite serre pour les plantules. Le programme EMBEROI III est soutenu par l’Union Européenne.
Transmission de l’agroécologie
Puisque les agriculteurs, les grandes et petites exploitations recourent de plus en plus à toute une palette de pratiques agroécologiques, puisque le public souhaite savoir comment cultiver la terre pour lui permettre d’avoir accès à une nourriture saine, sans mettre en péril l’équilibre de la planète, l’Académie du Vélo Vert propose, à travers ses différents modules, de partager les principes de l’agroécologie, afin de découvrir les différents modèles d’agriculture durable et de définir un système agricole.
Cette année, l’Académie accueille une quinzaine de participants. Une fois la semaine, ils se retrouvent à la ferme d’expérimentation de Chamouny. L’espace est créé comme un modèle afin de montrer comment composer avec l’environnement. Une zone est consacrée à la production maraîchère (bananes, manioc, papayes, brèdes tompouce, patates douces) ainsi qu’un dispositif appelé hôtel à insectes, afin de faciliter la vie de ces derniers. Une autre zone est dédiée au compostage, le compost se produisant à travers la décomposition naturelle des déchets organiques (coco entières, branches, andain, crottin de cheval, fientes de poules, riches en azote).
Une autre zone est dédiée à l’agro-foresterie. Ici, pas besoin de pesticides. Les plantes se protègent mutuellement des ravageurs. Comme cette petite parcelle de terre qui a été préparée pour accueillir carottes, laitue, brèdes qui commencent déjà à germer. Du paillage a été installé entre les parcelles pour empêcher que l’herbe ne pousse. Afin d’assurer la production maraîchère, une bande fleurie a été installée près de la clôture. « Le choix des fleurs permet soit de repousser certains ravageurs, insectes, animaux, ou alors permet de les capter. Les fleurs attirent les abeillles et cela permet de polliniser. Cela rend des services. L’idée est vraiment de développer des haies de protection tout autour, car cela permet de freiner les attaques de ravageurs, de garder un peu de fraîcheur. Certains ont des effets bénéfiques dans le sol », expose Bruno Dubarry, président de Vélo Vert.
Contrairement au bio, l’agroécologie peut se passer des normes. Elle n’est pas régie par un cahier des charges rigide. « Dans le bio, il y a beaucoup d’interdits et de choses qui peuvent figer, alors que dans l’agroécologie, on poursuit le même objectif mais on va un peu plus loin et, du coup, on est moins rigide. C’est plutôt vouloir montrer comment on transitionne pendant un certain temps. On abandonne des pratiques pour mettre en place d’autres et c’est ça la clé. Parce que dans un endroit plutôt aride, on va privilégier telle culture, le bio ne se poserait pas trop ces questions-là. Il va dire je suis dans un endroit aride ou pas aride, voilà les produits que je peux utiliser pour booster ma production des produits bio. Cela reste des produits, ça ne règle pas les problèmes de fertilité du sol. C’est toujours un coût dans la production et comment après à la fin dans le contexte économique où on est aujourd’hui, on arrive à faire face à une augmentation des coûts, une baisse du pouvoir d’achat au niveau des ménages et des entreprises. Donc comment on arrive à récupérer cet investissement ? L’agroécologie propose de faire la même qualité de produits, voire mieux, par contre avec un grand différentiel de prix. Il faut du volume, il faut que ça soit accessible, il faut être dans la régularité. On est en plein dans cette partie structuration où on vient même proposer des outils. On lancera l’année prochaine une application mobile avec le sponsoring de la MCB, afin de permettre aux producteurs de vendre directement aux consommateurs », explique l’ex-CEO de l’Association des manufacturiers mauriciens (AMM).
Agir dans le respect de la nature
Par ailleurs, des projets d’agroforesterie (développer des arbres fruitiers) sont également prévus dans cet espace de cinq hectares qui abrite des zones forestières, des animaux sauvages et une ferme animale accueillant une quinzaine de cabris et une quarantaine de poules. Le projet consiste à associer, petit à petit, les activités de maraîchage et d’agroforesterie. « L’agroécologie a une approche intégrée de la partie végétale et animale. C’est un tout. Les poules viendront manger ce qu’on ne récolte pas, de même que les cabris fertiliseront les sols directement. Ils attirent certains insectes, ils en chassent d’autres. Il y a tout un cycle naturel. Cette partie animale n’était pas dans le projet. C’est maintenant qu’on commence à rédiger cette page d’après ce qui est l’élevage adapté à l’agroécologie », affirme Bruno Dubarry.