Chaussée éventrée, immeubles fissurés: le déplacement de magma sous la croûte terrestre a endommagé routes et bâtiments de cette ville de 4.000 habitants, située à 40 km au sud-ouest de Reykjavik et évacuée tôt samedi, a constaté un journaliste de l’AFP.
Ce déplacement du magma a provoqué des centaines de séismes au cours des derniers jours, ce qui pourrait être le signe précurseur d’une éruption volcanique.
Après de longues heures d’attente dans leur voiture, les habitants de Grindavik ont pu accéder pendant quelques minutes à leur logement pour emporter leurs biens, en présence de nombreux policiers et de la protection civile islandaise.
Dans leur voiture s’entassent meubles, décorations mais également animaux de compagnie et même un mouton.
« J’étais ici pour vider ma maison autant que possible et prendre l’essentiel. Quelque chose pour les enfants, des cadeaux de Noël », explique à l’AFP Jóhannes Daði Jóhannesson, 34 ans, à son retour de Grindavik.
« De nombreuses routes sont ravagées. C’est comme un labyrinthe qu’il faut traverser. Mais oui, on peut s’en sortir et arriver chez soi », ajoute t-il.
Ailleurs dans Grindavik, le responsable d’un grossiste en poissons est venu vider les frigos contenant pour plusieurs centaines de milliers d’euros de marchandises, selon le site du journal islandais Vísir.
Des employés d’un petit supermarché viennent inspecter leur magasin, où les secousses sismiques ont jeté à terre l’essentiel du rayon boissons.
« Deux personnes maximum par véhicule et nous demandons à chacun de rester le moins de temps possible », avait prévenu la protection civile dans un communiqué autorisant les habitants à retourner brièvement chez eux.
L’Islande, qui compte 33 systèmes volcaniques actifs, a déclaré l’état d’urgence vendredi et ordonné l’évacuation obligatoire de Grindavik tôt samedi. Des abris d’urgence et des centres d’aide ont été ouverts dans plusieurs villes voisines.
Le responsable de la protection civile et de la gestion des situations d’urgence en Islande, Vidir Reynisson, avait indiqué samedi à l’AFP que la fissure mesurait « environ 15 kilomètres », le long desquels une éruption pouvait se produire « n’importe où ».
Les autorités islandaises avaient déjà autorisé dimanche certains habitants à venir, sous escorte et pendant cinq minutes, récupérer quelques affaires.
« On est un peu désespérés, un peu tétanisés et tristes, en fait. Quand on pense au temps et à l’énergie qu’on a consacrés à la construction de notre maison, c’est triste », déclarait Hans Wierer, un habitant de cette ville située dans la péninsule de Reykjanes.
-Rare évacuation-
Même pour un territoire volcanique comme l’Islande, l’évacuation d’une ville est un événement rare, relèvent les spécialistes.
« La dernière évacuation d’une population importante en Islande a eu lieu il y a 50 ans, lors de l’éruption de 1973 sur l’île de Heimaey, au large de la côte sud de l’Islande », explique Dave McGarvie, volcanologue à l’université de Lancaster.
« Les habitants déplacés de Grindavík seront naturellement inquiets, car l’avenir de leur ville est très incertain », ajoute-t-il.
Depuis 2021, trois éruptions ont eu lieu sur la péninsule, en mars 2021, août 2022 et juillet 2023, toutes loin d’infrastructures ou zone peuplée.
Les volcanologues estiment que ce nouveau cycle d’activité accrue pourrait durer plusieurs décennies, voire plusieurs siècles.
Située dans l’Atlantique Nord, l’Islande chevauche la dorsale médio-atlantique, une fissure dans le plancher océanique qui sépare les plaques tectoniques eurasienne et nord-américaine.
En avril 2010, une éruption massive d’un autre volcan islandais, l’Eyjafjallajökull, dans le sud de l’île, a entraîné l’annulation de quelque 100.000 vols, laissant plus de 10 millions de voyageurs bloqués.
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