La cheffe de l’extrême droite française Marine Le Pen a subi un revers mardi devant la justice de l’UE, qui a confirmé qu’elle devait rembourser près de 300.000 euros au Parlement européen pour l’emploi douteux d’une assistante quand elle était eurodéputée.
« Je fais un pourvoi bien sûr », a rapidement réagi sur son compte Twitter la présidente du Rassemblement national (ex-Front National), critiquant un arrêt « ubuesque » dans cette affaire visée par ailleurs par une procédure judiciaire en France.
Le Tribunal de l’UE a rejeté sa demande d’annuler la décision de recouvrement prise par le Parlement européen fin 2016, soulignant qu’elle « n’a pas été en mesure de démontrer que son assistante assurait des tâches effectives pour elle ».
Mme Le Pen, qui a été eurodéputée de 2009 à 2017, « n’a pas fourni de preuve d’une activité quelconque (…) au titre de l’assistance parlementaire, ce qu’elle a d’ailleurs reconnu lors de l’audience », est-il également précisé dans l’arrêt.
L’ex-eurodéputée, qui dispose de deux mois pour faire un pourvoi devant la Cour de justice de l’UE, a rétorqué mardi sur Twitter avoir au contraire « versé au tribunal 655 pièces » prouvant cette activité.
« Le tribunal refuse d’en tenir compte au motif que j’aurais dû les fournir au Parlement européen, qui ne me les a pas demandées », assure-t-elle, tandis que son parti a fustigé « des violations caractérisées des droits de la défense ».
Retenues sur salaires
Le Tribunal de l’UE avait déjà rejeté l’an dernier la demande en référé de Mme Le Pen de suspendre les retenues sur son salaire d’eurodéputée, mises en place par le Parlement pour récupérer son dû dans cette affaire, estimé à 298.500 euros.
Marine Le Pen avait en effet vu son indemnité parlementaire et son indemnité de séjour amputées de moitié à partir de début 2017, des recouvrements qui avaient cessé de fait quand elle a quitté le Parlement européen au courant de l’année 2017.
Les retenues réalisées avant son départ ont permis de récupérer environ 60.000 euros, a indiqué à l’AFP une source parlementaire. Pour récupérer le reste, le Parlement européen compte sur les suites de la procédure en cours devant la justice française, dans laquelle il s’est porté partie civile.
Le recouvrement visé mardi porte sur l’emploi de Catherine Griset en tant qu’assistante parlementaire de fin 2010 à début 2016. Le Parlement européen réclame également environ 40.000 euros à Mme Le Pen dans une affaire similaire, concernant l’emploi d’un garde du corps comme assistant.
S’appuyant sur une enquête de l’Olaf, l’Office antifraude de l’UE, le Parlement avait estimé que Mme Le Pen lui devait au total environ 340.000 euros.
Marine Le Pen n’est pas la seule membre de l’ex-FN à avoir été visée par des procédures de recouvrement pour des emplois d’assistants considérés comme fictifs par le Parlement européen.
Le Tribunal de l’UE a ainsi déjà confirmé des remboursements exigés auprès du père de Marine Le Pen, Jean-Marie Le Pen (320.000 euros), de Bruno Gollnisch (276.000 euros environ), de Mylène Troszczynski (plus de 56.000 euros) et de l’eurodéputée Dominique Bilde (environ 40.000 euros).
Système organisé
Marine Le Pen avait déjà subi un revers judiciaire début juin devant la justice française, qui enquête de son côté sur ces affaires d’assistants d’eurodéputés du FN soupçonnés de travailler en réalité pour le parti.
La cour d’appel de Paris a ainsi rejeté son recours contre la procédure qui lui vaut d’être mise en examen pour « abus de confiance » et « complicité d’abus de confiance ».
Dans l’instruction qu’ils mènent depuis fin 2016, les juges français Claire Thépaut et Renaud Van Ruymbeke enquêtent sur un possible « système » organisé par le parti et Marine Le Pen pour faire rémunérer des permanents avec les fonds européens réservés à l’embauche d’assistants.
Le préjudice estimé par le Parlement européen est au total de 7 millions d’euros sur la période 2009 à 2017.
Marine Le Pen est soupçonnée par la justice française d’une part d’avoir indûment employé sa cheffe de cabinet au FN, Catherine Griset, et son garde du corps, Thierry Légier, et d’autre part d’avoir « donné des instructions » afin que des eurodéputés engagent comme assistants des personnes « occupant en réalité des emplois » au FN.
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