L’attente a été longue, mais à la hauteur. Pallavee Appigadoo, jeune Mauricienne de 25 ans, a finalement posé le Cessna 172, un monomoteur de quatre places, sur le tarmac du Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport hier en début d’après-midi, comme prévu ! « Wi, mo rev inn realize ! Me momem, pou lemoman, mo pankor konpran ki pe arive… » Ce sont ses premiers mots, après les embrassades et accolades avec plusieurs groupes de fans et d’internautes qui l’ont suivie depuis que Pallavee Appigadoo a lancé son projet via les réseaux sociaux. « J’ai encore la tête dans les nuages, c’est vrai. Je suis consciente que j’ai pu réaliser mon projet, qui me tient tellement à cœur. Et j’ai déjà en tête mon prochain projet : le tour du monde, et toujours dans un petit avion ! »
La pilote professionnelle qui vit à Pretoria, en Afrique du Sud, et son ami, pilote comme elle, Dylan Nolan, ont embarqué de Lanseria, Pretoria, le mercredi 18 septembre, pour entreprendre le challenge imaginé par la Mauricienne, Flying in the Face of Adversity, soit de relier l’Afrique du Sud à Maurice en 25 heures en traversant le Canal de Mozambique. Le petit Rayhaan, 10 ans, s’est, pour l’occasion, habillé en pilote… à l’instar de son idole, Pallavee. Le garçonnet et ses parents, Bilall Mira et Fatima Peeroo, ont tenu à être présents ce dimanche à Plaisance, et ont attendu des heures pour enfin voir, prendre dans leurs bras, discuter et faire des photos avec Pallavee Appigadoo et Dylan Nolan.
« Nou pe swiv li depi ki linn koumans poste so proze lor rezo sosio… Nous lui avons envoyé des sous via la compagnie de Bilal, Moto Facile Co Ltd, et c’est tout naturellement que, ce matin, nous avons pris la route pour venir attendre et accueillir Pallavee ! » déclare Fatyima Peeroo. Bilal Mira ajoute : « J’ai moi-même toujours rêvé d’être pilote. Mais je n’ai pas eu cette opportunité. C’est de mon devoir de soutenir une jeune qui entretient ce rêve. Et maintenant, nous allons nous concentrer sur Rayhaan et lui donner cette occasion. »
Autour de Pallavee Appigadoo, outre les fans venus la rencontrer en chair et en os, se trouvent des membres de la Society for Children Inoperable in Mauritius (SACIM), dont le Dr François Leung, vice-président de l’association. Dylan Nolan, le pilote qui a accompagné la jeune Mauricienne dans son aventure, est tout aussi joyeux : « We have made it! Nous aurons besoin de quelques jours pour décompresser et vraiment prendre la mesure de ce qui nous arrive. Je crois savoir que personne avant Pallavee n’a tenté cette traversée… Cette expédition est vraiment inédite. »
Les deux amis partagent un moment de complicité : « Dylan a été la première personne à qui j’ai parlé de ce projet. Il m’a écoutée attentivement, puis m’a dit que j’étais “crazy” ! » déclare la jeune femme. « Yes, but I added good crazy! » renchérit le jeune homme.
Daisy et Mahen Appigadoo ont encore les yeux embués. C’est Vijen Appigadoo, oncle de la jeune Mauricienne, qui a injecté Rs 100 000 dans le projet de sa nièce. Il résume : « Kan nou’nn trouv so avion pe koumans aterir, larm inn koumans koule… pa kapav arete. »
Les émotions étaient fortes ! « Nous étions conscients des dangers auxquels elle s’est exposée pour ce challenge. Mais Pallavee est ainsi depuis son enfance. D’ailleurs, c’est le sang qui coule dans nos veines. Nous sommes tous des bosseurs dans ma famille. J’ai une pensée spéciale pour mon père, Ramlo. Il adorait Pallavee et a mis son terrain en gages pour financer ses études. Nous l’avons perdu, ainsi que ma maman, Padma, il y a quelques mois. Ma sœur Sweety, également, est décédée. Elle était la tante préférée de ma fille aînée. Sinon, ils devraient être tous à nos côtés… Ces absences nous marquent beaucoup. »
Le jeune frère de Pallavee, Neel, n’a d’yeux que pour son aînée. « Ces deux-là sont inséparables ! Ena zour Pallavee kapav pa koz ek mwa. Me zame pena enn zour ki li pa koz ek so frer », confie Daisy, la maman.
Pallavee Appigadoo explique d’ailleurs qu’elle se faisait une « énorme joie, pendant les prochains jours que je vais être ici, de les emmener, voler avec moi ». Ajoutant : « C’est trop triste que tante Sweety, grand-père Ramlo et grand-mère Padma ne soient plus là… » La jeune femme compte cependant d’abord reprendre ses esprits. « Nous devons nous reposer et prendre la mesure de ce que nous avons réalisé, Dylan et moi. Ensuite, passer le plus de temps possible avec mes parents, voler avec eux, dans notre avion, jusqu’à Rodrigues, La Réunion. »
La fête a continué sur le parking de cette partie de l’aéroport de Plaisance, où fans, internautes, amis, proches et parents de Pallavee Appigadoo se sont réunis. Un après-midi qui restera certainement gravé dans les mémoires.
SACIM : « Pallavee est devenue un modèle pour tous ! »
Le Dr François Leung, pédiatre et vice-président de la SACIM, déclare à propos de la jeune femme : « Je suis Pallavee depuis sa plus tendre enfance. J’ai été son pédiatre. Puis, au niveau de la SACIM, dont je suis membre, je l’ai suivie quand nous l’avons prise en mains et envoyée pour des soins en Inde. Tant pour ses ennuis du côté du cœur, avec la malformation congénitale, et que ce soit pour la scoliose, nous avons eu en Pallavee une battante, une jeune qui n’a jamais baissé les bras. Et aujourd’hui, elle l’a prouvé avec courage en réalisant ce fameux challenge ! Elle devient un modèle pour beaucoup d’entre nous. »
Neena Ramdenee, ancienne présidente de la SACIM, abonde dans le même sens : « À la SACIM, nous voulons que chaque enfant ait sa chance de briller. Ce que Pallavee a fait aujourd’hui est immense. Nous avons d’autres encore, comme l’actuel président, qui est un avocat et ancien bénéficiaire de la SACIM. » Les deux responsables résument : « C’est notre devoir et c’est avec le cœur que nous venons en aide aux enfants. » Neena Ramdenee souligne de plus : « Pallavee est la première femme à avoir tenté ce challenge. J’ai appris que cette traversée qu’elle et Dylan ont réalisée est inédite. Voilà encore une belle source d’inspiration ! »
Pallavee Appigadoo a souhaité, par le biais de son challenge, Flying in the Face of Adversity, lever des fonds pour venir en aide à la SACIM, qui « a changé ma vie et m’a donné les moyens de réaliser mon rêve le plus fou ». Aussi, dit-elle, « le moins que je puisse faire, c’est give back ! ».