Les sénateurs thaïlandais débutent mardi l’examen de la loi légalisant le mariage homosexuel qui pourrait entrer en vigueur dans les prochains mois, ce qui serait une législation pionnière en Asie du Sud-Est.
La session s’est ouverte vers 09h30 (02h30 GMT), selon des images retransmises en direct par la chaîne parlementaire.
La Thaïlande pourrait devenir d’ici la fin de l’année le premier pays de la région à autoriser l’union entre deux personnes de même sexe, et le troisième du continent, après Taïwan et le Népal.
La semaine dernière, les députés ont adopté à une large majorité le changement de législation, mais le dernier mot reviendra au roi Maha Vajiralongkorn, qui doit acter sa publication au journal officiel.
Les sénateurs, considérés comme proches des intérêts de l’establishment militaro-royaliste, doivent débattre mardi autour des grandes lignes de la législation proposée.
En cas d’accord, le texte sera envoyé en commission pour une étude plus détaillée, avant des éventuels deuxième et troisième votes — probablement pas avant juillet — qui entérineront l’accord final de la Chambre haute.
Celle-ci a également la possibilité de le renvoyer aux députés.
Le royaume bouddhique d’Asie du Sud-Est est réputé pour ses valeurs de tolérance, mais des lois jugées conservatrices continuent d’alimenter les discriminations vis-à-vis des couples homosexuels ou des personnes transgenres.
– « Inspiration » –
Après des décennies de lutte des militants LBGT+, le mariage pour tous suscite aujourd’hui l’adhésion des principaux partis politiques. Des sondages publiés dans les médias locaux témoignent aussi d’un vaste soutien de la population.
Jusqu’à récemment, Paulie Nataya Paomephan, gagnante du concours Miss Trans Thailand en 2023, n’imaginait pas que les personnes transgenres puissent se marier en Thaïlande.
« Je pense que c’est parce que les politiques doivent s’adapter au monde qui change », a-t-elle déclaré à l’AFP, en précisant qu’elle avait le projet de s’unir avec son petit-ami.
Des dizaines de couples LGBT+ sont prêts à franchir le pas, a renchéri l’activiste Ann Waaddao Chumaporn.
« Dès que la loi sera passée, ça va changer la société thaïlandaise (…) Cela va inspirer d’autres combats pour d’autres égalités », a-t-elle estimé.
La proposition adoptée par les députés vise à modifier les références aux « hommes », « femmes », « maris » et « épouses » dans la loi sur le mariage pour les remplacer par des termes non genrés.
Elle doit aussi conférer aux couples homosexuels les mêmes droits qu’aux couples hétérosexuels en matière d’adoption ou d’héritage.
– Renouvellement du Sénat –
Intronisé l’an dernier, le Premier ministre Srettha Thavisin a confirmé sa promesse de campagne de légaliser le mariage homosexuel, en dépit de la présence dans sa coalition décriée de partis pro-armée conservateurs.
Sur ce dossier, il a trouvé des alliés de circonstance au sein des réformistes Move Forward, le principal mouvement d’opposition qui défend une modernisation en profondeur du pays.
Le Sénat actuel est composé de 250 membres désignés par les généraux issus du coup d’Etat de 2014, en vertu d’une provision transitoire de la Constitution entrée en vigueur en 2017.
Le calendrier législatif est rendu incertain par le renouvellement de la Chambre haute qui prendra dans les prochaines semaines ou mois sa forme prévue dans la Constitution. Le nouveau Sénat sera composé de 200 membres issus de groupes sociaux et professionnels, élus par un collège restreint d’électeurs.
C’est la première fois que la légalisation du mariage homosexuel va aussi loin dans le système législatif thaïlandais, après l’échec de précedentes tentatives en raison de l’instabilité chronique de la vie politique locale, entre coups d’Etat et contestations populaires.
Mais si la Thaïlande s’apprête à autoriser l’union entre personnes du même sexe, la loi n’accorde pas de reconnaissance aux personnes transgenres ou non-binaires qui veulent faire modifier leur genre sur leurs papiers d’identité.