Le conseil de district de Rivière-du-Rempart et Alphamix ayant refusé de mettre fin à ce litige, une nouvelle bataille légale se profile à l’horizon
Les juges Teelock et Kwok ont conclu que le juge qui agissait comme arbitre dans cette affaire avait rendu la sentence arbitrale alors qu’il était functus officio (hors mandat)
Le conseil de district de Rivière-du-Rempart demandait à la Cour suprême d’annuler la sentence arbitrale rendue le 31 décembre 2018, ordonnant au conseil de payer des dommages de plus de Rs 437 millions. Le conseil affirme cependant que cette décision a été rendue en dehors du délai, alors que le juge n’avait plus le mandat d’arbitre dans cette affaire. Dans un jugement rendu hier, les juges Rita Teelock et Véronique Kwok ont déclaré Null & Void la sentence, car le juge Benjamin Marie-Joseph, qui agissait comme arbitre dans cette affaire, avait rendu la sentence arbitrale alors qu’il était Functus Officio (hors mandat). Les deux parties n’ont toutefois pas accédé à la demande des juges pour mettre fin à ce litige et comptent engager une nouvelle bataille légale.
Pour le conseil de district de Rivière-du-Rempart, cette sentence n’avait aucune valeur. La bataille juridique entre la compagnie Alphamix, qui avait entamé des actions judiciaires contre le conseil de district, dure depuis plus de cinq ans. Le conseil demandait l’annulation de cette sentence arbitrale rendue par le juge Benjamin Marie-Joseph, arguant qu’elle ne pouvait être considérée comme valide puisque le juge ayant arbitré le litige autour du contrat du marché de Rivière-du-Rempart avait rendu sa décision en dehors du délai de l’arbitrage.
Le jugement avait été prononcé le 31 décembre 2018 et le conseil avait fait ressortir qu’une copie non signée lui avait été envoyée le même jour par e-mail, alors que la version signée et écrite n’était disponible que le 3 janvier 2019. Or, selon le code de procédure civile, pour qu’une sentence arbitrale soit valable, la signature de l’arbitre est impérative. Aussi, la version signée étant arrivée trois jours après, le conseil de District de Rivière-du-Rempart insistait sur le fait que le mandat de l’arbitre a pris fin le 31 janvier 2018 à minuit et que toute démarche après cette date soit par conséquent être considérée comme Functus Officio.
Dans son affidavit, Alphamix soutenait que ce jour-là, le juge en question avait convoqué les parties concernées dans son bureau pour leur faire part du fait qu’il souffrait d’une sévère grippe. « Le juge nous avait demandé de revenir vers midi le même jour pour prendre connaissance de sa décision. C’est finalement vers 13h30 qu’il l’a rendue. Le juge avait pris l’engagement de leur fournir une copie de la sentence arbitrale dès qu’il reprendrait le travail », souligne Alphamix dans son affidavit.
Les juges Rita Teelock et Véronique Kwok ont retenu ces arguments, concluant que « the arbitrator thus did not act as per his mandate » et a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée « as provided by article 1027 – 3(3) of the Code de Procédure Civile ». Avant de poursuivre : « Indeed, the mission of the arbitrator was to deliver an award containing all the proper wording and more importantly his signature on 31 December 2018. On 3 January 2019, the arbitrator was not entitled to act as arbitrator and to deliver any award. »
Le litige entre le Conseil de district de Rivière-du-Rempart et la compagnie Alphamix Ltd a pour toile de fond la construction du marché de Rivière-du-Rempart. Le 6 février 2003, Alphamix Ltd avait décroché le contrat. Coût estimé des travaux : Rs 22 millions. Toutefois, plusieurs litiges ont opposé les différentes parties, qui s’en remettront à un arbitrage. Un premier arbitre, en la personne du Senior Magistrate de la Cour intermédiaire, Denis Vellien, avait été nommé le 13 mai 2009 et avait prononcé trois sentences arbitrales interlocutoires. Cependant, Denis Vellien a démissionné en 2014. C’est ainsi que le juge Benjamin Marie-Joseph avait été nommé le 13 février 2015 pour se pencher sur ce différend.