Mauriciens d’ailleurs : l’idylle seychelloise de la famille Jackson

Dans notre rubrique itinérante de Mauriciens d’ailleurs, nous racontons l’histoire de Mauriciens, voire de familles mauriciennes qui, de par leurs talents et leur persévérance, brillent à l’étranger. Cette semaine, nous rencontrons la famille Jackson, qui a vécu 16 ans chez nos amis seychellois. De retour à l’île Maurice il y a un mois, Bernard et Vanina Jackson nous racontent leur idylle seychelloise entre la capitale bouillonnante de Victoria et l’atoll chimérique d’Aldabra. Au-delà de leurs responsabilités professionnelles, les Jackson auront ainsi été les témoins, voire des acteurs privilégiés, de l’impressionnante évolution des Seychelles, que ce soit dans l’éducation avec l’École française des Seychelles ou dans le domaine de la protection environnementale grâce à la Seychelles Islands Foundation. Rencontre.

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En fait, cet entretien s’est déroulé en deux temps et en deux lieux différents. Nous avions rencontré Vanina Jackson aux Seychelles il y a quelques mois dans les locaux de Creole Travel Services à Victoria. Elle s’apprêtait alors à faire ses adieux en tant que Chief Finance Officer du groupe, un poste qu’elle a occupé pendant près de 10 ans, et nous partageait son amour pour cette île qui les a accueillis pendant toutes ces années. Bernard Jackson, son époux, nous l’avons rencontré à Port-Louis, il y a quelques jours. Il a occupé le poste de directeur général de la filiale seychelloise de la MCB de 2015 à 2024, avant de rentrer au pays il y a un mois pour occuper le poste de Head of Retail de la MCB. Si la famille Jackson, au parcours élogieux, vient de poser ses valises à Maurice, elle a derrière elle une belle histoire qui mérite d’être contée. Une success-story qui pourrait inspirer d’autres jeunes de la région indianocéanique.

Tout commence en 2008, lorsque Bernard Jackson obtient une offre des plus surprenantes. « J’étais en mission pour quelques jours aux Seychelles, et je dois vous avouer que j’ai eu un véritable coup de cœur pour cette île », nous dit d’emblée Bernard Jackson. D’une simplicité déconcertante, ce haut cadre au sourire facile a pourtant un impressionnant palmarès. Lorsque l’occasion se présente d’aller s’y installer, il décide d’en parler tout de suite à son épouse Vanina, qui était elle aussi cadre à la MCB. « Nous avons donc décidé de tout quitter ici pour aller vivre aux Seychelles », dit-il. Bernard Jackson nous confie d’ailleurs qu’ils venaient à peine de finir la construction de leur maison à Coromandel, et que malgré cela, ils avaient décidé de faire le pas. Un choix audacieux qui portera ses fruits sur le plan professionnel, mais aussi humain.

« Nous sommes arrivés à un moment assez sombre de l’histoire des Seychelles. C’est ce qu’ils appelaient la période “napa”, qui voulait dire qu’il n’y avait pas grand-chose. Les étagères étaient parfois vides dans les supermarchés », se souvient-il. Bernard et Vanina Jackson et leurs deux enfants parviennent tout de même à s’installer, charmés par l’île et par la débrouillardise de son peuple. L’acclimatation se fait lentement mais sûrement. « Il n’y avait pas vraiment de barrière linguistique, car le créole seychellois et le creole mauricien se ressemblent, à quelques détails près. D’ailleurs, c’était parfois source de rigolade avec nos amis seychellois », dit-il. Et il ajoute que leurs enfants parlent parfaitement le créole seychellois, au point même d’en avoir gardé l’accent chantant si distinctif de nos cousins les dalons…
Une fois installée, la famille Jackson avait besoin de bouger. Férus de randonnée — c’est la très dynamique Vanina Jackson qui nous l’avait confié lors de notre premier entretien —, ils ont escaladé quasiment toutes les montagnes des Seychelles et ont aussi… déplacé des montagnes, si l’on puit dire. En effet, au cours de ces 16 ans, le couple mauricien participe activement à la vie sociale des Seychelles en pleine évolution. « De par nos rôles respectifs, nous avons côtoyé plusieurs membres influents de la société seychelloise et j’ai gardé de très bonnes relations avec chacun. C’est un peu cela les Seychelles, tout est dans le contact humain », explique Bernard Jackson.

En outre, ils participent au développement de l’Ecole française des Seychelles, fondée il y a 40 ans par Annick Albert, elle-même d’origine mauricienne. Vanina et Bernard Jackson président chacun à leur tour le conseil d’administration de l’École et participent pleinement aux activités de l’établissement, qui accueille leurs trois enfants, notamment le benjamin, qui fait ses tout premiers pas aux Seychelles.

Très attachés à leur pays et aux valeurs familiales, les Jackson réunissent les Mauriciens de la diaspora et organisent des rencontres ponctuelles. Les deux dernières rencontres pour fêter l’indépendance mauricienne et l’amitié entre nos îles se sont tenues à Cap Lazare Nature Reserve, dont l’une en présence du président Wavel Ramkalawon. Ils ont aussi participé à l’organisation des Jeux des îles de 2011 qui se sont tenus aux Seychelles. « Nous avions réuni tous nos efforts pour cet événement, et pour cela, nous devons remercier la MCB, qui avait soutenu l’initiative à 100% », se souvient Bernard Jackson, ajoutant que c’était assez spécial, car ils devaient soutenir à la fois Maurice et les Seychelles.

« Nos deux îles ont beaucoup à apprendre l’une de l’autre », insiste Bernard Jackson, qui met l’accent sur les liens d’amitié solides entre les Seychelles et Maurice. « Nous y avons fait tellement de belles rencontres et nous avons surtout beaucoup grandi professionnellement », ajoute-t-il. Ainsi, un des domaines dont les Mauriciens pourraient apprendre de ses « zanmi » seychellois, serait sans doute celui de la protection de la biodiversité. En effet, en plus de ses casquettes de père de famille, de directeur de banque et autres, Bernard Jackson a aussi siégé sur le board de la Seychelles Island Foundation pendant de longues années. « Depuis que je suis enfant, j’ai toujours été fasciné par tout cet univers de la conservation, et aux Seychelles, j’ai eu la chance de rencontrer des gens passionnés, notamment des scientifiques du monde entier », dit-il.

La SIF s’occupe de deux sites classés par l’UNESCO, notamment la Vallée de Mai, sanctuaire des mythiques « coco fesse » seychellois et l’atoll d’Aldabra, refuge de tortues géantes de mer. « Ces deux sites sont rigoureusement protégés, et d’ailleurs, très peu de gens y ont accès pour préserver la biodiversité fragile qui s’y trouve. J’ai eu la chance inouïe de suivre l’évolution d’Aldabra et d’assister aux merveilles de la nature… » Il nous confie d’ailleurs que l’atoll a connu ces dernières années un boom de naissances de tortues géantes de mer ! C’est dire que parfois, l’homme doit savoir se mettre à l’écart.
Aujourd’hui, la petite famille reprend ses marques sur le sol mauricien. Si l’aînée et le cadet ont entamé leurs études supérieures en France, le benjamin, lui, reprendra l’école à Maurice. Vanina et Bernard Jackson gardent pour leur part un doux souvenir de leur idylle seychelloise et les adieux ont été, confient-ils, très émouvants.

« À l’occasion de mon départ et de l’introduction du nouveau directeur général de la MCB, le président Ramkalawon a reçu la délégation de la MCB à la State House et m’a remis un pin du drapeau seychellois. D’ailleurs, il m’a remis le sien, l’enlevant de sa veste pour me le donner… Cela m’a beaucoup touché », confie Bernard Jackson, en toute candeur. En tout cas, une chose est sûre : les Jackson auront laissé, à leur manière, leurs marques sur les Seychelles et les Seychelles sur eux.

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