La délégation de haut niveau dirigée par le Premier ministre adjoint, Paul Bérenger, qui est rentrée à Maurice vendredi après une visite intense de deux jours, a insufflé un sentiment d’espoir chez les Agaléens. « Nous espérons qu’à partir de maintenant tous les travaux vont pouvoir démarrer. Nous plaçons un grand espoir dans cette mission qui a constaté de visu la situation critique dans laquelle se trouve Agalega et attendons avec impatience l’équipe technique du gouvernement qui devrait faire un rapport sur la situation dans l’archipel », affirme le Resident Manager, Emmanuel Jasmin.
Emmanuel Jasmin, malgré les moyens limités dont dispose l’administration, a été au four et au moulin aux côtés de Toolsi Loderchand du PMO et de l’équipe de Sébastien Lamy, de l’OIDC pour faire de cette visite un succès. L’aide de la compagnie indienne présente dans l’île a constitué un apport crucial. Les locaux construits dans la zone protégée où vivent les hauts cadres de l’équipe technique indienne ont été utilisés pour héberger les membres de la délégation et les techniciens. Le transport à l’intérieur de l’île a également été assuré par les chauffeurs et les véhicules mis à la disposition de l’administration par la compagnie indienne. Le Catering était toutefois assuré par une équipe d’Agaléennes très dévouée dans un local appartenant aux Indiens.
Le vol à destination d’Agalega d’une durée de deux heures et trente minutes s’est déroulé dans aucun problème. Mais à l’approche de l’archipel, la vision des îles à partir de l’appareil provoqua une agitation immédiate. Deux bandes de terre verte au beau milieu d’une mer bleue. À ce spectacle s’offraient des bandes de poissons.
Au fur et à mesure, le spectacle se précise sous la forme de cocoteraies ayant perdu leurs feuilles, couvrant les deux îles. Des premiers signes de désolation. Le commandant a choisi d’atterrir à partir de la partie Nord de l’île afin d’éviter des vents contraires. Un amas de ferrailles se trouvant à côté d’un hangar dans le terminal suscite des questions. Ce sont les restes de ce qui était un hangar ouvert et qui s’est effondré lors du passage du cyclone. Les dommages causés aux toitures de plusieurs bâtiments sont nettement visibles.
Aussitôt l’atterrissage de l’ATR après l’accueil des personnalités par le Emmanuel Jasmin, la visite démarre sur les chapeaux de roues. Le Premier ministre adjoint et les autres ministres sont embarqués à bord des véhicules présents pour se diriger vers la tour de contrôle où les attendaient les opérateurs indiens.
Les responsables présents font comprendre aux journalistes qui n’étaient pas prévus qu’ils suivent la délégation pour des raisons de sécurité. Paul Bérenger, selon ses propres aveux, a piqué une colère pour intimer les responsables de venir récupérer d’urgence les journalistes afin de voir de près.
60 atterrissages enregistrés à Agalega
Le responsable de la tour de contrôle a expliqué qu’aucun appareil ne pouvait atterrir sans l’autorisation de la tour de contrôle de Maurice. De plus, depuis son inauguration 60 dessertes ont été assurées par les appareils d’Air Mauritius et trois par des appareils indiens, dont un Boeing 330. À côté de la tour de contrôle se trouve une station de sapeurs-pompiers où 19 pompiers sont basés en permanence et disposent de camions sophistiqués qui n’ont pas encore été utilisés jusqu’ici.
Le terminal aéroportuaire est pour le moment qu’une salle vide avec une table pour enregistrer l’arrivée des passagers. Emmanuel Jasmin explique au Premier ministre que cette salle avait accueilli une centaine de personnes lors du passage de Chido, vu que le centre de refuge avait été pris d’assaut. Il raconte que les vents étaient si violents que des hommes forts ont dû déployer toutes leurs forces pour maintenir les portes fermées durant la nuit.
L’anémomètre des services météorologiques avait été mis hors d’usage à partir des rafales de 140 km/h. Selon les informations enregistrées par un remorqueur, les rafales les plus fortes enregistrées ont été de l’ordre de 308 km/h.
L’après-midi a débuté avec la visite de la jetée à La-Fourche. Vue de loin, l’installation paraît banale. Ce qui est loin d’être le cas. La jetée est longue de 350 mètres et de quelque 35 mètres de large. Elle peut accueillir simultanément deux gros navires et un petit navire. Elle dispose également d’une rampe pour le débarquement de gros appareils.
Paul Bérenger a voulu voir de près l’endroit où l’accident de MV Trochetia avait eu lieu. Il se trouve qu’alors que le navire avait accosté, la mer était extrêmement houleuse au point où l’eau avait couvert la jetée. Les chaînes des bouées qui empêchent les navires à toucher la jetée étaient rompues. L’ancre du navire s’était détachée de l’endroit où elle était attachée. C’est au moment où le navire cherchait à s’éloigner de la jetée qu’il l’a heurtée, causant des dommages à sa coque. Il a apporté un démenti, par la suite, aux rumeurs selon lesquelles ce sont les opérateurs indiens qui étaient responsables de l’accident.
La délégation a ensuite visité le Desalination Plant et le Sewerage Treatment Plant. Ces infrastructures ont été installées par la compagnie AFCON pour les besoins des travailleurs indiens lors de la construction de la piste d’atterrissage et de la jetée. Elles sont en mesure de desservir toute la population de l’île estimée à quelque 370 personnes.
Ces installations ainsi qu’une partie de logements utilisés par les travailleurs indiens ont été vendus au gouvernement pour un montant estimé à Rs 64 millions. Paul Bérenger a déploré que cette acquisition ait été faite par l’ancien gouvernement sans assurer qu’il disposait des techniciens pour maintenir leur entretien.
L’ile du Sud : un sentiment d’isolation
La rencontre avec les habitants d’Agalega dans le village 25 a été franche et honnête. Le Deputy Prime Minister a expliqué les difficultés que le gouvernement rencontre à Maurice pour redresser le pays. Il a ajouté ne pas vouloir faire de grande promesse. Il a annoncé que l’OIDC Act et l’Agalega Island Council Act seront amendées. Il a souhaité qu’à long terme, Agalega puisse disposer d’un parlement régional comme c’est le cas à Rodrigues.
Les intervenants agaléens n’ont pas hérité pour évoquer les problèmes rencontrés au niveau du logement, de l’éducation, de la santé, de la desserte maritime entre Maurice et Agalega, de l’entreposage des marchandises. Une mère de famille s’est appesantie sur les problèmes rencontrés par les élèves de l’île du Sud pour se rendre à l’école dans l’île du Nord.
L’administration ne dispose pas de bateau pour assurer cette liaison et c’est un bateau privé qui le fait et c’est nettement insuffisant. Il a aussi été question de la libre circulation des Agaléens dans l’île.
Le vendredi matin a été réservé à l’île du Sud (Galega). La visite devait initialement durer deux heures, mais a été ramenée à 30 minutes afin d’éviter la marée basse qui aurait retenu les visiteurs plus longtemps que prévu sur les lieux.
La visite s’est déroulée à pas de course. Steeve Clarisse, Resident Manager de l’île du Sud, explique que la population se sent abandonnée. Il a fait état de la nécessité d’avoir un entrepôt et un centre de refuge. L’actuel entrepôt endommagé par Chido est actuellement inutilisable. Il réclame des cours en ligne pour les étudiants qui ne peuvent se rendre dans le Nord lorsque la marée est basse.
Une autre habitante a déploré le départ forcé de l’infirmière et réclame son retour. Une jeune fille a souhaité avoir un emploi à la fin de ses études. Un homme amputé de deux jambes déplore qu’il a dû faire le déplacement à Maurice pour justifier qu’il est qualifié pour obtenir une pension.
Les Agaléens apparaissent comme les enfants pauvres de la république alors que l’archipel dispose d’un potentiel de développement considérable pour l’industrie de la pêche et le secteur touristique, entre autres.
« L’heure est à la reconstruction dans tous les domaines. Les problèmes qui existaient déjà ont été accentués par le passage de Chido », affirme Emmanuel Jasmin.