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POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE : La NEC sort ses griffes !

Trois semaines après sa mise en place suite à la grève de la faim entamée par Jeff Lingaya pour protester contre les centrales thermiques à charbon, la National Energy Commission, présidée par Dev Manraj, Senior Adviser au Prime Minister’s Office, sort ses griffes. Le premier organisme à faire les frais de cette affirmation n’a été autre que le Central Electricity Board (CEB), qui avait présenté officiellement mardi son Integrated Energy Plan 2013/2022 avec comme principale proposition la mise en opération de trois nouvelles centrales thermiques à charbon de 200 MW, dont CT Power à Pointe-aux-Caves, dans l’Ouest de l’île. A partir de la semaine prochaine, les membres de la commission Manraj trancheront dans le vif du sujet avec la première convocation des promoteurs du projet de CT Power pour une présentation des grandes lignes de la réalisation de cette centrale, qui suscite passions et controverses depuis au moins ces cinq dernières années.
A ce stade, le CEB, qui croyait pouvoir frapper un grand coup avec le document de 178 pages, élaborant sur la politique énergétique du pays pour les dix prochaines années, comprenant des investissements annoncés de Rs 18 milliards, s’est vu administrer une véritable douche froide lors de la réunion de la National Energy Commission de mardi dernier. D’entrée de jeu, les représentants de la Platform Sitoyen sont montés au créneau pour dénoncer cette tentative de by-passing de la Commission, dont le principal mandat attribué par le Conseil des ministres est d’étudier les différentes options de la politique énergétique et de faire des recommandations au gouvernement.
Rashid Imrith, président de la Fédération des Syndicats du Secteur Public (FSSP), s’est élevé contre le fait que la National Energy Commission se retrouvait devant un fait accompli avec la publication de l’Integrated Energy Plan du CEB. Il a laissé entendre que de par les attributions la démarche du CEB était des plus inacceptables avec des propositions pour trois centrales thermiques à charbon dans la région Ouest de l’île, dotées du double de la capacité de CT Power, à être mises en opération dans un très court délai et sans aucune consultation préalable.
Du côté du CEB, la réplique à l’effet que le plan intégré pour les dix prochaines années était en préparatif en vue de remplacer le précédent devenu caduc n’a nullement convaincu les membres de la commission. D’autres sources affirment que la direction générale du CEB aurait été mal inspirée d’antagoniser la National Energy Commission dans une conjoncture de haute tension et aussi délicate en matière de planification énergétique.
La réaction a été des plus virulentes avec le secrétariat de la NEC appelé à émettre un communiqué ce même mardi après-midi pour souligner que « the National Energy Commission has taken note that the Integrated Electricity Pkan 2013 – 2022 has been released by the Central Electricity Board today. In accordance with its mandate, the Commission will examine the contents of the Plan and consequently advise government thereon ».
Cette première manche remportée par Platform Sitoyen aux dépens du CEB ne devrait constituer nullement un désaveu pour les représentants de cette dernière institution. En effet, ils se préparent déjà à se rattraper sur le plan technique avec le démarrage des auditions par la Commission Manraj dès jeudi prochain. Outre les promoteurs de CT Power, la Top Management Team du CEB a été informée de se tenir prête pour une présentation prochaine des grandes lignes de ce schéma directeur d’électricité pour les dix ans à venir.
Les quatre points cardinaux de l’Integrated Energy Plan, la seconde de la série, sont d’optimiser l’exploitation du réseau électrique en opération, de maintenir les tarifs d’électricité les plus bas possibles avec l’adoption d’une approche de Least-Cost Expansion, d’encourager les consommateurs à être partie prenant au Demand-Side Management, soit un programme d’économie d’énergie électrique et à faire de l’espace pour des investissements du secteur privé dans le secteur de l’énergie. Par rapport à ce dernier aspect, le CEB, qui a évalué les investissements nécessaires pour les projets futurs à Rs 18 milliards, mise sur une participation financière du privé à hauteur de Rs 13 milliards (70%) à court terme.
Les prévisions établies par le CEB indiquent que la consommation d’énergie électrique passera de 2 673 GWh cette année à 3 519 GWH en 2022 avec « the resultant peak power demand forecast to grow at a steady rate of 2,9% per annum. » La moyenne de croissance annuelle de 2011 à 2022 est estimée à 3,43%, soit 3,01% annuellement pour les abonnés domestiques, 4,31% par an dans le secteur commercial, 2,81% pour la filière industrielle et 2,8% pour les autres. Avec ce scénario global et en vue de satisfaire la demande, le CEB devra mettre en place une capacité additionnelle de 200 MW, soit les 100 MW de CT Power et les deux autres de 50 MW chacune dans les régions avoisinantes d’Albion.
L’Integrated Energy Plan fait une analyse détaillée de la demande en énergie électrique dans les principales catégories d’abonnés comme suit :
Consommation domestique : la vente de courant électrique dans le circuit résidentiel, qui représente actuellement 32% des opérations commerciales du CEB, ne devrait pas subir d’importants changements dans les années à venir. Le taux de croissance annuelle devrait être de l’ordre de 3,01% annuellement alors qu’avec un éventuel High Scenario, le secteur domestique pourrait consommer jusqu’à 1 285 GWh en 2022, soit un peu moins du double qu’en 2011.
Secteur commercial : au cours des dix dernières années, le pourcentage des ventes d’électricité à ce secteur a progressé de 27% en 2000 à 36% en 2011, générant des changements majeurs dans le pattern de consommation. « The growth in total demand, partly fuelled by commercial activities, has resulted in important changes in the overall system demand profile, where the peak demand occurring during the day is now almost of the same magnitude as that of the evening peak », craint le CEB.
Avec les développements dans l’économie domestique, en l’occurrence l’importance du secteur commercial, incluant des activités de l’industrie touristique, de l’ICT, des services financiers et autres entités non-manufacturières, la tendance dans la consommation d’énergie électrique sera à la hausse, soit variant entre un minimum de croissance de 1,8% pour la catégorie des Medium and Large Domestic-Market Firms à 7,8% pour celle des Medium and Large International-Market Focused Firms.
Secteur industriel : « With 33% of the total electricity sales in the year 2000, the industrial category was indeed the most energy intensive sector », note le plan du CEB, qui fait ressortir que la part de la filière industrielle est descendue à 30% en 2011.
Les prévisions pour les dix prochaines années ne sont guère brillantes en raison de la morosité notée au niveau des investissements dans ce secteur économique. « Unless the sector undergoes major changes, the relative demand of the sector will be further lowered to 28% of the total electricity sales by the end of the planning period », souligne le plan. Ces prévisions ne tiennent pas compte du fait qu’à partir de 2015 devra intervenir le Phasing Out des arrangements sous l’Africa Growth Opportunity Act (AGOA) et des ajustements à la baisse sont à prévoir.
Le taux de croissance dans la demande d’énergie électrique devra être de 2,6% annuellement d’ici à 2022, soit nettement inférieur au taux historique de 3,6% annuellement. Néanmoins, avec une hypothétique relance économique, la croissance pourrait grimper à 3,35% par an.
Néanmoins, la principale difficulté qu’aura à affronter le CEB lors de la présentation de l’Integrated Energy Plan sera de justifier les hypotèses d’analyses, qualifiées de « généreuses ». Les membres de la National Energy Commision s’apprêtent à mettre à l’épreuve les paramètres et scénarios pris en compte par le CEB pour ses projections.
La Platform Sitoyen a déjà signifié son intention de remettre en question les analyses chiffrées du CEB en matière de demande d’énergie électrique pour les années à venir. Dans une première communication devant la commission Manraj, Yan Hookoomsing de CARES et au nom de la plate-forme, a soutenu que « it is worth noting that CEB’s forecasts of annual peak demands (MW) and energy (GWh) were persistently higher – by up to 14% of actual values ». Pour étayer ses dires, le représentant de Platform Sitoyen dresse une comparaison entre les prévisions dans l’Outline of Energy Policy 2007 – 2025 et la performance réalisée entre 2006 et 2012. Les projections de 382 MW en 2007, de 437 MW en 2010 ou encore de 456 MW en 2011 ne sont jamais matérialisées face à une croissance nettement inférieure enregistrée.
Au sein de la Platform Sitoyen, l’on dénonce l’alarmisme affiché par le CEB à ce chapitre et la psychose de Black-Out et l’on s’appesantit sur le fait que « there is no emergency. We can take the time to decide on our long-term sustainable energy future. We do not need CT Power and we need to move away from coal ».
Du côté du CEB, l’on se dit extrêmement conscient que la présentation et l’adoption de l’Integrated Energy Plan devant la National Energy Commission représentent un véritable Credibility Test à ne pas rater…

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