Plus de 60 œuvres, des ateliers, des visites guidées: le Caudan Arts Centre abrite les oeuvres d’un des plus grands défenseurs du patrimoine créole jusqu’au 30 septembre 2024. Disparu en février 2023, Vaco Baissac fera l’objet d’une grande et spectaculaire rétrospective (la première depuis le décès du peintre) avec une proposition forte : rétablir l’importance de la nature, la femme et la langue créole dans son œuvre. « Vaco, Je peins la langue créole », explication de toiles.
Dans son île natale, où il a vécu et travaillé jusqu’à sa son dernier souffle, personne ne l’a oublié. Vaco (de son vrai nom Jacques Baissac, 1940-2023) a façonné Maurice comme Maurice a modelé sa palette. Ils ont fini par se confondre, sous le même ciel, au bord de la mer, au rythme des danseuses insulaires et à la poésie de la langue créole. La sélection des œuvres révèle un véritable patrimoine et un intérêt résolument contemporain (peintures, dessins, sculptures provenant de la collection du peintre et des collectionneurs privés, dont des pièces uniques).
Le public pourra voir des portraits, des porteuses d’eau, des scènes de la vie quotidienne, des symboles et comprendra vite que Vaco était un peintre créole dans l’âme et qu’il a puisé la majorité de son expression artistique dans l’histoire, la géographie, la langue et la vie de son île natale. D’où le terme « mauricianisme » pour dire la célébration du métissage dans son œuvre.
En 2010, Vaco évoquait la nostalgie de l’île lorsqu’il était en Afrique : « J`ai besoin des bruits, des odeurs de Maurice pour m’accompagner dans le mouvement quand je peins… » L’essentiel de son style et un mélange de couleurs fortes, un jeu sur les formes, des visages indifférenciés. Un style éclaté, multidimensionnel. Vaco associait aussi sa peinture au Kreol Morisien, élaborant une esthétique personnelle qui sous-tend son œuvre. Il y a dans cette œuvre l’alchimie picturale des vies ordinaires et la recherche artistique.
Isabelle Baissac, fille de Vaco disait : « My father always saw the beauty in everything: he had a very unique way of looking at the world and everything in it. Whether it was the landscapes, the fora or fauna or the people. He had a brightness about him that he shared with everyone through his art. In each of his pieces he shares with us a glimpse of the way he sees the world…»
Elle est rejointe par son frère Luc Baissac, qui évoque le patrimoine culturel dans l’oeuvre de son père : « It would have given my father a great pleasure to see all the island people celebrating the unique nature, their culture and heritage through the colours and shapes he created. His inspiraton lies in his passion for the qualites and abilites that we have in us. He saw that there are many qualites and beauty in Mauritius that must be celebrated…»
Chloé Mayotte, responsable des beaux-arts au Caudan Arts Centre, parle autant d’un parcours pédagogique que de la diffusion de la culture, au cœur de la mission du CAC : « C’est désormais une mission pour nous, au Caudan Arts Centre, de porter l’héritage de Vaco Baissac, un élément du patrimoine culturel. Le plus grand défi a été d’aller à la rencontre de Vaco, sans Vaco. Nous avons dû imaginer comment construire une rétrospective basée sur l’incroyable carrière d’un monument. Il y avait une chronologie à considérer, les principaux thèmes que Vaco privilégiait et les éléments déterminants de sa vie. Il y a dès lors eu tout un travail de rencontres, de recherches à dans les archives et la presse. Il fallait garder constamment en tête constamment l’essence même de ce projet : sa linportans pou nou zil, pou tou bann Morisien… »
Ashish Beesoondial aura le dernier mot dans cette appréhension de la culture comme une mosaïque de savoir-faire patrimoniaux : « Vaco’s philosophy captures the Mauritian’s spirit. Bien que nous soyons heureux d’accueillir des projets internationaux, la valorisation de nos talents locaux reste notre priorité. Vaco est un peintre emblématique de l’île Maurice. En tant que centre d’arts local, il est important que cette rétrospective soit vue par le maximum de personnes, que ce soit les enfants, les étudiants, les plus grands et le public en général. Vaco est un héritage culturel et il est de notre devoir de porter son travail et de s’assurer que les générations montantes aient accès à notre patrimoine culturel… »